Le port autonome de Dakar a accueilli ce weekend la plus importante cargaison d’urée jamais réceptionnée dans le pays : 33 000 tonnes d’engrais destinées à renforcer la campagne agricole 2025‑2026. Ce volume, qui fait suite à une première livraison de 15 000 tonnes, sera bientôt complété par l’arrivée d’un troisième navire transportant 25 000 tonnes supplémentaires. À travers cette série de livraisons étalées sur plusieurs semaines, les autorités cherchent à garantir une couverture optimale des besoins agricoles sur tout le territoire.
Au-delà de la quantité, c’est surtout la méthode qui retient l’attention. Le programme repose sur une stratégie d’achat groupé coordonnée par le Secrétariat d’État aux Coopératives et à l’Encadrement paysan. Cette initiative logistique a permis de mutualiser les efforts de plusieurs opérateurs locaux, réduisant les frais d’acheminement, les délais de dédouanement et les marges intermédiaires. Ce nouveau modèle, appliqué à l’importation d’intrants agricoles, a permis à l’État de réaliser près d’un milliard de francs CFA d’économies, un gain non négligeable dans un contexte budgétaire sous pression.
Une vision agricole articulée autour de la souveraineté
Supervisant l’opération au port de Dakar, le Secrétaire d’État Dr Alpha Bâ a souligné que cette démarche s’inscrit dans une logique de reconquête économique par l’agriculture. En renforçant la disponibilité des engrais à des prix plus accessibles, les autorités espèrent stimuler les rendements des exploitations familiales tout en réduisant la dépendance structurelle aux importations désorganisées.
La portée du programme dépasse donc le seul horizon des semences et de la fertilisation. Il touche au cœur même d’un projet agricole national fondé sur la réactivité logistique, la réduction des pertes post-récolte, et la sécurisation des calendriers de culture. L’arrivée massive et anticipée de l’urée avant les premières pluies est perçue par de nombreux producteurs comme une avancée technique décisive dans leur quotidien, souvent rythmé par des ruptures de stock et des retards de livraison.
Une redistribution à suivre de près
Si la réception a été saluée pour sa rigueur opérationnelle, l’attention se porte désormais sur la phase de distribution. Acheminer ces milliers de tonnes vers les zones rurales, en particulier dans les régions les plus enclavées, représentera un défi logistique d’autant plus grand qu’il faudra en garantir l’équité. Plusieurs organisations paysannes ont déjà exprimé leur attente quant à un dispositif transparent de répartition, avec des quotas adaptés aux besoins réels et une gestion locale contrôlée.
La réussite de cette campagne dépendra donc aussi de la coordination entre les services techniques, les collectivités locales et les structures de stockage. Le gouvernement entend mettre en place un mécanisme de suivi permanent pour éviter toute concentration ou revente spéculative. Si cette ambition se concrétise, le Sénégal pourrait inaugurer un nouveau cycle d’organisation dans la gestion des intrants, avec à la clé des gains de productivité et une plus grande autonomie pour les producteurs.



