Au cœur de la polémique depuis quelques jours, l’affaire de l’attribution du marché de sécurisation des aéroports du Bénin à une société du nom de Morpho Dys, va sans doute déteindre sur l’image du Bénin. Notamment dans les milieux d’affaires internationaux.
Affaire Morpho Dys. Du nom de cette entreprise à laquelle le gouvernement béninois a décidé d’attribuer le marché de sécurisation des aéroports du pays au détriment de la société Securiport. Dans cette affaire, plusieurs raisons justifient la polémique et la consternation que l’on constate dans l’opinion. Ce sont entre autres, le degré d’expertise des deux sociétés, les limites du principal argument du gouvernement ainsi que sa démarche.
Expertise
Primo, notons que ce marché avait déjà été attribué à la société Securiport, basée à Washington Dc, aux Etats-Unis, par le gouvernement Yayi. Après trois ans d’étude, d’analyse et de négociation, l’Etat béninois et la multinationale ont conclu un accord le 18 novembre 2015. Il s’agit d’un «contrat de fourniture d’un système de sécurité de l’aviation civile et de l’immigration au gouvernement de la république du Bénin selon des modalités de construction, maintien et transfert ». La société Securiport est un leader mondial du domaine. Présente dans plusieurs pays en Amérique, en Asie, en Europe et en Afrique, Securiport est un « fournisseur exclusif mondial d’applications de gestion de l’immigration dotées d’une technologie unique brevetée de prise d’empreintes digitales au moyen de l’imagerie par ultrasons ». Par contre, la société Morpho Dys, formalisée ce mercredi 23 novembre selon nos sources, n’a aucune expérience dans ce domaine très sensible.
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La vérité sur les données personnelles
Secundo, le principal argument donné par le gouvernement pour lui arracher cette délégation de service public est lié à la manipulation des données à caractère personnel. Avancé dans le communiqué du conseil des ministres du 11 mai dernier, cet argument a été répété par le ministre des Transports dans sa sortie médiatique. « Securiport gère les données à caractère personnel. La police n’est pas associée à cette gestion. Ce qui est contraire à la loi. L’enregistrement et le traitement des données à caractère personnel est du domaine régalien de l’Etat », avait déclaré le ministre Hêhomey sur Golfe Tv ce mardi 22 novembre. Cette justification laisse à désirer au regard des termes même du contrat entre Securiport et l’Etat béninois. « Toutes les données générées (…) sont la propriété du gouvernement. (…) Ni Sécuriport, ni aucun de ses employés ne fera de copies de ces données, ni ne divulguera ou n’utilisera une quelconque information acquise pendant l’exécution de cet accord, sous peine de poursuites judiciaires », stipule le contrat dans l’une de ses dispositions.
Rassurez les milieux d’affaires
Tertio l’on apprend que la démarche du gouvernement n’est pas conforme à l’accord liant l’Etat béninois à la société Securiport. Selon nos recoupements, jusque-là, les responsables de Securiport n’ont pas encore été officiellement saisis par le gouvernement. La partie béninoise n’a donc pas pris soin de dénoncer le contrat avant de le résilier de façon unilatérale. Ceci met l’Etat béninois en position défavorable en cas de procès ; avec les lourdes réparations financières qui pourraient en découler. Pis, toute cette affaire scandaleuse n’est pas de nature à rassurer les investisseurs étrangers concernant la sécurité des investissements au Bénin. Sous l’ancien régime, le président Patrice Talon avait été victime d’une situation quasi-identique avec le dossier Pvi. L’on sait tout ce que cela aurait pu coûter au Bénin s’il n’avait pas renoncé aux 129 milliards de Fcfa que l’Etat devrait lui verser au titre de dommages et intérêts.
Homme d’affaires milliardaires, le chef de l’Etat, mise beaucoup sur le secteur privé pour le financement du programme d’action de son gouvernement. A cet effet, il envisage mettre en œuvre ses grands chantiers dans le cadre du partenariat public-privé. Pour y arriver avec succès, il lui faudra d’abord, et avant toute chose, rassurer les milieux d’affaires, nationaux et internationaux. Le traitement infligé à Securiport est totalement contraire à cette exigence
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