Mise en accusation de Macky Sall : les craintes d’Alioune Tine

L’annonce de la possible mise en accusation de l’ancien président Macky Sall continue de diviser la scène politique sénégalaise. Alors que le gouvernement actuel affirme vouloir rendre des comptes sur la gestion passée de l’État, plusieurs voix s’élèvent pour appeler à la prudence. Parmi elles, celle d’Alioune Tine, défenseur des droits humains et fondateur du think tank AfrikaJom Center, qui redoute une dérive aux conséquences durables pour la stabilité du pays.

Une démocratie qu’il juge « malade »

Pour Alioune Tine, rouvrir le dossier Macky Sall au moment où le Sénégal tente de relancer son économie pourrait raviver de vieilles blessures politiques. Sur le réseau X, il s’interroge sur la pertinence d’une telle démarche dans une période de « désenchantement démocratique » et de tensions sociales persistantes. L’analyste estime que la paix civile reste la condition première de tout redressement économique. À ses yeux, l’histoire du pays offre déjà un précédent douloureux : l’épisode du Gatsa-Gatsa, période d’affrontements politiques internes dont les séquelles, selon lui, pèsent encore sur les institutions. Il craint que la scène politique ne replonge dans une spirale d’instabilité comparable si la procédure de mise en accusation est menée sans mesure.

Les reproches adressés à l’ancien président

L’ancien chef de l’État est visé par un projet de résolution déposé à l’Assemblée nationale, à la suite d’un rapport de la Cour des comptes publié en février 2025. Le document évoque des irrégularités dans la gestion budgétaire, notamment une dette publique sous-évaluée, des emprunts hors circuit officiel et des ventes non justifiées de biens de l’État. Les parlementaires favorables à la procédure estiment que ces faits, s’ils sont avérés, pourraient relever de la haute trahison. Macky Sall conteste ces accusations, affirmant que les chiffres avancés sont « politiquement instrumentalisés ».

Pour Alioune Tine, au-delà de la légitimité des enquêtes, la méthode employée importe tout autant que le fond. Il avertit que les luttes de pouvoir menées sous couvert de justice risquent d’éroder davantage une démocratie encore fragile. Selon lui, la justice ne doit pas devenir un outil de revanche politique, au risque de faire perdre au pays la sérénité nécessaire à sa reconstruction économique et sociale.

Entre mémoire et vigilance

La sortie d’Alioune Tine sonne comme un rappel à la responsabilité collective. En évoquant les « séquences catastrophiques » du passé, il invite les dirigeants actuels à privilégier le consensus national plutôt que la polarisation. Pour lui, les institutions sénégalaises doivent être consolidées avant d’être soumises à de nouvelles secousses politiques.

Si la justice doit suivre son cours, insiste-t-il, elle doit le faire dans le respect des équilibres qui garantissent la paix civile. Faute de quoi, le pays risquerait de substituer la recherche de vérité à une logique d’affrontement continu — une situation dont il peine encore à guérir.

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