Bénin : un gouvernement de ‘’ministricules’’ interchangeables pour des objectifs ambigus

C’est toujours un exercice fastidieux et pénible pour les commentateurs que de se livrer au décryptage des gouvernements successifs de Boni Yayi. Fastidieux, parce que la composition de ses différentes équipes gouvernementales n’obéit guère à la logique qui prévaut sous d’autres cieux, à savoir «the right man in the right place».

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Pénible, parce que tous les remaniements ministériels de l’ère Yayi mettent toutes les rédactions de presse sur la braise des jours durant, pour retrouver des images et les Cv des  heureux élus. Alors qu’à l’ère des nouvelles technologies de la communication, aucune personnalité d’envergure nationale ne devrait être inconnue des moteurs de  recherche comme Google ni des réseaux sociaux comme facebook et twitter. Or, il se fait que les ministres de Yayi sont non seulement parfaitement inconnus dans le landerneau socio-économico-politique, mais complètement absents de la toile mondiale. Ailleurs en effet, la personne responsable de la formation d’un gouvernement, en bon homme d’état s’entoure toujours de ce qu’il a de meilleur dans sa formation politique et même ailleurs pour une meilleure gestion de la chose publique. Car la fonction ministérielle n’est pas une sinécure qu’on confie au premier venu, encore moins parvenu. N’est pas ministre qui veut mais qui peut. Sous ces cieux-là, on ne devient pas ministre par hasard. Le ministre est toujours celui-là qui a été formé et s’est formé lui-même dans son domaine de compétence, dans le parti dans lequel il milite depuis des années. Le grand public le connaît, la presse  a souvent parlé de lui et tout le monde s’attend quelque peu à le voir nommé, dès que le poste est vacant. De la sorte, personne ou presque n’est vraiment surpris de  le voir là où on l’a placé. Avec Yayi la fonction ministérielle a perdu de sa dignité et de son prestige, au point où le voisin d’à côté qui n’a jamais rêvé d’être ministre peut le devenir à la faveur d’un remaniement auquel personne ne s’attend.

Bénin – Remaniement ministériel : liste complète des ministres du nouveau Gouvernement de Boni Yayi

Tenez ! Notre journal s’est trompé deux fois de bonne foi : la première fois en omettant le nom du Prof Géraud Amoussouga qui n’était pas dans le premier gouvernement formé après le fameux K.O qui nous a servi à faire le copier-coller de l’album photo. Le même jour, nous avions interverti le nom de deux ministres : Mme la ministre Naomi Azaria et M. le ministre Affo. Parce que Mme Azaria  en  un an en est à son troisième poste. Son nomadisme ministériel a commencé par le ministère des Sports. La deuxième fois qu’on s’est trompé c’est d’avoir conservé dans le deuxième album- photo du lendemain du remaniement, la vraie fausse photo du nouveau ministre de la communication Jean Dansou qui porte le même nom qu’un habitant du quartier où se trouve notre journal. Autant d’erreurs qui auraient pu être évitées, si le décret portant nomination des nouveaux ministres était accompagné de leur cv et de leurs photos que les services compétents de la Présidence de la République auraient pu mettre à  la disposition des médias. L’information officielle,  ce n’est pas seulement les compte-rendus d’audiences présidentielles dans les boîtes électroniques de journaux mais la mise à dispositions de tous les éléments utiles à l’information des populations. C’est surtout de faire dire par un porte-parole,  inexistant dans l’actuel gouvernement comme dans le précédent, les objectifs visés par le chef de l’Etat lors d’un remaniement, à l’instar  de ce qui se fait ailleurs.

 Cependant, l’essentiel est ailleurs, c’est-à dire, dans la pertinence même des remaniements  et dans la qualité des hommes choisis pour occuper les postes ministériels. En trois ans de  son deuxième et dernier mandat, le Président en est à son troisième grand remaniement, exception faite des nombreux, réaménagements techniques dont celui qui a vu l’entrée au gouvernement du professeur Géraud Amoussouga. Les attributions  de ce dernier auraient pu revenir au ministère en charge de l’évaluation des politiques publiques. On n’a jamais compris pourquoi le professeur agrégé d’économie et de sciences de la gestion est entré au gouvernement à ce moment-précis. Car, à ce jour, il n’a jamais formé de cabinet, malgré ses dénégations postérieures à la publication de notre article sur le sujet. Et pis, son ministère n’a pas de locaux propres, puisqu’il  continue de squatter les locaux de la présidence qu’il occupait avec ses collaborateurs, du temps où il n’était qu’un simple conseiller. Le professeur Amoussouga n’est pas le seul du précédent gouvernement à n’avoir pas formé de cabinet. Le cas de la ministre de l’Economie  maritime sortante est la plus pathétique. Cette pauvre dame aurait pu jouir tranquillement  de sa retraite qu’elle venait à peine de commencer et s’épargner l’humiliation de la commande d’une messe d’actions de grâces à la veille de sa sortie du gouvernement dont elle n’était visiblement pas informée. Tout se passe comme si le président dont on dit qu’il forme les gouvernements tout seul  depuis un moment, s’était rendu compte de ses erreurs de casting et avait décidé de laisser les choses en l’état, en attendant un autre remaniement. Un an de présence dans un gouvernement à se tourner le pouce, est un énorme gâchis!

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Nous en avons suffisamment dit pour qu’on sache que tout décryptage des remaniements ministériels de l’ère Yayi ne saurait se faire à l’aune de la logique d’un homme d’état ayant le sens de l’histoire mais celle d’un politicien préoccupé par l’unique souci de gagner des élections et de prendre les ténors de la classe politique ou de ce qui en tient lieu, par la ruse, les calculs mesquins et les marchandages politiques. Ce troisième gouvernement de Boni Yayi en trois ans de gestion approximative de la chose publique n’apportera rien aux  souffrances des populations  confrontées à la morosité économique liée à  la mal gouvernance …Trois exemples suffiront largement pour illustrer nos propos. D’abord, le jeu de chaises musicales entre trois des quatre seules femmes du gouvernement cachent mal les erreurs de casting, d’autant qu’on ne sait comment justifier pourquoi l’ancien administrateur du trésor, Françoise Assogba quitte le ministère de la micro finance pour le commerce, après seulement un an, au profit de dame Sranon, ancienne ministre de la Famille,  poste actuellement dévolu à Naomi Azaria. Ensuite, quelle est la logique derrière l’ascension fulgurante de Komi koutché, 38 ans, du ministère de la communication à celui de souveraineté qu’est le ministère de l’Economie et des Finances, avec à la clé, le bonus du portefeuille de la dénationalisation naguère dévolu au ministère  squelettique de l’évaluation des politiques publiques dont le titulaire s’occupait de ce volet depuis le temps de l’ex Premier Ministre Koupaki ?

Last but not the least : ailleurs, il ne viendra à l’idée d’aucun formateur de gouvernement de nommer, comme le président Yayi vient de le faire, à un poste aussi stratégique que celui de l’Intérieur et de la sécurité publique, un conseiller municipal quasi inconnu d’une petite commune perdue d’un département dont le seul profil est celui de pasteur évangélique. Parce que la question de la sécurité publique est une question trop sérieuse pour être confiée à quelqu’un qui n’y est pas préparé et qui n’en sait pas grand-chose et qui ne sera préoccupé que par les questions de positionnement politique pour déboulonner un baron local.

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