Les députés à l’Assemblée nationale du Bénin ont adopté, vendredi 1er novembre 2019, une proposition de loi modificative de la constitution béninoise. La procédure tout comme le fond témoigne d’un amateurisme inexplicable qui fait comparer cette loi fondamentale du Bénin aux statuts d’une association de quartier, voire moins que ça, à en croire Franck Oké. La quarantaine, le juriste béninois a évoqué quelques points caractéristiques sur Soleil Fm.
« On avait l’impression qu’il s’agissait d’une assemblée générale d’une association de développement de quartier ou de village qui étudiait ses statuts et règlement intérieur». C’est en ces termes que le jeune juriste béninois, Franck Oké, apprécie la plénière du jeudi 31 octobre 2019 à l’Assemblée nationale qui a abouti, un peu après 00 heure vendredi, à l’adoption d’une loi modificative de la constitution du 11 décembre 2019 en République du Bénin. Il était l’invité du Boulevard des opinions sur Soleil Fm.
Mépris du règlement intérieur de l’Assemblée
Pour Franck Oké, déjà au niveau de la procédure d’urgence, il y a un mépris du règlement intérieur de la part des députés notamment, les 10 demandeurs de la procédure d’urgence. «Je ne comprends pas comment les députés du point de vue technique, juridique, ont estimé qu’ils s’étaient fondés sur la base de l’article 78 pour enclencher une procédure d’urgence », affirme l’invité.
Il note « une violation, une mauvaise lecture (de cet article) du règlement intérieur de l’Assemblée nationale » par ces députés. Il souligne que cet article est inscrit dans le titre 3 du règlement notamment la section 1 qui traite de la procédure législative ordinaire. Cette disposition n’est pas prévue pour mettre en œuvre une proposition de révision constitutionnelle, la constitution n’étant pas une loi ordinaire.
Au-delà, le juriste semble ne pas comprendre l’urgence qu’il y avait parlant de révision de la constitution. La résolution de la crise sociopolitique avancée était un prétexte, selon lui. Il est à noter que les deux lois crisogènes, le code électoral et la charte des partis politiques dont l’application ont été la source de cette crise électorale n’ont pas été plus urgentes dans cette assemblée nationale que Franck Oké qualifie d’ « insolite », 100% de députés du pouvoir.
Quand la constitution béninoise piaille
Quant aux travaux proprement dits sur le fond, Franck Oké dit avoir noté « une banalisation de la procédure des amendements » de la constitution qui pourtant devrait être « le temple sacré des normes ». « J’ai entendu des gens amender la constitution à tout va », déplore-t-il.
La constitution béninoise, d’après les modifications apportées vendredi dernier, « ressemble à un discours où tout ce qui a été pensé est consigné », remarque l’invité de Soleil Fm. Si le professeur Dandi Gnamou disait que l’autre constitution bavarde, Franck Oké, trouve que celle adoptée par les députés va plus loin. «Ici, elle ne bavarde pas. Elle piaille. Ce n’est pas normal ».
Quel amateurisme au parlement béninois !
Du coup, ces parlementaires y ont mis tout, au point de constitutionnaliser le calendrier électoral jusqu’en 2026. « Le calendrier électoral au Bénin fait partie de la constitution ». Conséquence, en 2026, le 6 avril, au terme de tout le processus des élections générales, une kyrielle de dispositions dans le corpus constitutionnel béninois seront obsolètes, caduques. «Donc d’aucun sens ».
Ce sont, à ses dires, des dispositions qu’on aurait pu appeler mesures transitoires dans une loi transitoire ou ordinaire qui ont été constitutionnalisées par l’Assemblée nationale du jeudi au vendredi derniers. « Je ne sais pas quel amateurisme a pu permettre de constitutionnaliser le calendrier électoral, les dispositions calendaires. Ce n’est pas possible », affirme Franck Oké.
Il évoque aussi, entre autres, cette disposition liée au poste de vice-président. Avec cette disposition, l’intérimaire constitutionnel du chef de l’Etat reconnu au président de l’Assemblée nationale au regard de la constitution du 11 décembre 1990 s’efface. Alors, le juriste se demande sous quel régime juridique organisera-t-on la vacance du pouvoir si éventuellement entre 2019 et 2021 on avait à gérer une vacance de pouvoir au Bénin. Certes, certains avancent que le président du parlement ne perd pas cette prérogative mais on ne sait pas s’il organisera les élections à mi-temps ou s’il assurera l’intérim jusqu’à la fin du mandat.
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