Présidentielle au Cameroun : un séisme politique en vue ?

Au Cameroun, la présidentielle du 12 octobre 2025 pourrait marquer un tournant inattendu. Les premières estimations issues des médias et des observateurs nationaux évoquent une avance du candidat Issa Tchiroma Bakary face au président sortant Paul Biya, au pouvoir depuis plus de quatre décennies. Si ces tendances restent à confirmer par le Conseil constitutionnel, l’effervescence politique qui a suivi le scrutin témoigne d’un moment inédit pour le pays.

Un duel inédit et des signaux de changement

Les rues de Yaoundé et de Garoua ont vu s’affronter les symboles de deux époques : d’un côté, le régime solidement installé de Paul Biya, 92 ans, et de l’autre, Issa Tchiroma Bakary, ancien ministre devenu figure de rupture. À Garoua, son bastion, des affrontements ont éclaté à la suite de signalements d’irrégularités. Des bulletins manquants dans un bureau de vote ont attisé la colère de ses partisans, provoquant des heurts avec les forces de l’ordre et l’incendie d’un véhicule de gendarmerie.

Pour la première fois depuis plus de quarante ans, l’hypothèse d’un changement à la tête de l’État semble crédible. Les déclarations prudentes d’Issa Tchiroma Bakary, appelant au calme et à la reconnaissance des résultats officiels, contrastent avec l’enthousiasme de ses soutiens. La coalition Union pour le Changement (UPC), qui l’avait désigné comme candidat commun de l’opposition, affirme disposer d’un avantage dans la majorité des régions. Son équipe de campagne revendique même des données collectées dans près de 90 % des bureaux de vote, bien que les résultats officiels ne soient pas encore rendus publics.

Les images de procès-verbaux partagées sur les réseaux sociaux nourrissent la rivalité entre camps. D’un côté, les partisans de Biya invoquent la prudence et la légalité du processus, de l’autre, ceux de Tchiroma proclament une victoire “statistique”. À Yaoundé, certains quartiers populaires, tels que la Briqueterie, résonnaient encore dimanche soir des slogans : « Au revoir Paul Biya, Tchiroma arrive ».

L’ombre d’un règne interminable

Depuis son arrivée au pouvoir en 1982, Paul Biya a façonné la vie politique camerounaise à son image. La suppression de la limite des mandats en 2008 lui a permis de se maintenir sans alternance, consolidant un pouvoir reposant sur la fidélité administrative et l’équilibre entre les élites régionales. Élu à plusieurs reprises avec plus de 70 % des suffrages, il a su conserver l’appui du parti majoritaire, le RDPC, et une influence étroite sur les institutions, y compris l’appareil sécuritaire et la justice. Cette longévité a progressivement affaibli l’opposition, fragmentée et parfois réduite au silence par des décisions administratives ou judiciaires.

Entre attente et incertitude

Ce scrutin révèle un pays partagé entre patience et espoir. Les autorités appellent à ne pas franchir la “ligne rouge” en proclamant des résultats avant l’heure, rappelant que seule l’institution électorale ELECAM et le Conseil constitutionnel sont habilités à valider les chiffres. Malgré ces mises en garde, les revendications se multiplient, amplifiées par la circulation en ligne de décomptes partiels.

La tension reste palpable, mais le calme domine à Yaoundé où la population, habituée aux lenteurs institutionnelles, guette les annonces à venir. Les Camerounais attendent désormais le verdict des urnes, prévu au plus tard le 26 octobre. Quelle que soit l’issue, l’élection de 2025 aura déjà bouleversé les certitudes d’un pays longtemps figé sous la même direction.

Au-delà des chiffres, cette présidentielle interroge la capacité du Cameroun à gérer une transition politique pacifique. Si les tendances se confirment, Issa Tchiroma Bakary pourrait devenir le premier à ébranler un système réputé immuable. Si elles s’inversent, le système Biya démontrera une fois encore la résilience d’un pouvoir façonné par le temps. Dans les deux cas, la secousse politique est déjà perceptible : le pays retient son souffle avant le verdict final.

3 réflexions au sujet de “Présidentielle au Cameroun : un séisme politique en vue ?”

  1. Si les Camerounais avaient tous voté avec intelligence et une volonté de changer l’image du pays à l’intérieur qu’à l’extérieur, certainement que Issa Tchiroma Bakary l’emportera; ce qui signifie que les partisans de ce dernier devraient dépasser la moyenne pour éviter une ruse de Paul Biya. C’est un vieux qui voudrait mourir avec la chaise présidentielle dans son cercueil.

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    • Vous dites que si nous les Camerounais avions tous voté avec intelligence et une volonté de changer…comment faire confiance à un système électoral dont tous les indicateurs sontorientés direction Paul Biya???
      Il n’y a que du kérozen dans votre mémoire…vous ne savez pas que Paul Gbiya a déjà tout mis en place: « commencez par dire que c’est le Tchiroman qui gagne au démarrage, pour donner du crédit à notre système, puis au milieu , vous renversez l’eau et le bébé président The Atlantean….

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