C’est regarder une partie des problèmes que rencontre notre pays aujourd’hui que de penser qu’il s’agit simplement d’un déficit ou d’une régression de la Démocratie. Lorsqu’on sait que la démocratie est une quête permanente comme viennent de le démontrer les évènements survenus Outre-Atlantique, on est en droit et en devoir de pousser la réflexion et le questionnement plus loin. Il est nécessaire de répondre à la question suivante : Pourquoi nos institutions se vassalisent-elles en permanence ? Et comme nos institutions, pourquoi certaines personnalités dirigeant ces institutions et certaines élites sont si sensibles et accommodantes avec le déni de démocratie ?
La réponse a cette question n’est pas seulement l’apanage du régime de la rupture. Le mal a commencé depuis 2006. Souvenez-vous des assauts contre les libertés d’abord du régime du changement et ensuite de celui dit de la Refondation. Les tentatives ce soumission des institutions ont même conduit à la mise en place d’un regroupement ou d’une conférence des Présidents d’institution, un organe jamais prévu par le constituant béninois. Sous la rupture, ce n’est pas seulement à une vassalisation qu’on assiste, mais plutôt à une soumission, voire à un avilissement en raison du caractère particulier du régime et de sa propension à recourir à la force et a la violence comme outil de gouvernance. Chercher à répondre a cette interrogation revient à situer les responsabilités des uns et des autres dans ce qu’il convient de qualifier aujourd’hui de retour à la case départ, c’est-à-dire a la période avant la conférence nationale, avec la nuance que le Parti unique d’aujourd’hui a deux têtes, une stratégie du Prince du moment, d’une division parcimonieuse pour mieux régner alors que le Parti unique de 1975 à 1989 avait une seule tête et faisait moins mal au peuple dans sa chair et dans son âme, l’idéologie faisant le gros du boulot.
On ne peut situer les responsabilités sans citer en premier ressort l’élite politique et intellectuelle en roue libre de la faillite. Elle est composée de politiciens de carrière et de prétendus intellectuels, professeurs d’Universités, Avocats, anciens cadres de Banque Centrale, certains d’entre eux venus à la politique pour bonifier leur temps de retraite après des carrières bien réussies, etc, qui ont fait le pari de vivre des subsides de l’Etat en vendant leur conscience au Prince. C’est leur cupidité qui jette le Benin dans les bras d’un seul individu qui fait et défait, au gré de sa volonté, le quotidien et l’avenir des Béninois. Je n’évoquerai jamais assez, ces cadres venus d’Institutions financières sous-régionales en qui le peuple a cru et qui ont déçu avec une couardise incroyable. Pire, ils ont abdiqué le pouvoir et le devoir d’éclairer le peuple et de le défendre que leur a inculque l’école et les notions de civisme. Ils ignorent allègrement le devoir de patriotisme ou l’obligation de reddition de compte envers soi, une exigence éthique et morale qu’ils ont vite envoyée par la fenêtre.
Le Benin n’est pas la référence en matière de corruption. Il y a des pays qui en sont plus capes. Mais la culture sous nos cieux est de s’accrocher aux deniers publics comme aux seins de sa mère tel un bebe qui refuse le sevrage. Cette propension à vivre proche des deniers publiques offre aux gouvernants la marge de manœuvre de les tenir et d’acheter leur silence. Il suffit aussi d’observer le comportement de certains jeunes citoyens qui il y a quelques petites années passaient sur les plateaux de télévision avec des critiques acerbes contre les dérives autoritaires du régime de la rupture. Les choses ont-elles réellement change pour qu’on les retrouve aujourd’hui dans la sauce ? Je ne voudrais pas citer ce professeur d’Université dont s’occupe déjà de nombreux compatriotes et qui a vendu sa science a l’autocratie de la manière la plus honteuse qui soit, même si nous devons concéder à tous les citoyens le droit d’avoir leur opinion sur la chose politique et en conséquence de faire leur mue à tout moment.
L’évidence crève l’œil, le Benin est devenu un pays qui étonne dans l’autre sens. Même les décisions et les arrêts des juridictions internationales n’émeuvent plus nos dirigeants alors que notre pays était connu par le passe dans le concert des Nations comme un pays de discipline. On se demande ce qui nous rend si confiant pour tourner le dos à la communauté internationale. Nous sommes même alles plus loin dans l’autocratie et poussant des compatriotes hors de leur pays. Le Chef de l’Etat lui-même, alors candidat à la Présidentielle de 2016, ne croyait pas bien dire en déclarant « qu’un Etat qui ne respecte pas les décisions de justice est un Etat voyou ». Que sommes-nous devenus aujourd’hui ? question à qui de droit.
