Sénégal : l’arrestation de Mansour Faye provoque la colère de son parti

© Tobias Schwarz, AFP

Depuis le 19 mai, les audiences de la Haute Cour de justice s’enchaînent et les décisions tombent les unes après les autres, lourdes de conséquences. Trois anciens ministres figurent déjà parmi ceux que la justice a décidé de placer sous mandat de dépôt, marquant une accélération spectaculaire dans les poursuites contre des membres du gouvernement de l’ancien président Macky Sall. Cette vague de procédures, perçue par certains comme une volonté de rendre des comptes, est vue par d’autres comme un règlement de comptes politique. C’est dans cette atmosphère tendue qu’intervient l’arrestation de Mansour Faye, ancien ministre et proche de l’ex-chef de l’État, jetant un peu plus d’huile sur un feu déjà bien nourri.

Une caution de 5 milliards ignorée

Ce n’est pas une opération immobilière qui est visée, mais bien la gestion d’importants fonds publics. Mansour Faye est poursuivi dans le cadre d’un dossier portant sur les finances allouées à la lutte contre la pandémie de Covid-19. Selon les éléments retenus, le préjudice pour l’État est estimé à 2,7 milliards de francs CFA. Pour tenter d’éviter la détention selon le journal Libération, une proposition de caution a été faite : un terrain déclaré appartenant à l’ancien président Macky Sall et évalué à 5 milliards de francs CFA. La manœuvre a échoué, le juge ayant refusé de faire droit à cette offre. Cette tentative, rapidement ébruitée, a ravivé les soupçons de collusion et a suscité une pluie de commentaires sur la porosité entre sphère politique et patrimoine personnel au sommet de l’État.

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Une riposte politique et émotionnelle

À peine l’annonce de l’arrestation rendue publique, l’APR a élevé la voix, dénonçant une volonté manifeste, selon ses termes, de « salir l’image » d’un homme dont la seule faute serait sa fidélité à son camp. Loin de se limiter à la défense juridique, le parti exprime une colère vive et une inquiétude croissante face à ce qu’il perçoit comme une mise à l’écart ciblée de ses figures emblématiques. Le communiqué diffusé dans la foulée évoque une campagne d’humiliation déguisée en procédure judiciaire. Ce discours trouve un écho chez une partie de la base militante, qui voit dans cette arrestation un précédent dangereux, susceptible de compromettre le débat démocratique si la justice est perçue comme instrumentalisée.

L’affaire Mansour Faye ouvre donc une nouvelle séquence politique sensible. Elle interroge non seulement sur la rigueur des procédures, mais aussi sur la manière dont l’espace politique sénégalais gère la transition entre deux régimes. À mesure que les convocations s’enchaînent et que les détentions s’accumulent, la question centrale reste entière : jusqu’où ira cette dynamique, et à quel prix pour la cohésion politique du pays ?

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