La Merkhollande, un néologisme européen créé pour rendre compte de l’importance de la coopération entre l’Allemagne (Angela Merkel) et la France (François Hollande), ainsi que la nécessité d’une « entente parfaite » au sein du couple franco-allemand pour l’avancée de l’Union, a connu de grands soubresauts ces dernières semaines.
En effet, après les multiples rencontres au sommet, ici et là, c’est la Chancelière allemande qui s’est déplacée vers Paris, pour impulser une nouvelle dynamique au couple qui battait de l’aile, car les questions cruciales étaient bien nombreuses et demandaient instamment que les deux dirigeants s’y appesantissent, afin de permettre à l’Europe d’évoluer, notamment en résolvant les problèmes liés à la crise…
L’Axe Paris-Berlin dans la tourmente !?
Depuis l’élection de François Hollande, un socialiste, à l’Elysée, l’avenir du couple franco-allemand, dont on connait l’importance pour la stabilité européenne, était devenu incertain, pour plusieurs raisons.
Tout le gratin européen avait peur de la nouveauté, en doutant de la capacité de la chancelière allemande à s’entendre avec le nouveau locataire de l’Elysée, elle qui est très exigeante et très portée sur la rigueur budgétaire, un pur produit de la Droite. Surtout après la lune de miel et l’entente cordiale qui ont prévalu entre elle et le prédécesseur de François Hollande dans ce rôle, le Président Nicolas Sarkozy, un homologue de Droite avec qui le courant a bien passé.
On redoutait donc, aussi bien à Paris qu’à Berlin, la tournure qu’allait prendre le nouveau couple franco-allemand… Des relations difficiles en perspective, entre un Président français socialiste, de Gauche, et une Chancelière allemande chrétienne-démocrate, de Droite.
La Merkholande… Pour un tango tumultueux, à défaut d’une valse doucereuse !
Mais, c’était plus de peur que de mal, car finalement la chancelière a plutôt bien accueilli son nouvel homologue dans la paire franco-allemande, conscients qu’ils étaient, tous les deux, de l’importance de la stabilité dans ce couple pour faire avancer l’Union Européenne dont Paris et Berlin sont indéniablement les moteurs.
Sans filer le parfait amour, les deux dirigeants ont fini par s’entendre, sur l’essentiel mais sur le minimum, en attendant d’aborder, une fois pour toutes, c’est-à-dire incessamment, les sujets qui fâchent, qui se font de plus en plus pressants, les problèmes se posant avec plus d’acuité, demandant l’attention prioritaire des dirigeants, notamment pour des réponses appropriées à la crise.
Cependant, aucun observateur ne se trompe sur la nature des relations franco-allemandes quant aux questions européennes. Il s’agit bien d’un mariage de raison, et non d’une union d’amour parfait à l’eau de rose.
Car, les deux partenaires sont tout à fait conscients de leurs rôles respectifs et de l’acuité des problèmes à régler, malgré leurs divergences de points de vue et de conceptions : la rigueur contre l’engagement accru de l’Etat, la réduction des déficits contre de nouveaux investissements massifs, y compris en accroissant la dette déjà colossale, donc le déficit…
Ainsi, à défaut de se mettre dans la danse, à la douce mélodie des temps apaisés, qui appelle à la valse, le couple franco-allemand se prépare à réussir le tango dans le tumulte et le tempo donné par la crise économique… A grandes enjambées, un tempo très rapide qui demande aux deux partenaires de bien s’accorder, d’où les nombreux déplacements, de part et d’autre, et les rencontres de plus en plus fréquentes.
Une entente improbable mais possible!
Le couple franco-allemand l’a bien démontré ces dernières semaines. Oui, il est possible de s’entendre, même en étant de bords politiques différents, mais pas opposés, la Démocratie chrétienne de Droite et le Socialisme (réformateur) de Gauche.
En effet, on peut dire que les valeurs de la CDU (Union de la Démocratie Chrétienne), le parti d’Angela Merkel, ne sont pas si loin de celles de la Démocratie sociale, donc assez proches d’un Socialisme qui se veut un tantinet réaliste. Il n’y a qu’à considérer le qualificatif « chrétien » pour s’en convaincre, avec ses corolaires d’humanisme, de Solidarité, de bien-être social…
Cependant, les questions qui fâchent ne sont pas loin et risquent de jeter un peu d’ombre sur la lumière. Sauf si le couple franco-allemand sait s’accorder dans le compromis du clair-sombre, en réussissant ce que les chroniqueurs nomment déjà la Merkhollande, une entente cordiale à défaut d’être parfaite.
Au centre des débats entre les deux partenaires, il y a en premier la question de l’emploi. Pendant que l’Allemagne est pour une certaine flexibilité, par exemple en permettant aux entreprises de recourir à l’intérim pour faire face à la crise et retrouver un peu de compétitivité, la France s’inquiète des effets pervers d’une telle flexibilité qui est de nature à ouvrir les vannes de la précarité, même si c’est une réponse adaptée au chômage galopant, notamment des jeunes.
Autre divergence, mineure celle-là, l’Allemagne est pour un règlement communautaire des questions cruciales, en recourant aux mécanismes prévus par les traités européens, avec priorité à la Commission de Bruxelles. Pendant ce temps, Paris préfère plutôt des décisions intergouvernementales, au cas par cas, afin de faire prendre en compte son point de vue par les autres partenaires européens, au cas où l’entente deviendrait difficile, voire impossible, avec la Chancelière allemande qu’on connaît pour son intransigeance, en ce qui concerne, par exemple, les questions budgétaires et la nécessité de réduire les déficits.
En définitive, le couple franco-allemand a encore de beaux jours devant lui, pour avoir déjà traversé tant de turbulences au cours de l’histoire européenne. Aussi, même si des divergences mineures se profilent, elles ne sont pas de nature à assombrir des relations que les deux partenaires savent vitales pour la construction européenne.
Car, ils sont tous conscients sur le fait que : « l’idée de l’Europe est basée sur le mouvement. Si l’Europe n’avance pas, elle s’effacera de la carte du monde. » Comme l’a réaffirmé le Président François Hollande le jeudi 16 mai 2013.