Sénégal : Après de nouveaux drames, Kolda suspend les manifestations liées au Kankourang

Deux violents incidents survenus le dimanche 21 septembre ont relancé le débat autour de la sécurité des cérémonies traditionnelles. À Ngaparou, un Kankourang a été tué, tandis qu’à Colobane (Ziguinchor) un jeune d’une vingtaine d’années a été grièvement blessé à l’arme blanche lors d’un Diambadong. Le même jour à Kolda, un jeune en vacances a perdu la vie après une altercation dans un « lavage ». Face à cette série d’événements, le préfet de Kolda a annoncé la suspension des manifestations culturelles liées au Kankourang sur la voie publique.

Des violences qui entraînent une décision administrative

Le préfet du département de Kolda a signé, ce 22 septembre 2025, un arrêté interdisant toute organisation de cérémonies de Kankourang dans l’espace public. Selon ce texte, la mesure se justifie par des troubles récurrents à l’ordre public, des blocages de la circulation et surtout l’usage d’armes blanches ou d’objets contondants qui ont déjà causé la mort. L’arrêté stipule que toute infraction à cette décision entraînera des sanctions prévues par la loi, avec le commissaire central chargé de sa mise en œuvre. L’autorité territoriale insiste sur le fait que la sécurité des citoyens et la tranquillité de la vie sociale passent avant la tenue de ces rassemblements.

Le même week-end, plusieurs incidents distincts sont venus accentuer les inquiétudes. À Ngaparou, un Kankourang a trouvé la mort, tandis qu’à Colobane un jeune a été poignardé lors d’un Diambadong et hospitalisé en soins intensifs. À Kolda, un vacancier a succombé à ses blessures après une rixe similaire. Les auteurs présumés des agressions ont été interpellés, et des enquêtes sont ouvertes. Ces drames alimentent le débat sur les limites à fixer entre liberté culturelle et protection de l’ordre public.

Une tradition reconnue mais sous tension

Le Kankourang occupe une place essentielle dans les rites d’initiation des communautés mandingues, notamment en Casamance et en Gambie. Il est à la fois symbole de protection et de discipline pour les jeunes initiés. Sa valeur culturelle est largement reconnue : en 2005, l’UNESCO a proclamé le Kankourang mandingue du Sénégal et de la Gambie chef-d’œuvre du patrimoine oral et immatériel de l’humanité. Trois ans plus tard, en 2008, il a été inscrit sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Cette reconnaissance consacre la richesse de la tradition mais ne fait pas disparaître les tensions liées à sa pratique dans l’espace public.

La récente interdiction à Kolda pose donc la question de la conciliation entre préservation du patrimoine et impératifs sécuritaires. Certains acteurs culturels appellent déjà à un encadrement plus strict plutôt qu’à une suspension pure et simple, un débat qui pourrait s’élargir au niveau national.

La décision du préfet reste en vigueur jusqu’à nouvel ordre, dans l’attente de solutions jugées plus adaptées par les autorités et les communautés.

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