Depuis plus de quarante ans, le Sahara occidental oppose le Maroc et le Front Polisario, avec l’appui décisif de l’Algérie. Alors que le Conseil de sécurité doit examiner un nouveau rapport en octobre, les positions se cristallisent entre partisans du plan d’autonomie et défenseurs du principe d’autodétermination. Cette querelle régionale prend aujourd’hui une dimension internationale, attirant l’attention de puissances occidentales et de pays émergents. Le rôle de l’ONU s’avère déterminant pour maintenir un cadre de dialogue fragile. Le Sahara est devenu un dossier révélateur des fractures géopolitiques et du défi du multilatéralisme.
Un plan soutenu mais contesté
Présenté par Rabat en 2007, le plan d’autonomie propose que les Sahraouis administrent leurs affaires locales sous souveraineté marocaine. Depuis, des États comme les États-Unis, la France, le Royaume-Uni ou l’Espagne ont apporté un soutien explicite, jugeant l’initiative « sérieuse et crédible ». Plusieurs pays africains et latino-américains ont renforcé ce mouvement en inaugurant des représentations consulaires à Laâyoune et Dakhla, actes diplomatiques perçus comme un appui direct à la démarche marocaine. Pour le Maroc, ces positions traduisent une reconnaissance croissante de son projet comme unique solution réaliste et ouvrent des perspectives d’intégration régionale et économique accrues. Des observateurs estiment qu’il s’agit aussi d’un levier pour sécuriser les flux migratoires et développer des partenariats stratégiques dans la région, un point sur lequel un futur lien analytique pourrait être intégré.
Face à cette dynamique, l’Algérie défend une orientation diamétralement opposée. En recevant récemment Staffan de Mistura, envoyé personnel du secrétaire général de l’ONU, le ministre Ahmed Attaf a réitéré la nécessité de négociations « directes et sans condition » entre Rabat et le Front Polisario rapporte nos confrères de l’Algérie Aujourd’hui. Alger continue de qualifier la question saharienne de processus de décolonisation inachevé et rappelle que la MINURSO, créée en 1991, incarne l’engagement initial de la communauté internationale en faveur d’un référendum d’autodétermination. En décrivant le Sahara occidental comme « la dernière colonie d’Afrique », le gouvernement algérien cherche à mobiliser autour de principes juridiques universels.
Un dossier régional devenu terrain global
Le Sahara occidental ne se réduit plus à une rivalité locale. Il reflète aujourd’hui une confrontation d’alliances. Les puissances occidentales et plusieurs monarchies du Golfe appuient Rabat, considérant le Maroc comme un partenaire stratégique pour la stabilité régionale et la sécurité face aux menaces sahéliennes. À l’inverse, l’Afrique du Sud, la Namibie ou encore la Russie soutiennent le droit à l’autodétermination, inscrivant leur action dans une vision plus large des relations internationales multipolaires. Cette division alimente le Conseil de sécurité, où les membres permanents sont eux-mêmes partagés.
Le rappel contextuel s’impose ici : la rivalité autour du Sahara oppose deux poids lourds du Maghreb. Le Maroc et l’Algérie, voisins frontaliers, entretiennent des relations rompues depuis 1994. Ce différend territorial s’ajoute à une compétition politique et économique qui structure la région. Rabat cherche à renforcer son rôle d’interface avec l’Afrique subsaharienne, tandis qu’Alger mise sur ses ressources énergétiques et ses alliances continentales. L’absence de frontières ouvertes, la militarisation croissante et les tensions diplomatiques ont transformé le Sahara en baromètre des relations entre les deux pays, chacun mobilisant ses soutiens internationaux pour conforter sa position.
Au cœur de ce bras de fer, l’ONU tente de maintenir le fil du dialogue. Staffan de Mistura prépare un rapport attendu en octobre, destiné au Conseil de sécurité. Mais ses marges de manœuvre demeurent limitées : Rabat refuse toute option de référendum, et le Front Polisario rejette l’autonomie sans garantie d’autodétermination. Cette impasse illustre la difficulté à concilier les résolutions onusiennes, qui mentionnent le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, et la recherche d’une solution qualifiée de pragmatique par une partie des États membres.
Les populations sahraouies restent largement absentes des tractations. Dans les camps de réfugiés de Tindouf, dans les zones contrôlées par le Polisario ou dans les provinces sous administration marocaine, les attentes portent sur l’accès à l’emploi, au développement et à une reconnaissance identitaire. Les débats diplomatiques, dominés par des considérations stratégiques, laissent en arrière-plan ces préoccupations quotidiennes, alors même qu’elles conditionnent la stabilité durable de la région. Une enquête future pourrait utilement s’attarder sur cette dimension humaine pour compléter l’approche institutionnelle.


