Alors que les paiements électroniques gagnent du terrain dans de nombreuses régions du monde, notamment en Europe où la majorité des transactions courantes se font désormais sans espèces, le Maghreb reste marqué par une forte dépendance au cash. Dans des pays comme la Suède ou les Pays-Bas, l’argent liquide a presque disparu des commerces, remplacé par des applications mobiles et des cartes sans contact. Cette transformation, rendue possible par une infrastructure numérique dense et une forte bancarisation, contraste avec la situation observée en Algérie, où le billet de banque demeure la norme pour les échanges quotidiens.
Une modernisation rendue urgente par les réalités du terrain
Face à cette réalité, les autorités algériennes souhaitent impulser un changement en profondeur. L’économie nationale reste largement dominée par les transactions en espèces, freinant à la fois la traçabilité des échanges et l’efficacité des politiques monétaires. Ce recours massif au cash est attribué à plusieurs facteurs : faible taux de bancarisation, rareté des terminaux de paiement dans les commerces, et méfiance envers le système bancaire. Pour faire évoluer ces habitudes, la Banque d’Algérie a lancé une série de réformes, s’appuyant sur une nouvelle Loi Monétaire et Bancaire adoptée à l’été 2023, remplaçant des textes jugés obsolètes.
Parmi les mesures mises en œuvre, l’autorisation officielle accordée aux prestataires de services de paiement (PSP) représente une avancée importante. Ces acteurs, spécialisés dans les opérations électroniques, pourront désormais proposer des solutions alternatives aux espèces, comme les portefeuilles numériques ou les paiements via smartphone. En parallèle, le cadre réglementaire a été élargi pour accueillir de nouveaux acteurs bancaires, y compris les banques digitales.
Les banques digitales, nouveau levier de transformation
Les banques exclusivement numériques sont désormais reconnues comme des établissements à part entière. Ces entités ne disposent d’aucune agence physique, fonctionnant uniquement par l’intermédiaire d’applications ou de plateformes en ligne. Cette configuration leur permet de réduire significativement les coûts d’exploitation et d’atteindre des segments de la population jusque-là éloignés du système financier classique, notamment les jeunes et les habitants des régions rurales.
En théorie, cette approche pourrait désenclaver des zones peu desservies par les banques traditionnelles. Elle offre aussi une réponse à la faible densité des infrastructures bancaires dans le pays, tout en répondant aux attentes d’une nouvelle génération plus familière avec le numérique. Reste à savoir si l’adoption suivra, notamment dans un contexte où la confiance dans les institutions financières demeure fragile.
Vers un nouvel écosystème bancaire
L’ouverture du marché ne se limite pas aux banques digitales. Le nouveau dispositif réglementaire facilite également la création de banques d’affaires, de bureaux de change modernisés et d’autres prestataires spécialisés. L’objectif est clair : faire émerger un écosystème bancaire diversifié, capable de soutenir l’économie formelle et de réduire la dépendance au cash.
Ce virage réglementaire marque une tentative de rattrapage face aux transformations observées ailleurs. Mais la réussite de cette stratégie dépendra de sa mise en œuvre concrète, notamment de la qualité des infrastructures, de la sécurité des transactions et de la pédagogie déployée pour accompagner les usagers vers de nouveaux usages. Si les outils sont désormais disponibles, le véritable défi réside dans leur appropriation par la population.
Laisser un commentaire