On l’attendait sur le perron de la Marina mais Boni Yayi a choisi de faire faux bond à son successeur. Si cette décision profondément mûrie à Niamey et à Abuja apparaît comme un échec personnel du président Talon, il révèle un tout autre Boni Yayi : un homme capable aussi de ruse politique et décidé visiblement à ne faire ni compromis, ni compromission avec le pouvoir.
Lors de sa dernière interview à Rfi et France24 le jeudi 07novembre dernier, Patrice Talon s’était montré plus tendre et plus conciliant vis-à-vis de son prédécesseur affirmant qu’il peut rentrer tranquillement au bercail sans être inquiété. Quelques heures avant l’arrivée annoncée du président Yayi à Cotonou, Alain Orounla, le ministre de la communication, porte parole du gouvernement s’était, comme à ses habitudes, lancé dans des déclarations approximatives pour dire que Boni Yayi était attendu à la Marina où il devrait être reçu par le président Patrice Talon.
Mais à l’arrivée, Boni Yayi était arrivé plus entouré. Il était flanqué d’une délégation de la CEDEAO conduite par le président de la commission de la CEDEAO Jean-Claude Kassi Brou et l’ancien président du Nigéria Abdulsalami Abubakar. Au lieu de se rendre à la Marina, il se dirige vers la maison du Président Soglo et s’entretient avec lui pendant quelques minutes. Puis, il se dirige vers son Qg de Cadjêhoun où il prend un bain de foule, se rend dans la maison de Prudence Amoussou pour présenter ses condoléances à cette dame abattue lors des affrontements des 1er et 02 mai 2019 à Cadjêhoun.
Des éléments de clarification
Yayi ne se rendra pas à la Marina où la délégation de la CEDEAO aurait reçu de la part du nouveau locataire des lieux un accueil très glacial à en croire certaines sources. A l’analyse, l’itinéraire pris hier par Boni Yayi ainsi que sa décision de boycott de la rencontre avec son successeur apparaissent comme des éléments de clarification de ce qui est sa posture politique actuelle.
Si au lieu de se rendre à la Marina, Yayi choisit de se rendre chez le président Soglo, chef de file de la résistance, c’est un signal fort pour le gouvernement. Le message envoyé à l’opinion nationale qu’international est clair : « Je suis dans l’opposition à votre gouvernance et je m’y sens bien ». Cette posture contraste avec tout ce que les communicants du gouvernement ont voulu distiller dans l’opinion ces jours-ci, annonçant subrepticement qu’il ne viendra que pour aller faire la paix avec Patrice Talon qui a pris une loi d’amnistie pour l’absoudre de toutes poursuites judiciaires.
Même lecture de la visite rendue aux sept orphelins de dame Prudence Amoussou. Dans son interview du 07 novembre, Patrice Talon avait affiché très peu de compassion au cas de cette dame froidement abattu le 02 mai dernier à Cadjêhoun. Troisième image de clarification, on a vu Boni Yayi accueilli à l’aéroport par Noureinou Atchadé, Eugène Azatassaou et consorts. On n’a vu aucun membre de l’aile dite légale des Hounkpè, Yarou, Garba et autres. Là aussi, Yayi a bien choisi son camp. Celui de l’opposition.
Trophée de réconciliation nationale
Le retour au pays de Boni Yayi que Talon voulait utiliser comme un trophée de réconciliation nationale et la dernière preuve de décrispation politique s’est mué en un vrai cauchemar pour lui et son gouvernement. Yayi n’est d’ailleurs pas resté au pays. Il est reparti avec une partie de la délégation au Nigéria à bord de l’avion présidentiel du Nigéria. Un autre signal fort lancé à l’homme fort de Cotonou.
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