Depuis sa prise de fonctions, Bassirou Diomaye Faye affiche clairement sa volonté de renforcer les liens entre le Sénégal et ses voisins. Que ce soit en Mauritanie, au Mali, en Gambie ou en Guinée, le nouveau chef d’État, trace une nouvelle carte diplomatique, faite de proximité, de respect réciproque et d’un dialogue renouvelé entre États africains. Ce mouvement, nourri de symboles forts, a pris une dimension inédite avec la visite du président sénégalais à Bissau.
Une première en cinquante ans d’indépendance
L’événement aurait pu passer pour une tournée de plus si le protocole et le contexte n’en avaient pas souligné la singularité : jamais un président sénégalais n’avait effectué une visite d’État officielle en Guinée-Bissau depuis 1974, année de l’indépendance du pays. En foulant le sol bissau-guinéen pour une visite de deux jours, Diomaye Faye a brisé une longue absence diplomatique qui, malgré la proximité géographique et les liens historiques, n’avait jamais été comblée à ce niveau de représentation.
La portée symbolique de ce déplacement a été immédiatement reconnue par les autorités bissau-guinéennes. En témoignage de cette reconnaissance, le président sénégalais a été décoré de la médaille Amílcar Cabral, la distinction la plus élevée du pays. Ce geste fort, rarement accordé à un chef d’État étranger, souligne l’importance que Bissau attache à ce rapprochement, mais aussi l’attente d’un partenariat plus équilibré et plus actif entre les deux nations.
Une diplomatie du geste et de l’initiative
Ce déplacement s’inscrit dans une stratégie plus large du président Faye, qui mise sur des visites sobres mais stratégiques pour repositionner le Sénégal sur la scène africaine. Loin des sommets internationaux ou des discours théoriques, c’est sur le terrain que le duo exécutif sénégalais entend tisser de nouvelles alliances. Les déplacements s’enchaînent à un rythme soutenu, avec une attention particulière portée aux voisins immédiats, comme pour mieux sécuriser l’environnement régional du Sénégal.
La visite à Bissau apparaît donc comme une extension logique de cette approche : il s’agit non seulement de combler un vide diplomatique, mais aussi de réaffirmer une solidarité régionale. Dans un espace où les tensions et les transitions politiques sont fréquentes, cette politique de proximité peut aussi servir d’outil de stabilisation et de dialogue, surtout dans une région marquée par les coups d’État et les reconfigurations stratégiques.
Une normalisation tardive mais stratégique
Au-delà du protocole et des hommages, cette visite traduit un tournant. Elle montre que la Guinée-Bissau, longtemps considérée comme périphérique par les grandes chancelleries ou même par ses voisins directs, fait désormais partie intégrante des priorités diplomatiques de Dakar. Cela peut ouvrir la voie à des coopérations concrètes dans des domaines aussi variés que la sécurité transfrontalière, les échanges commerciaux, ou encore la mobilité entre populations frontalières souvent liées par des liens familiaux.
En ravivant une relation longtemps restée en veille, le président sénégalais semble vouloir bâtir un nouveau modèle diplomatique africain, où les initiatives concrètes prennent le pas sur les postures symboliques. La visite en Guinée-Bissau marque ainsi un jalon, non pas parce qu’elle est exceptionnelle dans sa forme, mais parce qu’elle pourrait devenir la norme d’une diplomatie sénégalaise recentrée sur son espace naturel : celui des réalités africaines vécues au quotidien.
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