Lors de son discours d’investiture le 6 avril 2016, Patrice Talon s’est engagé à faire de la lutte contre la corruption, le combat de tous les instants. Mais à la pratique, l’opinion s’étonne de constater que les dossiers sur lesquels les populations attendaient le chef de l’Etat pour entamer cette lutte, ont été mis en veilleuse. Pire, certaines personnes citées dans des dossiers à scandale ont trouvé la parade de se proclamer soutiens indéfectibles du régime.
Au final, ceux qui sont poursuivis en justice dans le cadre de cette lutte, ont soit des dossiers à l’évidence difficiles à prouver soit connus comme des adversaires politiques du pouvoir. C’est tout cela qui fait planer le doute sur la sincérité du gouvernement à lutter contre la corruption.
L’opinion émet des doutes sur la sincérité du gouvernement à lutter contre la corruption. Dans la compréhension de l’opinion, la lutte contre la corruption devrait commencer par les dossiers à scandale dont le nouveau régime a hérité. Le commun des citoyens voyait d’abord le dossier Icc services, du nom de l’arnaque rocambolesque par laquelle un groupe de vendeurs d’illusions, qui ont bénéficié des soutiens en haut lieu, ont pu collecter l’épargne des citoyens (plus de 150 milliards selon certaines estimations), ont laissé dans le regret et le dénuement tous ceux qui avaient cru à ce mirage. L’opinion entendait aussi voir rapidement élucidé dans le cadre des procès, les affaires Censad, des machines agricoles, Maria Gléta, ou encore Ppea2. Mais à la surprise de tous, certaines de ces affaires ont été enrôlées au tribunal avec une relative opacité. A la clé, des non-lieux, pour le cas de l’affaires Ppea2 et des suites opaques pour ce qui est du dossier Icc services. Toutes choses qui ont amené l’opinion à considérer la lutte contre la corruption sous le nouveau départ comme étant une diversion voire un prétexte pour régler des comptes politiques.
Poursuites sélectives
Puisque jusqu’ici, les personnalités poursuivies en justice, sont tous sans exception, des adversaires politiques du régime. Que ce soit Laurent Mètongnon dont le procès est en cours ou encore les députés actuellement sur la liste accompagnés de quelques anciens ministres, il est difficile de séparer les actions judiciaires des motivations politiques. Le cas Komi Koutché est évocateur si l’on s’en tient au motif avancé qui fait l’objet de sa poursuite. Pendant ce temps, des situations qui peuvent donner lieu à des poursuites judiciaires se passent sans que cela n’émeuve le gouvernement. Pour illustration, un concours organisé en 2017 par un cabinet pour le recrutement des agents au nom de la Cnss. L’Autorité nationale de lutte contre la corruption, Anlc, avait fait une sortie pour informer la presse et partant, l’opinion des irrégularités observées dans l’organisation de ce concours. Au final, l’Anlc a recommandé qu’en dehors du remboursement des 28 millions engagés par ce cabinet et le directeur général et son adjoint, que des poursuites judiciaires soient aussi engagées à leur encontre.
Des raisons de douter
L’Anlc a aussi recommandé au gouvernement de prendre des sanctions administratives à l’encontre du directeur général et de son adjoint. Jusqu’à ce jour, silence assourdissant sur le dossier. Le président de l’Anlc relancé par les journalistes plusieurs mois après sur le dossier, a fait observer qu’il a fait ses recommandations et que c’était au gouvernement de faire la suite. Dans le même sillage, un maire d’un parti qui soutient le régime, a été entendu pour une affaire de détournement de centaines de millions et a été autorisé à payer la caution pour recouvrer la liberté, pendant qu’un autre maire, accusé par ses conseillers de détournement, n’a pas du tout été entendu ni inquiété. La raison on la connaît. C’est donc une lutte contre la corruption à plusieurs visages qui ne rassure pas. On ne demande pas au président Patrice Talon d’aller jusqu’à enfermer son beau-frère comme l’avait fait en son temps, le président OlésegunObasanjo dans le cadre de la lutte contre la corruption au Nigéria, mais c’est à tout le moins de donner un coup de pied dans la fourmilière celle placée dans la cour principale du palais
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