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(Enquête) Les Canaris frigos d’Agbangnizoun : Une solution endogène à la conservation de fruits et nourritures

Connaissez-vous les canaris frigos d’Agbangnizoun ? Depuis des lustres, la poterie qui est un art ancestral dans cette commune, permet de fabriquer des canaris qui ont presque les propriétés d’un frigidaire moderne. Les femmes qui y sont très actives fabriquent ces canaris qui servent à conserver aliments et fruits pendant des jours.   

L’arrondissement de Sahè situé à quelques kilomètres d’Agbangnizoun centre est la région la plus prolifique en matière de fabrication de canaris frigos dans la commune. A Sahè, chaque famille produit pratiquement de canaris avec des spécificités qui varient d’une concession à une autre. Les femmes potières sont en grand nombre et réalisent au quotidien, plusieurs dizaines de canaris frigos convoyés dans les marchés pour leur commercialisation. La particularité de ces canaris, reste la conservation des aliments.

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Deux types de canaris frigos…

Les canaris frigos d’Agbangnizoun sont reconnus pour leur qualité et leur durée de vie. A Sahè, deux types de canaris frigos sont fabriqués. Le canaris moyen avec de petits orifices le long du pourtour encore appelé « adjalala » est utilisé pour la conservation des poissons, des viandes, des fruits et légumes et coûte au bas prix 1200 F Cfa. Le second canaris frigo est celui utilisé dans les grandes familles béninoises, dans lequel est conservée l’eau à boire, naturellement fraîche à la prise d’une gorgée. Il est vendu à 3000 FCfa selon l’épaisseur.

Une demande au-dessus de l’offre…

Conscients de la solidité de ces canaris, plusieurs commerçants viennent de tous les horizons pour s’en procurer. La région Fon est dominante dans l’acquisition de ces jarres, selon dame Félicité, sexagénaire et l’une des plus anciennes dans le métier. « Les véhicules viennent d’Abomey, de Cotonou pour venir chercher les canaris frigos que nous fabriquons ici », a-t-elle fait savoir.L’argent issu de la vente est aussitôt dépensé pour les besoins quotidiens, nous renseigne-t-elle.

Un art difficile…

L’argile, une fois achetée auprès des bras valides à 1000 francs Cfa par lot de 3 sacs attachés, la potière procède à son tamis pour y enlever des grains de sable. A Loukpè, un des six villages de l’arrondissement de Sahè, la poterie est l’activité principale des habitants. « La réalisation d’un canaris frigo nécessite 5 jours pour la première finition et 8 à 10 jours pour brûler et sécher afin que cela devienne utilisable », nous a confié Solange Agbohessi, potière et veuve depuis 19 ans. Ici, les bois sont mis autour du canari à l’intérieur duquel sont mises des herbes qui subissent les brûlures du feu. Ce n’est qu’après que le feu ait dégagé une odeur connue que le canari frigo devienne utilisable et prêt pour la commercialisation.

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Risques

A l’instar de plusieurs autres adeptes de la poterie à Agbangnizoun, Solange Agbohessi est née dans cet art. Elle l’a hérité de ses parents défunts mais aussi de son mari qui a rendu l’âme dans l’exercice de sa profession. Un travail pénible mais passionnel dit-elle, qui lui permet de s’occuper de ses enfants et de subvenir à leurs besoins. De nos investigations, il ressort que le lendemain du jour de marché d’Agbangnizoun (tous les 5 jours), il est formellement interdit d’aller extraire l’argile sur le site situé à environ deux kilomètres du village de Loukpè. En effet, la divinité « Dan » y est installée et protège les acteurs de l’écosystème. Des cérémonies et sacrifices sont généralement faits sur le site pour remercier la divinité pour avoir congédié les tragédies au cours d’une période donnée. 

Les difficultés existentielles

L’extraction d’argile est la première difficulté que rencontrent les femmes de Sahè. La matière première est retrouvée dans le sous-sol. Un travail aux multiples risques auquel s’adonnent les hommes, bras valides de la localité. Entre autres difficultés, l’insuffisance ou l’inexistence de point d’eau, le problème d’accès aux carrières d’argile dû à la non praticabilité des voies d’accès, le manque de four pour le séchage des pots fabriqués mais aussi le manque de moulin pour moudre l’argile en poudre. L’activité de poterie à Agbangnizoun n’est pas sans conséquence sur la santé des artisans. Les maladies n’en manquent pas, aux dires de Lucien Kandjè, un autre spécialiste des canaris frigos situé dans l’arrondissement de Lissazounmè. Propos confirmé par dame Solange qui a confié avoir toujours ressenti des maux de reins. Les moyens pour se faire soigner sont inexistants du coup, ils se réfèrent aux tisanes et autres produits médicamenteux pour soulager leur douleur. Par ailleurs, les accidents de circonstance surviennent au quotidien, rappelle Virginie Azohou, potière à Sahè Abigo qui traine encore les séquelles sur son corps. 

Que gagne  la Mairie 

L’activité de poterie dans la commune d’Agbangnizoun ne fait pas engranger pour le moment de ressources considérables dans les caisses de la commune. Les difficultés d’accès de voie ne permettent pas de faire des impositions, a confié une source proche de la Mairie. Cependant, la mairie ne perçoit pas encore de taxe au niveau des carrières mais délivre des tickets sur les chargements de véhicules contenant des canaris. « Cette taxe délivrée aux transporteurs de canaris est de 1000 F Cfa et ne pèse pratiquement pas dans la balance », a souligné Pascal Dossa, secrétaire général de la mairie d’Agbangnizoun.

La commercialisation des canaris frigos améliore le revenu des femmes potières d’Agbangnizoun et contribue à l’amélioration de l’économie des populations qui les utilisent. Ainsi, les populations font face à de moindres dépenses pour l’acquisition des canaris frigos que pour l’achat d’un réfrigérateur qui consomme assez d’énergie électrique alors que l’utilisation des canaris frigos n’engendre pas d’autres frais.L’activité de poterie est un métier des femmes que des hommes aussi bien dans la fabrication des articles que dans leur commercialisation. Au plan environnemental, les canaris frigos permettent de réduire l’émission de gaz à effet de serre, le gaspillage des aliments. 

Jacob ANANI, Partenariat OSIWA-LNT

5 réponses

  1. Avatar de Chika
    Chika

    Normalement c’ des choses qu’il faut encourager en investissant dedans, et non dans les histoires de miss du Bénin, dit moi, qui et la plus belle et d’autres choses inutiles qui n’ajoute un grain au développement du pays

  2. Avatar de FOULERATOU
    FOULERATOU

    Des efforts importants et un savoir faire à faire émerger en finançant ces dames. Les organiser en coopératives serait magnifique! C’est en plus écolo

  3. Avatar de rodrigue
    rodrigue

    Il faut encourager ces dames.

  4. Avatar de Vigan
    Vigan

    Bravo les béninoises

    1. Avatar de VERONEZE SILUE
      VERONEZE SILUE

      vive vive

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