Le politologue Mathias Hounkpè pense que la nouvelle loi portant statut de l’opposition au Bénin est une occasion manquée pour le régime actuel de faire beaucoup mieux dans l’optique d’améliorer qualitativement l’espace partisan national.
L’administrateur du programme de Gouvernance politique et de consolidation démocratique de OSIWA (Open Society Initiative for West Africa) Mathias Hounkpè dans ses réflexions pour comprendre et apporter des solutions à la situation politique actuelle au Bénin estime que pour une fois encore, on est passé à côté de la bonne porte en ce qui concerne la nouvelle loi portant statut de l’opposition. La réflexion qu’il a publiée hier mardi 18 février sur sa page Facebook est intitulé «la nouvelle loi portant Statut de l’opposition au Bénin : une occasion manquée».
Dans cette publication, le politologue estime qu’au vu des moyens dont dispose la coalition au pouvoir aujourd’hui (le contrôle de quasiment tous les pouvoirs de décision) et surtout, de «l’intention affichée des réformes politiques d’améliorer qualitativement l’espace partisan national», il y avait mieux à faire. «Je pense qu’on aurait dû faire beaucoup mieux en ce qui concerne la nouvelle loi portant Statut de l’opposition», écrit-il.
Appartenance à l’opposition
Mathias Hounkpè, pour argumenter sa réflexion prend comme premier exemple l’article 3 du nouveau statut de l’opposition. Cet article reprend une disposition similaire du texte précédent. Il est dit au niveau de cet article «que l’appartenance à l’opposition doit faire l’objet d’une déclaration officielle et publique». A le croire, cela laisse «une sorte d’incertitude pour tous les partis politiques qui ne se déclareraient pas officiellement de l’opposition».
Il rappelle que par le passé, le Bénin a connu des partis politiques qui «ne se sont pas déclarés de l’opposition tout en se comportant comme des partis de l’opposition». Et ces partis ont toujours exigé «d’être traités légalement comme tels, par exemple lorsqu’il fallait tenir compte de la configuration politique du parlement». Alors, le politologue relève qu’il fallait tirer «les leçons de l’ancienne loi et changer l’option par défaut, notamment en exigeant des partis soutenant le pouvoir d’aller faire une déclaration officielle et publique, et en considérant tous ceux qui ne le font pas comme étant de l’opposition».
Accès aux informations officielles sur l’état de la gestion
L’article 4 du nouveau statut reconnaît aux partis de l’opposition le droit de critiquer les décisions et actions du gouvernement, de proposer des solutions alternatives à celles du gouvernement. Mathias Hounkpè pense que pour joueur convenablement ce rôle, crucial et important tant pour eux-mêmes que pour la démocratie, lesdits partis doivent avoir «accès aux informations officielles sur l’état de la gestion des affaires du pays». Alors, il trouve curieux que «le nouveau Statut de l’opposition reste silencieux sur cette question majeure». Et, le risque selon lui, c’est que «l’opposition continue à faire des spéculations ou, alors, qu’elle soit obligée d’inciter les cadres à soustraire des informations avec les risques qui l’accompagnent».
Accès pertinent aux médias
Il rappelle qu’aux yeux de tous, «il est attendu de l’opposition qu’elle soit, au moins, perçue comme une alternative au pouvoir politique du moment». Et donc, il ne voit pas comment l’opposition peut assumer ce rôle «s’il ne lui est pas aménagé un accès pertinent au niveau des médias, notamment ceux du service public». Mathias Hounkpè estime par exemple qu’à chaque fois que le pouvoir fait une sortie sur une question spécifique, surtout sur les médias de service public, l’opposition doit jouir de conditions comparables, avec un temps d’antenne raisonnable, pour partager un point de vue alternatif fondé sur des informations officielles etc.
Il trouve donc curieux que la loi actuelle ait été silencieuse sur la question. Il précise que sur les questions d’accès à l’information officielle et aux médias, le code de l’information et de la communication devrait aider. Mais, il est à constater que «ce code demeure nettement insuffisant, déjà dans les possibilités très limitées qu’il donne aux citoyens, en général, aux professionnels des médias et aux entreprises de presse, en particulier». En revanche, l’homme encourage ses concitoyens béninois «à utiliser à fond les quelques possibilités prévues par la loi dans leur quête de l’information (articles 7, 8, et surtout 70 à 107)».
Laisser un commentaire