Chine : une douche froide à venir pour la France ?

(Li Xueren | Xinhua News Agency | Getty Images)

Les relations économiques entre la France et la Chine oscillent depuis plusieurs années entre coopération et méfiance. Paris observe avec une attention croissante l’accroissement massif des exportations chinoises sur le marché européen, notamment dans les secteurs de la haute technologie, des véhicules électriques et de l’électronique. Ce déséquilibre commercial, jugé préoccupant, est devenu un sujet de tension récurrent entre les deux partenaires. Tandis que les autorités françaises dénoncent un déficit croissant – estimé à 47 milliards d’euros pour la seule France cette année – les négociations bilatérales peinent à rééquilibrer les échanges. La défiance s’est renforcée avec la décision de Bruxelles d’imposer des droits de douane sur certains produits chinois, notamment les voitures électriques. Pékin n’a pas tardé à réagir en ciblant un secteur emblématique de l’économie française : le cognac.

Le cognac en ligne de mire d’une riposte commerciale

La Chine brandit désormais la menace d’une taxe de 34 % sur les spiritueux français, prévue pour entrer en vigueur le 5 juillet. Le prétexte officiel : une enquête antidumping ouverte par Pékin sur les importations européennes de cognac. Derrière cette procédure, les exportateurs français voient un geste politique clair, une réponse directe aux mesures européennes sur les véhicules chinois. L’industrie du cognac, en particulier le Bureau national interprofessionnel du cognac (BNIC), s’alarme des conséquences qu’aurait une telle surtaxe sur un marché devenu stratégique : la Chine représente aujourd’hui l’un des principaux débouchés hors Europe pour cette boisson, prisée par une clientèle aisée.

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La décision chinoise ne prend pas les producteurs de court. Mais la prolongation accordée par Pékin aux exportateurs européens pour répondre à l’enquête n’apaise pas les inquiétudes. Les professionnels redoutent que cette phase de consultation ne soit qu’un passage obligé vers des sanctions déjà décidées. Face à cette perspective, ils exhortent le gouvernement français à agir vite, craignant un effondrement des ventes sur le marché asiatique, dont les effets se feraient sentir dès cet été.

Des négociations sans percée malgré les échanges bilatéraux

Les efforts diplomatiques n’ont pas suffi à infléchir la position chinoise. Lors de sa rencontre avec le vice-premier ministre He Lifeng, le ministre français de l’Économie, Éric Lombard, a tenté d’instaurer un climat de dialogue basé sur le respect réciproque. Si les échanges ont permis de réaffirmer l’importance d’une relation stable entre les deux puissances économiques, aucun compromis n’a été trouvé sur le sujet du cognac. L’expression de “divergences bien connues” employée par le ministre laisse entrevoir un blocage persistant, malgré la volonté affichée de maintenir le dialogue ouvert.

Cette posture contraste avec celle adoptée par Washington dans ses relations commerciales avec Pékin, plus frontale et moins portée sur le compromis. La France, de son côté, semble jouer la carte de la médiation européenne, tout en tentant de défendre ses intérêts nationaux. Mais face à une Chine qui s’affirme sur le plan commercial comme stratégique, la marge de manœuvre de Paris reste étroite.

Une guerre commerciale aux multiples ramifications

Le conflit autour du cognac illustre une dynamique plus large de tensions commerciales entre la Chine et l’Union européenne, dans laquelle la France occupe une place singulière. La multiplication des barrières tarifaires, les enquêtes croisées et les menaces de représailles traduisent un durcissement des échanges, où les produits emblématiques deviennent des instruments de pression politique. Ce bras de fer met en lumière la fragilité des secteurs dépendants des exportations vers la Chine, mais aussi les limites d’une stratégie européenne morcelée.

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Alors que le déficit commercial européen avec la Chine dépasse les 300 milliards d’euros, les appels à un rééquilibrage se heurtent à une asymétrie persistante dans les échanges. L’épisode du cognac pourrait ainsi marquer un tournant dans la manière dont la France envisage ses relations économiques avec Pékin. Plus qu’une simple affaire de droits de douane, c’est l’ensemble des rapports de force commerciaux entre la Chine et l’Europe qui est remis en question.

La douche froide pourrait être plus qu’un avertissement passager : elle soulève la nécessité pour la France de réévaluer sa dépendance à certains marchés et d’anticiper une multiplication de ces ripostes ciblées. À défaut d’une solution rapide, le contentieux autour du cognac pourrait devenir un précédent dans une série de confrontations commerciales aux contours encore flous.

Une réponse

  1. Avatar de Roblochon
    Roblochon

    « les négociations bilatérales peinent à rééquilibrer les échanges »
    C’est clair que c’est pas avec du camembert que ça s’arranger

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