Quand on est capable à 23 ans de comploter avec des grands financiers pour prendre le contrôle de l’entreprise familiale au détriment de son père et de ses oncles, ça a quelque de génial. Mais dans l’histoire de Vincent Bolloré racontée par Fiorina Capozzi, à travers son livre intitulée « Vincent Bolloré, le nouveau roi des médias européens », un trait de caractère revient souvent, c’est la très grande ambition de l’homme d’affaires à la limite du manque de scrupules.
Vincent Bolloré qui aime évoquer son admiration pour la technique du boa s’enroulant autour de ses proies, les étouffant avant de porter le coup fatal, est réputé très implacable en affaires. Comme lorsqu’il prend le contrôle de la société de transport maritime Delmas-Vieljeux dans les années 80 avec l’appui des milieux bancaires.
« Il passe à l’attaque avec l’appui du Crédit Lyonnais. Il contacte l’un après l’autre les 90 actionnaires de la famille Delmas et Vieljeux susceptibles de vendre leurs actions, se proposant de les acheter. Il regroupe ainsi un bloc de titres consistant de la société maritime et à la fin il informe Tristan Delmas qu’il est désormais devenu un important actionnaire de son empire. Le cercle se referme : le vieil armateur se retrouve le dos au mur. Il ne lui reste plus qu’à vendre cher sa peau…. », peut-on lire dans des bonnes feuilles du livre de Fiorina Capozzi.
Habitué au soutien des milieux politiques et des renseignements
Quelques années après, la société maritime Delmas-Vieljeux est devenue un ogre qui règne sans partage sur les opérations portuaires de plusieurs pays en Afrique subsaharienne. La société maritime est devenue entre-temps, Bolloré Africa Logistics et le groupe compte un réseau de 250 filiales, 24 000 collaborateurs dans près de 55 pays.
Le recours au soutien des décideurs politiques compte pour beaucoup dans la stratégie africaine du groupe Bolloré. « Le patron breton a pour lui de bien connaitre l’Afrique, d’avoir ses entrées auprès de tout le personnel politique africain et d’avoir les réseaux qu’il convient. Et il ne manque pas de les ménager », explique le site d’information Médiapart. «Vincent Bolloré aime s’entourer de grands flics, parce que ces derniers avec les postes qu’ils occupent connaissent certainement du monde sur le continent africain », a commenté, pour sa part, le journaliste Nicolas Vescovacci, co-auteur du livre « Vincent Tout puissant » que le milliardaire breton a, dit-on, tenté vainement de censurer.
Preuve de la contribution des politiques des grands flics au succès du groupe en Afrique, le recrutement en 1999 de Michel Roussin, ancien directeur de cabinet du patron des renseignements français, ancien directeur de cabinet de Jacques Chirac et ministre de la coopération dans le gouvernement Balladur.
Une longue bataille juridique à l’issue incertaine
Les contrats avec les ports de Conakry et de Lomé, objet du placement en garde à vue à Nanterre, banlieue parisienne, de Vincent Bolloré et ses collaborateurs ont été des affaires plus retentissantes pour des raisons diverses. On peut entre autres raisons citer le manque de finesse des autorités guinéennes qui ont envoyé les forces de l’ordre fermer les bureaux de la société Nécotrans, déjà concessionnaire pour 25 ans, avant de réattribuer le contrat à Bolloré. Une telle manière de procéder a forcément attiré l’attention des enquêteurs français sur cette opération. Dans le cas du Togo, la combativité du concurrent lésé dans l’affaire a grandement contribué à braquer les projecteurs sur l’arrivée de Bolloré au port de Lomé.
Mais que peuvent bien espérer les populations togolaises et guinéennes de cette affaire ne serait-ce qu’en terme de moralisation de la vie publique ? Du scandale des enfants mineurs des plantations de palmiers de la SOCOPLAM et le déraillement de train de la CAMRAIL (79 morts et 500 blessés) au Cameroun, à la cession gré à gré du port d’Abidjan en 2005 etc, les sociétés du groupe Bolloré ont été souvent au cœurs des scandales, mais ont rarement été condamnées. Avec une fortune, classée parmi les plus grosses de France, Vincent Bolloré a de quoi retarder l’action judiciaire en cours. L’amélioration du climat des affaires dans les pays concernés n’est donc pas pour demain. Cette quête est d’autant plus difficile que les états concernés eux même, à l’image de la Guinée s’emploient déjà à dire que Vincent Bolloré est blanc comme neige.
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