Créé en 2009, le Conseil pour l’Observation des Règles d’Éthique et de Déontologie dans les médias (CORED) occupe une place centrale dans le paysage médiatique sénégalais. Il veille à l’application des principes déontologiques par les professionnels de l’information, sanctionne les dérives, forme les journalistes et agit comme une balise dans un environnement parfois exposé à la désinformation. Sa mission : préserver la qualité de l’information et renforcer la responsabilité éditoriale dans un contexte marqué par la prolifération de contenus numériques incontrôlés.
Pourtant, l’institution traverse aujourd’hui une crise financière majeure. Le 25 juin 2025, le CORED a annoncé la fermeture temporaire de son secrétariat permanent, situé à la Maison de la Presse Babacar Touré. Cette décision fait suite à l’épuisement total de ses ressources, aggravé par 14 mois d’arriérés de salaires et l’absence totale de dotation budgétaire pour les années 2024 et 2025.
Le silence budgétaire du Fonds d’appui à la presse
Les difficultés du CORED trouvent leur origine dans le non-versement du financement prévu par le Fonds d’appui et de développement de la presse (FADP). Ce dispositif, pourtant prévu par les articles 46 et 53 du Code de la Presse, devait assurer la stabilité de l’institution. En l’absence de ces dotations, seul le Bureau, le Directoire et le Tribunal des pairs poursuivent leurs activités de manière bénévole, sans le soutien logistique essentiel que procure un secrétariat permanent en fonctionnement.
Cette situation soulève des inquiétudes sur la volonté politique de préserver les organes d’autorégulation dans le secteur de la communication. Si l’autorité de la régulation s’effrite faute de moyens, le risque est réel de voir se multiplier les dérapages médiatiques, dans un climat national où l’espace public est de plus en plus structuré par les opinions virales et les contenus sensationnalistes.
Une alerte pour la gouvernance de l’information
La suspension partielle du CORED intervient à un moment où la régulation éthique est plus que jamais nécessaire. Le rôle que joue cet organe ne se limite pas à la sanction : il incarne un rempart contre les manipulations, les discours de haine ou les atteintes à la vie privée souvent relayés dans les médias ou les réseaux sociaux. En outre, sa disparition temporaire risque d’aggraver la crise de confiance entre le public et les organes de presse, déjà fragilisée par une compétition effrénée pour l’attention.
La situation du CORED pose donc une question de fond sur la gouvernance de l’information au Sénégal : quelles ressources et quel cadre institutionnel sont mis à disposition pour garantir une presse libre, responsable et encadrée par des principes solides ? En attendant des réponses concrètes, l’organe veilleur se tait, faute de moyens pour continuer à éclairer la voie.
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