La Grande Île va assumer pendant douze mois la présidence de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC). L’occasion, pour le président malgache Andry Rajoelina, de déployer et accélérer son agenda (industrialisation, agriculture, énergie) tout en offrant une belle visibilité diplomatique à Madagascar.
Effervescence à Antananarivo. A moins de 48 heures du 45e sommet des chefs d’État et de gouvernement de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC), la capitale malgache est sur le pied de guerre. Pas moins de seize délégations sont attendues, provenant d’autant de pays membres de l’organisation panafricaine créée en 1980 : Afrique du Sud, Angola, Botswana, Comores, République démocratique du Congo, Mozambique, Tanzanie, Zimbabwe, etc. Point d’orgue de la séquence diplomatique, la réunion de dimanche devrait entériner une série de décisions visant à raffermir la coopération régionale.
Ce sommet revêt une importance particulière pour Madagascar, qui assure cette année la présidence tournante de la SADC – vingt ans, précisément, après l’adhésion de la Grande Île à l’organisation internationale. Une responsabilité formalisée lors d’une cérémonie tenue le 12 août, au cours de laquelle le ministre zimbabwéen des Affaires étrangères a transféré ses prérogatives – symbolisées par un marteau – à son homologue malgache, Rafaravavitafika Rasata. Ont suivi deux jours de réunions interministérielles qui ont permis aux représentants des États membres de la SADC de finaliser les documents qui seront adoptés le dimanche 17 août.
L’industrialisation, sujet phare du 45e sommet
Car le programme du 45e sommet est chargé. Placé sous le thème « Faire progresser l’industrialisation, la transformation agricole et la transition énergétique pour une SADC résiliente », l’évènement présidé par le chef d’Etat malgache, Andry Rajoelina, centrera ses travaux sur le renforcement des capacités industrielles et chaînes de valeur régionales, l’inclusivité de la transition énergétique et la modernisation du secteur agricole. Autant de thématiques qui concernent au premier chef Madagascar, l’île étant elle-même engagée depuis plusieurs années dans un processus de modernisation, d’intégration et de diversification de son économie.
Thème principal du sommet, l’industrialisation fait de longue date figure de priorité pour Andry Rajoelina. Alors que se tenait fin juillet une « Semaine de l’industrialisation » préparatoire au sommet de la SADC, le président malgache a rappelé les nombreuses actions d’ores et déjà déployées en ce sens dans son pays. A l’image, par exemple, du programme « One District, One Factory » (ODOF) qui a permis d’implanter près d’une soixantaine d’unités semi-industrielles dans le pays, en contribuant à favoriser l’innovation, à créer de la valeur ajoutée locale et à générer de nombreux emplois.
Agriculture, énergie, insularité : les autres priorités malgaches pour la SADC
Madagascar entend aussi montrer la voie sur les deux autres domaines prioritaires du 45e sommet de la SADC. En matière d’agriculture, tout d’abord : les autorités malgaches misent en effet sur la transformation des chaînes agricoles (mécanisation des cultures rizicoles, modernisation des infrastructures rurales) pour réduire la pauvreté. Mais aussi en termes de transition énergétique, Madagascar assumant pleinement son rôle de pays-laboratoire des énergies renouvelables (EnR) : avec un potentiel photovoltaïque quasi-unique au monde, l’île est déjà passée de 16% à 28% d’EnR dans son mix énergétique entre 2020 et 2024 et vise, d’ici 2028, les 70%.
Du fait de son caractère insulaire, Madagascar a également choisi de consacrer une partie des travaux de la SADC aux problématiques rencontrées par les îles membres de l’organisation, comme Les Seychelles et l’île Maurice. A eux trois, ces pays africains partagent plus de 9 millions de kilomètres carrés de zones économiques exclusives (ZEE). « En conjuguant le potentiel maritime, économique, environnemental et culturel de nos îles avec les ressources, la puissance agricole et la capacité industrielle de nos États continentaux », a déclaré la ministre malgache des Affaires étrangères le 12 août, « nous pouvons bâtir la SADC autonome et compétitive ».
Répondre aux défis globaux et besoins locaux
Sans préjuger de ses conclusions, le sommet de l’organisation africaine sera en tout état de cause parvenu à hisser Madagascar au centre de l’attention médiatique et politique. Premièrement, grâce à la prouesse logistique sur laquelle aura reposé l’accueil de centaines de participants : en effet, au-delà du sommet à proprement parler, ce ne sont pas moins de 400 rencontres qui seront, pendant un an, organisées dans le cadre de la SADC sur le territoire malgache. Une manière de booster la visibilité du pays dans la région, tout en lui faisant bénéficier des retombées économiques d’une telle affluence.
Mais c’est bien sur le fond des thématiques abordées que Madagascar et ses dirigeants sont attendus au tournant. Véritable carrefour de la réflexion et de l’action régionales pendant douze mois, Antananarivo pourra affirmer son nouveau leadership sur un espace indianocéanique au cœur de toutes les convoitises. « Après 20 ans d’appartenance active à la SADC », a lancé Andry Rajoelina début août, « Madagascar nourrit l’espoir de voir se concrétiser des retombées tangibles de cette intégration, à travers des projets structurants, des échanges accrus, et un accompagnement renforcé en matière de développement économique et social ». Objectif revendiqué, pour le président malgache : « répondre aux défis globaux tout en satisfaisant les besoins de nos populations » .



