Les jeunes face à l’emploi

Des jeunes. Avec un peu d’audace, ils ont poussé la grille du Palais de la République. Le Chef de l’Etat, avec un peu de bienveillance, a accepté de les recevoir.

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C’était le dimanche 12 mai 2013. Au menu de ce face à face,  l’épineux et sempiternel problème de l’emploi des jeunes.

Difficile qu’il en soit autrement dans un pays où des jeunes, bardés de diplômes, sont en attente, depuis des lustres, d’un premier emploi. Impossible qu’il en soit autrement dans un pays où l’Université, bien souvent, ne prépare qu’à un atterrissage en douceur dans l’antre de l’informel. La précarité pour compagne, la débrouille comme horizon

Ces rencontres autorités/ jeunes, autour de l’emploi, sont souvent biaisées. Les premières se culpabilisent de ne pas en faire assez pour résoudre l’un de nos plus grands drames sociaux. Les seconds se montrent exigeants, pointant du doigt la responsabilité de l’Etat. Dans tous les cas, le problème de l’emploi a une résonnance morale si profonde que les différents protagonistes accordent bien rarement leurs violons. Il y a trop de non dits, trop de malentendus qui brouillent la communication.

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Le premier malentendu tient au fait que la vision de l’emploi reste partielle au départ et se fait partiale à la fin. Les jeunes qui rencontrent le Chef de l’Etat sont, de toute évidence, des  urbains. Ils sont, en majorité, lettrés. Ils sont diplômés pour la plupart. Les termes dans lesquels ils posent leurs problèmes d’emploi ne rencontrent pas toujours, sinon jamais, ceux dans lesquels se posent les problèmes d’emploi des jeunes ruraux.  Alors, qui veut quoi, qui parle au nom de qui ?

Le deuxième malentendu tient au fait qu’il y a une confusion, souvent sciemment entretenue, entre emploi et travail. Si l’emploi est rare, le travail est toujours et partout disponible. Il est à la portée de tous. Les pays qui ont su établir un lien entre travail et emploi ont développé, de bonne heure, chez les jeunes, un sens élevé de service. Avec un apprentissage mieux assuré. Ce qui permet, plus tard, une insertion plus heureuse dans les cadres professionnels de la société.

Le troisième malentendu tient au fait que nous disons rarement aux jeunes la vérité sur ce qu’est et ce que n’est pas   l’Université. Les jeunes doivent comprendre, une fois pour toutes, que l’Université n’a pas vocation à former à un emploi. L’Université assure une formation générale. Celle qui prédispose à des tâches plutôt pointues d’enseignement et de recherche. En manquant de le faire comprendre aux jeunes, nous favorisons cette ruée sauvage annuelle vers l’université, avec les conséquences que l’on sait : amphi bondés, insuffisance de l’encadrement aussi bien théorique que pratique, prise en charge laxiste des apprenants… On ne traite pas ainsi ce qu’un pays a de plus cher : la ressource humaine.  

Le quatrième malentendu tient au fait que l’Etat n’a pas souvent le courage de lâcher le morceau qui, pourtant, n’est que pure vérité : l’Etat n’a pas devoir de donner ou de garantir un emploi à tous les citoyens. La vision d’une société de plein emploi est une vue de l’esprit. Par contre, à travers sa politique générale, le gouvernement est tenu de créer des opportunités d’affaires dont pourraient tirer avantage les citoyens à la recherche d’un emploi ou voulant s’auto-employer. 

Le cinquième malentendu tient au fait que nombre de pays, dans leurs politiques de l’emploi, se contentent de déchets et de   situations en trompe-l’œil. On donne le sentiment d’œuvrer à trouver des solutions durables au problème de l’emploi alors qu’on ne propose que de simples palliatifs. En médecine, le mot désigne toute chose qui atténue les symptômes d’une maladie sans agir sur sa cause. Nous avons fait prospérer le phénomène des taxis-motos dit «Zémidjan». Mais c’était pour éviter de prendre nos responsabilités en matière de transport public. Nous avons encouragé le développement des réseaux de vente de l’essence frelatée dite «Kpayo». Mais c’était pousser par le souci d’offrir aussi facilement que dangereusement des milliers d’emplois, sinon d’occupations à nos compatriotes. 

Comme on le voit, essentiel et crucial est, pour un pays, le problème de l’emploi, de l’emploi des jeunes en particulier. Un diagnostic est à faire. Nous cernerons mieux nos maux. Nous pourrons les identifier et les nommer. Nous situerons mieux les responsabilités de chacun et de tous. La guérison ne peut être qu’au bout de nos recherches.

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