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Bénin : Les grosses bourdes de Patrice Talon à l’Elysée

(Lire le verbatim des propos du président) Manque de compétences dans l’administration béninoise, demande de cadres à la France…Lors du point de presse conjoint de ce mardi 26 avril à l’Elysée, le nouveau chef d’Etat béninois a tenu des propos graves et avancé des idées à controverses.

Comme annoncé par l’Elysée sur son site web, le nouveau président béninois a été reçu en audience par son homologue français ce mardi 26 avril en fin d’après-midi.  A 17 heures (heure parisienne) Patrice Talon a été accueilli sur le perron de l’Elysée par François Hollande avec les honneurs dus à son rang. Les deux chefs d’Etat ont eu un tête-à-tête d’environ une heure avant de donner un point de presse conjoint pour marquer la fin de la visite. Occasion pour les deux chefs d’Etat de rendre public une partie des sujets ayant meublé leurs échanges à huis clos.  On retiendra que le président français et son hôte ont parlé coopération bilatérale, la Cop 21 avec l’accord de Paris signé vendredi 22 avril 2016 à New-York aux Etats-Unis, sécurité avec la menace terroriste et énergie.

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Durant le point de presse, un exercice de douze minutes pour les deux chefs d’Etat, dans son intervention, le chantre du « Nouveau départ » a tenu des propos qui ont certainement fait sursauter plus d’un  Béninois.  «Nous voudrions pouvoir compter sur vous pour nous accorder de la compétence toute de suite parce que le Bénin est aujourd’hui comme un désert de compétences», a déclaré le président Patrice Talon sans aucune gêne.  «(…) notre administration aujourd’hui manque de compétences de manière criarde », a-t-il poursuivi dans son analyse erronée des causes de l’inefficacité de l’administration publique béninoise. Car, les problèmes de l’administration béninoise sont bien connus (lire notre article en page10). Et « le manque criard de compétences » en fait-il partie ? Plus encore, dans ce pays que Patrice Talon qualifie de « désert de compétences », de milliers de jeunes formés aussi bien dans les universités béninoises  qu’à l’extérieur pour servir l’administration sont sous-employés ou sans emploi. Ces jeunes n’attendent rien d’autre que l’opportunité pour faire valoir leurs compétences.

La mauvaise chose de la mauvaise manière

Le président Patrice Talon fera sa seconde bourde lorsqu’il lancera: «Nous voudrions compter sur la coopération française pour nous appuyer, pour nous donner les moyens d’acheter, de payer de rémunérer la compétence, quel que soit le prix (…)Nous voulons pouvoir compter sur vous pour nous apporter, pour nous donner des cadres, de l’assistance technique pendant quelques mois, quelques années, le temps que nous parvenons nous-mêmes, à former les cadres dont nous avons besoin».

Un peu comme pour désillusionner, moins d’un mois après son entrée en fonction, ces milliers de jeunes béninois très qualifiés qui voyaient en son élection un espoir. « Talon fait de l’importation des cadres et des compétences sa solution contre le sous-emploi et le chômage des jeunes béninois », a d’ailleurs ironisé un citoyen.  

Paradoxe, pendant que Patrice Talon rabaisse l’intelligence béninoise et sollicite une importation de compétences, François Hollande, lui souligne le mérite des cadres béninois.

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« La France serait toujours aux côtés du Bénin parce que c’est un pays ami, parce que c’est un pays de grande culture, parce que c’est un pays où il y a des cadres de hauts niveau et un peuple vaillant », a témoigné le chef d’Etat français.

Peut-être que les deux personnalités ne parlaient pas du même pays. Sinon, Patrice Talon est resté dans la posture de se mettre à dos l’administration publique et la jeunesse béninoises.  Cette fois, le compétiteur-né a fait la mauvaise chose de la mauvaise manière

Verbatim des propos de Patrice Talon à l’Elysée

Et bien vous m’avez enlevé tout ce que j’avais à dire. Vous avez déjà tout dit mais je vais faire l’effort d’en rajouter les choses qui me sont personnelles et que j’ai eu à vous exprimer tout à l’heure.

C’est pour moi, l’occasion monsieur le président de dire à la face du monde, combien je voudrais remercier la France, les institutions françaises et la justice française pour l’accueil et la protection dont j’ai bénéficié pendant les quelques années d’exil que j’ai connues en France. J’aime bien le dire, je suis le témoin vivant de la Grandeur de votre démocratie. Cela m’inspire. Et je voudrais dans quelques années qu’on dise autant de mon pays.  Que le Bénin est une terre de démocratie,  de liberté et de protection des droits de l’homme. Quand on a vécu dans ses conditions ici, on ne peut pas rester indifférent à cette vertu.

