La méthode Yayi à l’aune des affaires lionel Agbo et Talon

Le pardon que le président Boni Yayi vient d’accorder, à la surprise générale, à son  ex- ami devenu ennemi public no 1est le deuxième du genre en moins de deux ans. Le premier a été celui accordé à son ancien porte parole, Me Lionel Agbo contre qui il a intenté un procès retentissant pour offense au chef de l’Etat.

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Dans les deux affaires ,ce qui frappe l’observateur, c’est la manière dont elles ont été conduites, c’est-à -dire , au pas de charge et tambour battant, sans autre répit que celui permis par les procédures judiciaires , comme si le président avait un compte personnel à régler. Au finish, elles  se sont toutes deux terminées en eau de boudin par un pardon que certains ont tôt fait de qualifier de christique, donnant une impression de véritable gâchis.Tout ça pour ça ! Notre objectif ici  est  de montrer qu’il y a une constante dans la conduite des dossiers sensibles qui touchent à la personne du chef  de l’Etat.

Bilan 2013 – Lionel Agbo : de la condamnation à l’exil

Le premier à subir les foudres du président est Me Lionel Agbo.Dans une mémorable conférence de presse relayée par tous les médias, l’avocat et homme politique avait, on s’en souvient critiqué vertement la  gouvernance Yayi  en concluant  par une boutade restée célèbre, « l’entourage du chef de l’Etat est corrompu et  le chef de l’Etat le sait et sait que je sais ».Il n’en fallait par plus pour que le rouleau compresseur de la répression s’abatte sur lui . Tout y est passé : les vieilles méthodes policières d’intimidation et le procès qui a toutes les allures d’un procès politique.Tout a d’abord commencé avec une interpellation au commissariat central ou le futur Dgpn lui a fait subir plusieurs heures d’interrogatoire, avant  de le relaxer, pour vice de procédure.La diffamation comme l’offense au chef de l’Etat devant  faire l’objet d’une citation directe et non d’une interpellation au commissariat de police. Viennent ensuite la filature incessante de ses déplacements, des coupures intempestives  de  courant dans son cabinet d’avocat au 6ème étage d’un immeuble du centre ville, suivies de « l’enlèvement » du compteur par la Sbee pendant des mois. Pour finir par un procès des plus ubuesques qui a  duré plus de quatre mois et une condamnation à six mois de prison fermes. Il n’a dû son salut qu’à un informateur qui a « fuité «  la décision  du juge. Le lendemain pourtant, le président en bon «  père magnanime de la Nation » lui accorde le pardon, contre toute attente. La veille pourtant, on recherchait désespérément les complices qui l’ont aidé à fuir. Le pyromane se fait sapeur pompier, sans savoir que le feu de la vengeance a déjà semé ses dégâts.

Affaire Patrice Talon : Les non-dits du pardon de Boni Yayi

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Le cas Talon et  de ses co-inculpés  des affaires de tentatives d’empoisonnement et de coup d’étatest autrement plus poignant mais il y a une constante dans la méthode qui se décline en trois mots qui sont autant de maux: la précipitation , quitte à enfreindre la loi, les pressions et le passage en force. Ici,vingt mois d’une double procédure à Cotonou et à Paris avec chaque fois,  la même volonté d’en découdre avec des individus. L’ordonnance du juge Houssou tombe après plus de huit mois d’instruction, pendant lesquels la communication a pris le pas sur l’information. Et revoilà le chef de l’Etat dans tous ses états :le juge est interpelé à la frontière de Kraké , on lui fait subir toutes sortes de traitements plutôt dégradants. Filatures incessantes, séquestration à domicile avec une nuée d’agents envahissant son appartement. Campagne de dénigrement dans les médias. Puis, n’en pouvant plus, le jeune juge de 37 ans prend le large. Pendant ce temps, les juges de la chambre d’accusation confirment l’ordonnance de non lieu le 1er juillet 2013.Entre-temps Paris rend son verdict de non extradition des exilés. Il faudra attendre  plus de dix mois pour connaître l’arrêt-surprise donné par la cour suprême. Et alors qu’on s’attendait à une reprise de toute la procédure dans une  ambiance de profonde lassitude, revoilà le président qui  annonce, sans crier gare son pardon. Pendant ce temps les usines de la Sodeco , propriétés de Talon sont écartées de la campagne d’égrenage et celles de Bohicon privée de coton-graine. Et le président nous jette au visage que son pardon ne vient pas du souci de régler le sort des milliers de travailleurs de ces usines privées d’activités mais simplement de l’entremise des personnalités étrangères comme le président Hollande et l’ex-président Diouf qui ne vivent pas au Bénin et ne savent rien de la honte que nous avons  subie de voir notre pays traîné dans la boue, par la faute d’un président qui privilégie le passage en force,  les pressions,  les entorses à la loi, dans les affaires qui touchent à sa personne.

(Dans notre parution de demain nous aborderons la question des dossiers à scandales de la république pour en tirer la constante  de l’autre facette de la méthode Yayi : deux exemples suffiront :les affaires ICCservice et celles des concours frauduleux)

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