Réconforté par les recommandations du « dialogue national » qu’il a initié, Patrice Talon n’entend plus perdre de temps dans leur mise en œuvre. Ce jour 17 octobre, il a fait convoquer le bureau de l’Assemblée nationale et les présidents des commissions et groupes parlementaires pour demander « la prise en compte diligente » des recommandations de ce dialogue. Cette attitude inédite viole le principe de la séparation des pouvoirs et de l’indépendance de l’Assemblée nationale.
Patrice Talon poursuit son plan de vassalisation de l’Assemblée nationale. Alors qu’on attendait plus de postures et d’actes qui renforcent l’indépendance des institutions surtout de contre-pouvoir, il fait convoquer manu militari (le président Louis Vlavonou est descendu précipitamment de Belgrade en Serbie pour répondre présent à la « convocation » de son « chef ») le bureau de l’Assemblée et les présidents des commissions et groupes parlementaires à la Marina pour leur intimer l’ordre de relire les lois électorales votées il y a un an.
Cette attitude du chef de l’Etat ne fait que renforcer les soupçons de dépendance qui pesaient sur cette législature installée à l’issue des élections législatives exclusives et violentes boycottées par plus de 80% d’électeurs. Saka Fikara, ancien député n’a pu s’empêcher de désapprouver cette attitude. « La constitution est carrément mise de côté. Patrice Talon se comporte comme le président de toutes les institutions du Bénin ».
L’esprit et la lettre de la constitution du 11 décembre 1990 fait pourtant de l’Assemblée nationale une institution de contre pouvoir. Et d’ailleurs, il ne peut en être autrement puisque pour que l’alinéa 2 de l’article 79 stipule clairement que l’Assemblée nationale exerce le pouvoir législatif et contrôle l’action du gouvernement. On ne peut donc imaginer qu’une institution qui contrôle l’action du gouvernement en arrive à être son prolongement. Car, le chef de l’État ne s’est pas contenté de convoquer le bureau de l’Assemblée nationale mais la conférence des présidents qui est, dans le fonctionnement et l’esprit d’indépendance de cette institution, un organe phare.
« La conférence des présidents est un organe d’une institution constitutionnelle de contre pouvoir et ne saurait obéir au doigt et à l’œil du président de la république », déplore Saka Fikara, ancien questeur de l’Assemblée nationale. Les rapports entre l’exécutif et le législatif sont clairement définis et la constitution en donne les précisions. Pour preuve, le chef de l’Etat n’est autorisé qu’une seule fois à venir à l’Assemblée nationale une seule fois par an pour présenter un discours sur l’état de la nation. Les autres relations se déroulent par les courriers, les demandes de session et les projets de loi qu’il envoie à l’Assemblée pour amendement et vote.
Pour se montrer plus démocrate dans un pays de démocratie normale, le chef de l’Etat aurait simplement convoqué sa majorité en consultation et après introduire les propositions d’amendements des lois électorales au lieu de convoquer toute l’institution à une conservation ou une réunion dont l’intérêt et l’utilité, en dehors de sa volonté de l’avilir, reste à désirer. Cette attitude à avoir l’Assemblée nationale à sa solde est récurrente chez Patrice Talon.
Lors du lancement du Pag le 16 décembre 2016 au Palais de la Marina, il avait demandé au bureau de la 7è législature dirigée par Me Adrien Houngbédji de « voter les lois les yeux fermés ». L’Assemblée nationale a voté après cette déclaration toutes les lois qui ont mis l’édifice démocratique de notre pays à genou et dont certaines ont conduit à la crise politique que traverse notre pays actuellement.
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