Monsieur le président, je vous ai dit tout à l’heure que la coopération franco béninoise, et je l’ai dit en violant les règles du protocole et de la diplomatie, je vous ai dit que j’ai trouvé que la coopération avait trainé un peu les pas. Et que c’est vrai, la France a beaucoup fait pour le Bénin et que c’est peut-être le moment de l’essoufflement. Mais qu’avec la nouvelle dynamique, dans laquelle nous sommes engagés, nous serons capables de donner une réponse positive et visible à l’aide.  

Je vous ai prié de faire l’effort de relancer et de donner plus d’ambitions à la coopération entre la France et le Bénin. D’autant que nous allons opérer des réformes politiques, administratives dans notre pays pour améliorer la gouvernance, pour être plus disposé à accomplir notre mission de développement

Les gouvernants ont la responsabilité de sortir leur peuple de la pauvreté. Et ce mot n’est pas fort pour le Bénin car c’est un pays de grande pauvreté.

J’ai l’ambition, et j’aime bien le dire haut et fort, au terme de cinq années de faire le miracle, de réaliser cette magie.

Et nous voudrions pouvoir compter sur vous pour nous accorder de la compétence toute de suite parce que le Bénin est aujourd’hui comme un désert de compétences. C’est vrai, les Béninois aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur, sont remplis de talents mais notre administration aujourd’hui manque de compétences de manière criarde.  En cela, nous voudrions compter sur la coopération française pour nous appuyer, pour nous donner les moyens d’acheter, de payer de rémunérer la compétence, quel que soit le prix.

Malheureusement, il est difficile aujourd’hui d’avoir la compétence gratuitement. Et c’est pour cela que nous utilisons ce terme, nous voulons avoir les moyens de payer. Nous voulons pouvoir compter sur vous pour nous apporter, pour nous donner des cadres, de l’assistance technique pendant quelques mois, quelques années, le temps que nous parvenons nous-mêmes, à former les cadres dont nous avons besoin.

le Président, nous avons invoqué un sujet qui nous tient à cœur : celui de la Cop 21. Un sujet pour lequel vous avez exercé un leadership remarquable. La France a eu d’action de grande efficacité qui s’est soldée par la signature des accords de Paris à New-York. Nous prendrons une part active dans la mise en œuvre du contenu de l’accord. Les pays africains, mon pays, souffrent des changements climatiques et les efforts qui s’imposent au monde entier seront également les efforts de mon pays. Donc nous allons, et à titre personnel, je dis que j’allais m’engager, dans cette dynamique et le Bénin ne sera pas du reste.

Nous avons également évoqué les problèmes de sécurité et de terrorisme. Vous avez abondamment parlé de cela tout à l’heure. Le Bénin est préoccupé également. Aujourd’hui, on ne peut plus parier que des pays resteront épargnés indéfiniment. Nous espérons que nous ne serons pas une cible mais nous devons nous préparer à répondre. Nous devons nous préparer à parer. Et sur ce champ, nous aurons besoin de votre accompagnement. Parce que nos services de sécurité et de défense, nos services de renseignement, pour moi, pour ce que je sais, n’ont pas encore la compétence nécessaire pour faire face seuls à ce fléau. Si un pays comme la France, les pays d’Europe, d’Amérique n’y parviennent pas encore, ce n’est  pas le Bénin qui dirait qu’il a les moyens de faire face. Nous voudrions pouvoir compter sur la coopération internationale, sur la coopération bilatérale avec vous, pour pouvoir être capable de faire face à ce fléau dans notre sous-région.

De manière générale, vous nous avez donné l’assurance que la France sera plus près de nous dans la dynamique de développement que nous nous sommes imposés depuis quelques jours. Parce que nous avons dit que le Bénin a fini, avec la pauvreté. Que nous allons nous engager sur le chemin du développement. Et vous nous avez assuré que vous allez intervenir à nos côtés sur tous les plans, au plan touristique, au plan des compétences, au plan agricole, au plan de l’énergie. Notre pays est dans le noir, presque tous les jours. Et en cela, nous avons l’obligation dans les prochaines semaines, d’apporter une solution à nos populations, à nos industries et à nos services. Vous avez dit que dans quelques jours, il y aura une mission de haut niveau qui viendra au Bénin et que vous ne manquerez pas de nous aider à trouver une solution rapide. Je voudrais dire ici, prendre tout le monde à témoin, que dans les semaines à venir, qu’avec vous nous allons venir à bout de cette souffrance. C’est ce que je comptais rajouter pour ma part à ce que vous avez dit et qui relate brièvement tout ce qui a fait l’objet de notre entretien de ce jour. Merci.  

Transcription : Yao Hervé Kingbêwé

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