le syndrome Trabelsi

Qui aurait songé voire soupçonné un instant que ce qu’eut lieu en janvier dernier en Tunisie puisse advenir ? Qui aurait prévu le tsunami Tunisien et surtout l’opiniâtreté dans la révolte d’un peuple réputé pourtant résigné et la rapidité de déliquescence d’un régime réputé pourtant fort et « policier ». Nous sommes interpellés par la pugnacité voire la pulsion haineuse de la révolte des Tunisiens contre leur ex Président qui n’a pas fait que de mauvaises choses pour le pays? Ce qui, donc, s’est passé en Tunisie et se passe encore en Egypte impose aussi bien au politologue qu’au sociologue de revoir leurs référentiels conceptuels, leurs paradigmes et leurs outils classiques d’analyse pour expliquer des faits sociaux inédits et des réactions humaines tranchées. En effet, la Tunisie a réalisé des percées significatives au cours des dernières décennies, en matière de santé, d’éducation et de revenu, mesurés par l’IDH ; indice composé qui mesure la qualité de vie moyenne de la population d’un pays. Il est établi sur une grille allant de 0 à 1. Il tient compte de trois dimensions du développement humain. D’abord, la possibilité d’avoir une vie longue et en santé en se fondant sur l’espérance de vie à la naissance. Ensuite, le niveau de scolarisation, évalué à partir du taux d’analphabétisme et de la fréquentation des différents niveaux du système scolaire. Enfin, le standard de vie, calculé à partir du Produit intérieur brut par capita en tenant compte de la Parité du pouvoir d’achat (PPA). Il  place la Tunisie au 7ème rang Arabe avant l’Algérie (9ème) et le Maroc (10ème). Au classement mondial, la Tunisie est désormais classée 81ème avec un IDH de 0,712. « Ce progrès est attribuée aux réformes impressionnantes menées sur le long terme en matière de santé et d’éducation ainsi que l’espérance de vie (75 pour la Tunisie), de même que la mortalité infantile a chuté à 38 décès pour mille, en dessous de la moyenne mondiale actuelle de 44 pour 1.000.Trois indices non monétaires sont pris en compte pour mesurer le développement humain de par le monde : l’ampleur et l’impact de l’inégalité, les écarts en matière de genre et la pauvreté multidimensionnelle extrême. En Tunisie le taux de scolarisation y a considérablement augmenté, spécialement depuis que le pays a promulgué en 1991 une loi rendant la scolarité obligatoire pendant 10 ans.

Le registre de Ben Ali a été néanmoins terni par l’avidité ravageuse d’enrichissement, généralement illicite de l’entourage du Président déchu, notamment le clan de son épouse Trabelsi. Depuis l’arrivée de Ben Ali au pouvoir après en novembre 1987, la famille Trabelsi a lancé une vaste opération d’expropriations, de détournements de fonds, de corruption et d’affaires en tout genre.

Nous lisons dans « La régente de Carthage » que la « spécialité de Leila Ben Ali reste la prédation économique au profit des siens (…) et aucun investissement n’est possible en Tunisie sans que la belle-famille de Ben Ali n’y ait sa part » .

D’après la revue américaine Forbes, la fortune personnelle du président Tunisien déchu  est estimée à plus de 5 milliards de dollars compte non tenu de ses biens immobiliers un peu partout dans le monde. Aujourd’hui, selon les experts, les 10% les plus riches de la population tunisienne perçoivent le tiers des revenus du pays contre le tiers des Tunisiens qui doivent se contenter pour vivre de seulement 9% du PIB.

L’Egypte n’est pas en reste, la fracture sociale y est encore plus dramatique. 40% de la population vit avec moins 1,5 Euro/j face à la fortune d’un président chiffrée entre US$ 40 & 70 milliards. Les mêmes causes entraînant les mêmes effets Housni Moubarak a subi le même triste sort- la destitution- que son homologue Tunisien.

Le syndrome Trabelsi repose sur deux constantes communes à bon nombre de pays Arabes  de même que sur plusieurs variables spécifiques selon le pays. Ces variables font office de détonateur des soulèvements populaires. L’on peut décliner les constantes sous forme de l’équation suivante à savoir despotisme (Istibdad) + malversation (Fasad) + détonateur  (variable)= soulèvement (Intifada)

Aujourd’hui les peuples ne s’intéressent plus aux querelles idéologiques, aux clivages politiques, à  la segmentation du régime en place ou au type de pouvoir. C’est qui importe le plus, c’est la bonne gouvernance, c’est-à-dire « al Hokm Ar Rasheed ».

Le credo qui doit être véhiculé actuellement par la classe politique a pour nom le combat contre l’exclusion, contre le mépris et l’humiliation (Al Hogra) des miséreux. Le credo à véhiculer doit être sous l’enseigne d’un grand combat (Al Jihad Al Akbar) contre la corruption, les passe-droits et le népotisme. Les seuls credo qui demeurent évocateurs aujourd’hui face à la nécrose de l’action partisane, la gueuserie et la langue de bois du discours politique.

Article proposé par un internaute

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