Bénin : comment le président Talon peut ralentir la fuite de compétence créée par Yayi Boni

En moins de deux mois de mandat présidentiel, la polémique médiatique qui aura le plus marqué les esprits est certainement celle du « désert de compétence au Bénin » ; terme que le Président béninois Patrice Talon avait employé lors de sa visite à l’Elysée.

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L’intelligentsia béninoise a donné libre cours à l’interprétation de cette pique lancée dans une communication voulue auto-caustique. Ce que la plupart ont considéré comme une ‘’gaffe’’ communicationnelle a pourtant le mérite d’avoir remis au goût du jour l’alerte qu’IMANI Francophone avait émise à plusieurs reprises en ce qui concerne la pertinence de la politique de retraite que le Président Yayi Boni avait transformé en jeu de « ping-pong » avec l’assemblée nationale et les syndicats pendant les derniers mois de son deuxième mandat. Nous redonnons dans ce commentaire les faits qui devraient motiver le gouvernement à ajuster la politique de retraite dans le secteur public au Bénin.

La compétence, surtout dans le secteur public, est souvent corrélée avec la maitrise des pratiques et rouages institutionnels qui facilitent la performance institutionnelle. Le mécanisme de fonctionnement de l’appareil public s’adosse en conséquence à cette logique de mémoire institutionnelle bâtie sur un capital humain formé sur la durée afin d’en faciliter le bon fonctionnement.

Lire Bénin : Des compétences ignorées ou qui s’ignorent

Au Bénin, aucun recrutement n’a été effectué dans la fonction publique entre 1986 et 1996 en raison de la crise des années 90 et du changement du mode de recrutement au niveau de l’administration publique. En conséquence, en raison du contexte des recrutements dans la fonction publique au Bénin, et sur la base des textes en vigueur l’administration béninoise ne comptera plus à l’horizon 2016 de cadres de plus de 20 ans d’expérience.

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Le Bénin est par ailleurs le seul pays de la sous-région qui envoit ses agents à la retraite avant 60 ans. Plutôt que de précipiter des cadres dont le savoir-faire de certains a permit le fonctionnement des institutions béninoises, il s’agit d’apprécier le phénomène de la transition démographique. Les cadres de plus de 55 ans sont aujourd’hui en pleine possession de leurs facultés intellectuelles et physiques. Leur précipitation à la retraite aura comme conséquence que d’alourdir inutilement la masse salariale sur le long terme.

A ce jour, aucune étude qualitative n’a été conduite pour évaluer les conséquences liées à la myopie de la politique de retraite sur l’administration béninoise. Cependant, il y a fort à parier que bon nombre de cadres compétents béninois à la retraite se soient engagés dans des activités créatrices de valeur en dehors des frontières du pays.

Il importe à l’état actuel des choses de moderniser l’outil législatif vieux de 30 ans déjà, de conserver le capital humain pertinent à moyen terme tout en systématisant les mécanismes institutionnels de transfert de compétence dans l’administration publique. Le Président Yayi Boni avait comprit l’importance de ces mesures mais avait préféré en son temps, laisser le chaos perdurer. Le Président Talon a une formidable opportunité de permettre au Bénin de rejoindre le rang des pays africains comme la Côte d’Ivoire ou le Rwanda qui ont depuis longtemps compris le bon sens de ces mesures.

Alan Akakpo
Imani Francophone

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