Mirage de Cotonou

Dormant à la belle étoile ou s’entassant dans des débris comme abris de fortune, à la merci des intempéries, se déshumanisant avec des conditions de vie extrêmement pénibles, obligés de bafouer  leurs propres dignités, s’enfonçant dans la misère et parfois hantés par des idées noires…certains, victimes du mirage de Cotonou, ont bien intérêt à s’armer de courage pour reprendre le chemin du retour au village où ils pourront avoir le minimum afin de reprendre du poil de la bête et se redonner goût à la vie.

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C’est ce que nous chante, l’homme-orchestre Sagbohan Danialou dans «Retour au village», un morceau d’une vérité limpide et d’actualité au Bénin.

La vérité

En vérité, en vérité, chante Sagbohan Danialou «Il est une chose que nous devons savoir. Si la faim est ôtée de la misère, celle-ci s’estompera». Il s’agit d’un dicton populaire gùn « Xovè tonlon yamin, ya na gbo» que reprend l’artiste pour indiquer la porte de sortie à beaucoup de ses  compatriotes qui croupissent sous le poids de la pauvreté extrême à Cotonou, la capitale économique du Bénin. «Le paysan ne se plaint jamais de faim. Quand il y a de la semence sur terre, la faim disparaît» explique, le ton sérieux et sans ambiguïté, le chanteur qui défend à tous, toute tentation de railler le paysan. «Que personne n’embête le paysan. Il ne faut jamais blaguer avec la terre» dit-il, martelant «contrôle». Loin d’être un chant banal, ce morceau est un message qui vaut plus qu’un discours démagogique ou un lyrisme fataliste du genre invitant à s’en murer peinard pour implorer Dieu ou Allah qui n’est pas obligé. Sagbohan Danialou s’adresse précisément aux nombreux Béninois qui mangent de la vache enragée ou la charogne  à Cotonou après avoir délaissé leur village respectif la tête pleine d’illusion. «Mon ami, tu as quitté ton village pour rejoindre la grande ville. En ville tu as connu la conjoncture, la crise économique, la compression, abattement… Mon ami, si tu ne peux supporter, tu fais vite, retour au village» lance le très populaire artiste béninois avec qui on s’accorde volontiers puisqu’au village, «se loger», «se nourrir» et «se vêtir», trois des cinq besoins fondamentaux de l’homme sont tout au moins satisfaits.

Erreurs

Dans  ce morceau, Sagbohan Danialou relève des erreurs qu’ont commises nombre de personnes  se retrouvant dans la galère à Cotonou et qui honteuses et confuses n’arrivent plus à prendre le courage du retour au village. La première, c’est la mondanité excessive. L’artiste raconte l’anecdote de «Zanou», un jeune homme qui parvenu à décrocher un emploi après des études financées par  des parents restés au village, s’est livré à une mondanité périlleuse et a fini dans la galère. Illustratif de la réalité à Cotonou aujourd’hui. Une autre erreur à ne pas commettre c’est celle de «Codjo» que  raconte pédagogiquement l’artiste. Codjo, jeune villageois aussi, a liquidé la parcelle héritée de son géniteur pour s’offrir un permis de conduire avec lequel il débarque à Cotonou dans l’espoir de devenir «chauffeur-citadin». Mais hélas ! Il sera désillusionné à Cotonou. Des Zanou et des Codjo, Cotonou en est bondée.

Retour au village

L’artiste et son orchestre ne veulent pas voir des compatriotes s’abandonner à une condition  de vie qui va de mal en pire à Cotonou. «Va retrouver les tiens au village, use de la houe, la terre ne ment jamais» conseillent-ils.  Et assure Sagbohan, « »retour au village », ce n’est pas une faiblesse. Quand ça  ne va pas, il faut retourner   à la source».  En dehors du labour ou l’agriculture Sagbohan  propose  la pisciculture à laquelle s’ajoutent l’élevage  et autres  activités qui pourront aider à reprendre le contrôle de sa vie. Voilà qui est dit, à bon entendeur, salut !

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