Projet Épine Dorsale du Bénin : pourquoi le Groupe Petrolin détient des droits inaliénables

Après les lancements officiels à Niamey puis à Cotonou, le projet de réhabilitation –construction de la voie ferroviaire Cotonou-Niamey va sans doute entrer dans sa phase active. Mais avant, il importe de lever une petite équivoque suscitée par le discours tenu hier, à Cotonou, par Vincent Bolloré, Pdg du Groupe Bolloré. 

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On pourrait lire dans des extraits de son discours, une belle tentative de ravir la vedette au Groupe Petrolin qui détient, pourtant,  les droits inaliénables et exclusifs sur le projet.

«Monsieur  Dossou Samuel président du Groupe Petrolin a accepté de m’accompagner dans ce projet en investissant son argent». Ces propos ont été tenus hier mardi 08 avril par Vincent Bolloré, président du Groupe Bolloré. C’était à Cotonou, lors de la seconde cérémonie de lancement officiel des travaux de construction de la voie ferroviaire Cotonou-Niamey, dans le cadre du projet de boucle ferroviaire sous-régionale. Le premier lancement ayant eu lieu à Niamey la veille, lundi 07 avril. Les propos du Pdg du Groupe Bolloré vont sans doute susciter des interrogations chez ceux qui connaissent un peu de l’histoire du projet de réhabilitation de la ligne ferroviaire Cotonou-Niamey dont nous avons fait écho dans nos publications antérieures. On pourrait voir à travers ses propos une intention de récupération d’un projet dont l’initiateur est pourtant connu : le Groupe Petrolin de l’homme d’affaires béninois Samuel Dossou Aworet.

Petit rappel important

La réhabilitation, construction et exploitation de la ligne ferroviaire Cotonou-Niamey n’est rien d’autre que le volet rail du projet Epine Dorsale de l’homme d’affaires Samuel Dossou, Pdg du Groupe Petrolin. Il s’agit d’un projet de modèle de développement sous-régional qui sera mis en œuvre par Pic network Limited et Pic international Sa, toutes deux, filiales du groupe Petrolin. ‘’Epine Dorsale’’ est composé d’un port en eau profonde, pétrolier, minéralier et commercial à Sèmè-Podji (Bénin), d’une infrastructure ferroviaire opérationnelle de Cotonou à Parakou avec une extension prévue de Parakou à Dosso et Niamey (Niger), d’autant de ports secs que de besoin, notamment les ports secs de Parakou et Dosso  et d’un aéroport international à Kraké, à la frontière entre le Bénin et le Nigéria. Dans cet ensemble, le chemin de fer constitue la liaison indispensable entre le Port  Pétrolier, Minéralier et Commercial en Eau Profonde de Sèmè Podji et  le Port sec de Parakou en cours de construction par le Groupe Petrolin.

Plusieurs actes administratifs ont été pris entre les différentes parties et le Groupe Petrolin, lui conférant l’exclusivité du projet. Le Groupe Bolloré est officiellement entré dans la danse, en qualité de partenaire stratégique, en novembre 2013. En effet, ce projet a été au cœur de la visite au Bénin du président nigérien Mahamadou Issifou le 07 novembre 2013. Un mémorandum d’accord a été signé entre les deux pays. Dans ce mémorandum, il a été décidé de la création d’une société au capital de soixante-dix milliards (70 000 000 000) de fcfa pour la construction de ce chemin de fer Cotonou-Niamey. 40% du capital de ladite société revient au groupe Bolloré en tant que partenaire stratégique, 20% au Groupe Petrolin en sa qualité de concessionnaire et promoteur du projet, 10% pour chacun des deux Etats (béninois et Nigérien) et 20% pour les privés nigériens. L’entrée de Bolloré dans le projet est donc la volonté des chefs d’Etats. En dépit de la taille de son actionnariat, Bolloré peut-il s’arroger la paternité du projet ? Sans doute pas. La convention signée en 2010 entre l’Etat béninois en 2010 donne la définition du terme partenaire stratégique et son rôle dans la mise en œuvre du projet. Sur le plateau de la télévision Canal 3 dimanche dernier, Me Abdon Deguenon, expert juridique auprès le Groupe Petrolin a expliqué que la convention cadre définit le terme  « partenaire stratégique » comme un partenaire retenu dans chaque société d’exploitation. Ce partenaire doit avoir «…une connaissance particulière de l’infrastructure, du secteur considéré et qui se verra reconnaitre une influence particulière sur la gestion ou l’exploitation » de cette société. « Le partenaire stratégique n’est pas un super partenaire qui vient phagocyter celui qui était déjà dans le système et avait un droit acquis », avait-il précisé. Déduction : le Groupe Bolloré, a accepté en tant que partenaire stratégique, d’accompagner le Groupe Petrolin détenteur des droits exclusifs et inaliénables de ce projet, et non l’inverse.

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Droits acquis incontestables

Au regard de l’évolution de ce dossier depuis 2008, on peut déduire que le Groupe Petrolin a des droits acquis et inaliénables dans la conception et la mise en œuvre du projet Epine Dorsale avec sa composante Chemin de fer, qui prend en compte la ligne Cotonou-Niamey.

Primo, Petrolin est l’adjudicataire de l’appel d’offres international bi-étatique de 2008 sur ce projet. Il s’agit de  l’appel d’offres bi-étatique (Bénin-Niger) N° 5498/mdcttp-pr/mtac/dc/sg/ocbn du 04 août 2008 relatif à la réhabilitation, la construction et la gestion du réseau ferroviaire Cotonou-Dosso-Niamey auquel le Groupe Bolloré avait même souscrit. Une lettre d’adjudication signée par les Etats béninois et nigérien, en date du 22 juillet 2010, a même été adressée aux responsables du Groupe Petrolin.

Secundo, le 25 janvier 2010 (rappel important), une convention cadre de partenariat public-privé et d’investissement  a été signée entre le gouvernement béninois et le Groupe Petrolin. La convention définit les conditions générales, économiques, juridiques et fiscales d’exécution du projet Epine Dorsale. Sur la base de ce document qui lui confère la réhabilitation et l’extension de la voie ferroviaire Cotonou-Niamey, Pic International, filiale du Groupe Petrolin, a réalisé sur fonds propres, les études techniques et financières en vue de cerner les réalités techniques et environnementales de la réalisation du projet. Le Groupe n’attendait donc que la signature de la convention de mise en concession de l’Organisation commune de chemin de fer Bénin-Niger (Ocbn). Ce qui était toujours attendu, de la part des deux Etats, jusqu’au 7 novembre où les nouvelles donnes ont commencé à chambouler les choses. Après le 7 novembre, des bisbilles ont commencé entres les deux camps : Petrolin et Bolloré. Ils ont alors mené des négociations pour clarifier et repréciser le rôle de chaque partie dans la conduite du projet. Les négociations se sont soldées par un accord de confidentialité signé le 13 janvier à Paris. Entre autre, cet accord oblige, apprend-on, le  Groupe Bolloré  à reconnaître le droit exclusif du Groupe Petrolin sur  tout le projet Epine Dorsale et de s’engager à ne pas initier un projet similaire sur une période déterminée. Et voilà qui est clair.

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