En finir avec le mythe de l’Homme fort ou du Messie
Il est fréquent dans l’imagination du Béninois moyen et même lambda de trouver des hommes forts a qui l’on attribue toutes les vertus de nous sortir des situations déplorables ou de nous amener vers la terre promise. Ceci n’est pas une mauvaise chose, tant que cette marque psychologique le prépare à faire confiance au nouveau dirigeant et à placer tout son espoir de protection en lui. C’est ainsi que lors de la campagne présidentielle de 2016 et pour conjurer le sort a lui impose par le régime sortant qui cherchait les moyens de se succéder a lui-même (après nous c’est nous), la sociologie béninoise a généré le concept d’ « Agbonnon» pour signifier toute la force et la puissance d’un homme qui a leurs yeux arrangerait leurs affaires, alors que le candidat lui-même prônait une gouvernance ou l’Homme tout puissant va disparaitre au profit d’institutions fortes qui doivent incarner la puissance publique au service de toute la collectivité nationale. Quelques petites années ont suffi pour constater qu’en réalité cet homme a mis en chantier des reformes totalement personnelles pour servir ses intérêts et ceux des siens au mépris des libertés d’expression, d’association et de l’adhésion du peuple, seul détenteur de la souveraineté nationale. Aujourd’hui, il est aise de constater que toutes les institutions sont soumises au Prince et s’empêchent même de jouer le rôle a elles dévolu par la constitution même révisée.
Le résultat de toutes les réformes politiques et institutionnelles, pierre angulaire de son prétendu mandat unique c’est aussi aujourd’hui l’incapacité des grands partis politiques sortis du chapeau du prince de designer des candidats a l’élection présidentielle en leur propre sein. Qu’avons-nous gagne avec les reformes ? Ou sont les institutions qui devaient jouer leur rôle de régulation du jeu politique et électoral ?
C’est une vérité universelle que le pouvoir corrompt et que le pouvoir absolu corrompt absolument et aucun pays n’est à l’abri des dérives individuelles qui peuvent mettre a mal le vivre ensemble de tout un peuple. Nous y sommes au Benin ou l’option actuellement sur la table relève du surréalisme avec un homme tout puissant qui sème la terreur (la presse rapporte encore de récentes arrestations de jeunes citoyens), utilise la violence policière pour intimider, inquiéter et réprimer. Est-ce cela le choix des béninois en 2016 ? Est-ce cela le résultat des reformes ? Un homme d’Etat qui met en chantier des reformes qui aboutissent à la violence avec des tueries et qui imposent sa seule volonté a tout un peuple devrait se poser des questions sur son propre avenir.
Comment sortir de l’impasse ou l’urgence de dialogue national ouvert et sincère
Aucune reforme ayant un impact présume sur la vie quotidienne des populations ne peut prospérer et durer dans le temps si elle ne rencontre pas l’adhésion du peuple. La belle illustration, c’est l’abrogation de la Kirielle de décrets par le régime de la rupture a son avènement. On observe également la signature de nombreux décrets par le nouveau Président Joe Biden aux Etats Unis pour renverser des décisions a polémique prise par son prédécesseur. C’est pourquoi nous devons à tout prix prendre le temps de la réflexion, de la conception, de la discussion, de la large consultation pour mener à terme des reformes importantes qui engagent l’avenir de tout un peuple. A quelques exceptions prêtes, les reformes conduites par le régime de la rupture sont l’expression de la volonté d’un seul individu qui pense les choses dans sa tête et en impose à tout le monde par la force, la terreur et l’intimidation de tous ces cadres (conseillers, Ministres, Députes, etc) qui émargent au budget de l’Etat et qui malheureusement ne sont pas capables de dire la vérité au Prince qui s’enfonce dans l’impertinence et des démarches qui contredisent ses dires. C’est ainsi qu’on a pu l’entendre inviter ses concitoyens à saisir la CRIET s’ils ont des soupçons de corruption. A-t-il consulte ses compatriotes avant de créer la CRIET ? La vérité est ailleurs et l’histoire de notre pays ne retiendra jamais ces choses imposées à un peuple qui n’aspire qu’a la paix et au développement dans la fraternité et a concorde.
Il urge donc que le Chef de l’Etat comprenne l’urgence de réunir les forces vives du pays pour engager un dialogue national véritable, non un rassemblement sélectif et cosmétique a l’image de celle d’Octobre 2019 qui a abouti à la révision de la Constitution du 11 Décembre 1990, révision nocturne qui passe mal dans l’opinion et qui n’est ni reconnu par la communauté internationale. A défaut de cette démarche avant toute élection présidentielle, il ouvrira les portes d’une crise sans précèdent et sans issus pour notre pays et endossera les lourdes responsabilités devant le peuple et l’histoire.
Basile C Noudofinin (Contribution)
Répondre à SO AGBO NI Annuler la réponse