Une vidéo annonçant un coup d’État imaginaire en France a récemment semé le trouble bien au-delà des réseaux sociaux. Générée par intelligence artificielle, elle a accumulé des millions de vues en quelques heures, au point d’être citée publiquement par le président Emmanuel Macron. Comme le rapporte Sud Ouest, derrière cette séquence trompeuse se cache un lycéen burkinabè de 17 ans, qui assume aujourd’hui son geste et en détaille les motivations.
Une Désinformation virale
Diffusée début décembre sur TikTok puis relayée massivement sur Facebook, la vidéo met en scène de prétendues journalistes françaises annonçant la prise de pouvoir d’un colonel à Paris, soutenu par des manifestants. Le réalisme des images et des voix, entièrement fabriquées par des outils d’IA, a trompé une partie du public. En quelques jours, la séquence a dépassé les douze millions de vues et suscité des dizaines de milliers d’interactions.
La portée de cette infox a dépassé le simple cadre numérique. Emmanuel Macron a lui-même évoqué l’affaire lors d’un échange public à Marseille, regrettant notamment l’impossibilité d’obtenir rapidement le retrait de la vidéo sur Facebook. Il a également confié avoir été contacté par un chef d’État africain, inquiet de la situation en France après avoir vu circuler ces images. Cet épisode a mis en lumière la vitesse de propagation des contenus trompeurs et leur capacité à influencer des perceptions à l’échelle internationale.
C’est dans ce climat de forte exposition médiatique et de débat sur la responsabilité des plateformes que l’auteur de la vidéo a été identifié. L’adolescent, qui a depuis supprimé la publication, a accepté d’expliquer sa démarche, tout en souhaitant rester anonyme.
Intelligence artificielle et quête d’indépendance financière
Le jeune Burkinabè reconnaît sans détour que l’objectif initial était financier. En publiant cette fausse information, il dit avoir gagné environ sept euros grâce aux mécanismes de rémunération liés à l’audience. Une somme modeste, mais suffisante à ses yeux pour tester le potentiel économique des réseaux sociaux. Élève en section génie civil-construction, il affirme ne pas vivre dans la précarité et être soutenu par sa famille, tout en cherchant à atteindre une autonomie financière plus rapide.
Avant de se lancer dans la désinformation, il avait essayé des vidéos de motivation, sans succès notable. L’essor des contenus générés par IA lui a alors semblé offrir davantage de visibilité. Formé principalement via des tutoriels sur YouTube, il s’est spécialisé depuis l’an dernier dans la création de vidéos artificielles, une activité qu’il a réellement structurée à partir d’octobre 2025.
La vidéo sur le faux putsch a aussi servi de vitrine à ses services. Le lycéen explique avoir été approché par plusieurs personnes intéressées par des formations en création de contenus IA. Il propose des cours facturés 7 000 francs CFA de l’heure, une offre qu’il met en avant sur sa page Facebook. Sa notoriété soudaine l’a surpris : il raconte avoir été contacté par des journalistes français, notamment du quotidien Le Monde, et s’amuse de voir son nom circuler dans des médias étrangers.
Au-delà de l’aspect financier, l’adolescent avance une motivation plus politique. Il estime que certaines informations diffusées en France sur les pays du Sahel sont inexactes ou biaisées. Selon lui, cette vidéo avait aussi pour but de provoquer et de renvoyer, par la peur, une image déformée similaire à celle qu’il juge imposée à sa région.



