Le secteur agroalimentaire maghrébin traverse une période charnière marquée par des défis structurels majeurs. La région, historiquement considérée comme le grenier de l’Afrique du Nord, peine à maintenir sa productivité face aux changements climatiques et aux pressions démographiques croissantes. L’agriculture, pilier traditionnel des économies maghrébines, nécessite une modernisation urgente de ses infrastructures et de ses méthodes de production, particulièrement en Algérie où les pertes post-récoltes atteignent des niveaux alarmants.
Le paradoxe d’une transformation industrielle insuffisante
L’industrie agroalimentaire algérienne présente un paradoxe saisissant : alors qu’elle pourrait transformer jusqu’à 80% de sa production agricole, seuls 10 à 15% des produits sont effectivement valorisés. Cette sous-exploitation entraîne des pertes considérables, oscillant entre 30 et 40% des récoltes. Le contraste avec les performances européennes est frappant : la France génère 198 milliards d’euros de revenus dans ce secteur, l’Allemagne 185 milliards, tandis que l’Espagne exporte pour 47,6 milliards d’euros de produits transformés. Cette disparité souligne l’urgence d’une modernisation du secteur algérien.
Des infrastructures défaillantes qui freinent le développement
Le manque d’infrastructures adaptées constitue l’obstacle majeur au développement du secteur. Avec des capacités de stockage limitées à 3,4 millions de tonnes, l’Algérie peine à préserver sa production agricole. La construction prévue de 350 centres de proximité vise à augmenter cette capacité à 9 millions de tonnes, mais ces efforts restent insuffisants face à l’ampleur des besoins. La sous-mécanisation des exploitations et l’inadéquation des pratiques culturales aggravent la situation, créant un cercle vicieux de pertes et d’inefficacité.
Les initiatives de modernisation face aux défis structurels
Malgré ces obstacles, des signes encourageants émergent. Le programme Innov-Agro et le Challenge AgriTech 2024 témoignent d’une volonté de modernisation par l’innovation technologique. L’implantation locale forte des entreprises (84%) et l’intérêt croissant pour l’exportation (68% des acteurs) révèlent un potentiel de développement significatif. Cependant, le déséquilibre commercial persiste avec un déficit de 8,9 milliards de dollars, résultat d’importations massives (9,4 milliards) face à des exportations limitées (0,5 milliard). La transformation du secteur nécessite une approche globale, combinant modernisation des infrastructures, formation des agriculteurs et optimisation des chaînes de valeur. Le développement de nouveaux pôles agroalimentaires dans les régions du Sud pourrait offrir une opportunité de redynamiser le secteur, à condition d’être accompagné d’investissements substantiels dans les technologies et les compétences.
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