Inscriptions à l’Uac : le Décret «qui donne raison au Rectorat» est un faux

Le (supposé) Décret portant sur l’instauration de la gratuité  des frais d’inscription dans les universités publiques du Bénin, brandi par l’équipe rectorale pour donner tort aux étudiants, dans la crise qui les opposent sur la question, présente des irrégularité qui entachent son authenticité. Tout porte à croire que le document a été maladroitement antidaté.

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Rappels et nouveautés.Ce dimanche 17 novembre, lorsque notre spécialiste de l’Université d’Abomey-Calavi, Yao Hervé Kingbéwê, a sorti pendant la conférence de rédaction une copie du décret portant gratuité de l’inscription dans les universités publiques du Bénin (voir Décret ci-contre), cela a suscité la curiosité de tous les journalistes présents. Une curiosité qui a donné lieu à un débat, sur fond de commentaires et interrogations, sur l’authenticité du document. Ce genre de débat, à La Nouvelle Tribune, on en fait toujours sur les sujets brûlants de l’actualité.

Bref rappel des faits

Le document objet de débat, ce dimanche 17 novembre, était le Décret N°2008-802 du 31 décembre 2008, portant prise en charge par l’Etat des frais d’inscription des étudiants béninois non-boursiers, non-secourus, et non-salariés, dans les universités nationales du Bénin, pour compter de la rentrée 2008-2009. Prise en 2008 par le Président Boni Yayi, cette mesure est en fait à l’origine d’une crise qui secoue l’Université d’Abomey-Calavi, depuis quelques semaines. L’équipe rectorale actuelle de cette université, avec à sa tête le Recteur Brice Sinsin, a décidé rendre payante la deuxième inscription.

La nouveauté rectorale n’a pas été du gout des mouvements étudiants à caractère syndical, qui ont décidé de paralyser l’université jusqu’à à ce que le Rectorat maintienne la gratuité de la première et de la seconde inscription. L’inexistence – jusqu’ à ce vendredi 15 novembre – du Décret portant sur la mesure de gratuité de l’inscription dans les universités publiques, fait partie des éléments ayant compliqué le dénouement de la crise. Inexistence, oui ! Au tout début de la crise, toutes les diligences faites pour entrer en possession d’une copie du Décret en question ont été vaines. Nos investigations ont révélé qu’aucun des acteurs concernés n’avaient pas copie du document qui donne une base juridique à cette mesure.

Eléments illustratifs. Dans son Arrêté qui instaure le paiement de la deuxième inscription, le Rectorat de l’Uac ne fait aucunement mention du Décret instituant la gratuité. Invité récemment sur Golfe Fm, où il a pris part à une émission sur la gratuité des frais d’inscription, le Secrétaire général de l’Uac, le Professeur Léon Bio-Bigou, avait affirmé qu’aucun Décret portant sur la gratuité, décrétée en 2008 par le Chef de l’Etat, n’existait. Mieux, dans le cadre d’un arbitrage pour la fin de la crise, le ministre d’Etat chargé de l’Enseignement Supérieur et la Recherche Scientifique a rencontré les différents protagonistes. Le patron de l’Enseignement Supérieur lui-même n’a pas fait cas du texte présidentiel.

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Pourquoi le document est un faux !

Le faux ! vendredi 15 novembre, des sources concordantes ébruitent une information selon laquelle le Décret portant institution de la gratuité des frais d’inscription dans les universités publiques du Bénin, a été retrouvé. Sorti on ne sait ni d’où, ni comment, le document est brandi par les autorités de l’université d’Abomey-Calavi, au cours d’un point de presse tenu dans la soirée du même vendredi. Voilà qui devrait clouer le bec aux étudiants contestataires, et mettre fin au bras de fer.

Et pourtant. Ceux qui ont «fabriqué», disons-le comme ça, ce document pour faire taire la fronde étudiante, n’ont pas réfléchi pour aller loin. Le document comporte une grosse irrégularité qui entache son authenticité.

Le Décret brandi date du 31 décembre 2008. Il est signé du Président de la République, Boni Yayi, du ministre de l’Economie et des Finances de l’époque, Soulé Mana Lawani, et du ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique, Vicentia  Boco. Mais, à la date du 31 décembre 2008, Vicentia Boco n’était plus ministre de l’Enseignement Supérieur. Elle n’était même plus membre du Gouvernement. Pour rappel, le 22 octobre 2008, le Président Boni Yayi a procédé à un remaniement de son gouvernement (voir  la composition du gouvernement à la page 12).  Lors de ce remaniement, François Abiola a été nommé ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique, en remplacement de Vicentia Boco. Qui a quitté le gouvernement pour être portée plus tard à la tête de l’Institut National pour la Promotion de la Femme.

Une autre irrégularité constatée par l’un des responsables des mouvements étudiants, a trait à l’hétérogénéité de la Police du document. La police avec laquelle est écrite la date de prise du décret, est différente de la police de tout le document. A ce niveau, l’éclairage des juristes spécialiste de la question administrative est nécessaire. Mais en attendant, on est en droit de se demander  comment se fait-t-il que Vicentia Boco, qui a quitté le gouvernement  en octobre 2008, soit signataire d’un Décret qui date de décembre de la même année ? Interrogations !

Selon l’avis des spécialistes du Droit, on est bien face à un cas de faux et usage de faux en écriture publique. Le gouvernement Yayi est-il passé de la gouvernance par le bruit à la gouvernance par le faux ? Ses éclaircissements et ceux du Rectorat sont attendus.

Relire le decret présenté par les autorités

Liste des membres des différents gouvernements  

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