Appelé à s’exprimer sur la prorogation du mandat du chef de l’Etat Patrice Talon pour motif de l’alignement des mandats, l’ancien président Théodore Holo apporte des clarifications. Il pense que la Cour constitutionnelle ne peut pas se déclarer incompétente pour se prononcer sur la question. Dans son intervention sur la Deutshe Welle, radio allemande d’expression francophone, il estime que la Cour de Djogbénou a méconnu la jurisprudence de 2007.
L’ancien président de la Cour constitutionnelle, Théodore Holo a rappelé que le constituant évoqué par la Cour Djogbénou dans sa décision est le constituant dérivé et non le constituant originaire. Il rappelle également que lorsque les députés ont modifié la constitution pour proroger leur mandat, porter leur mandat de quatre ans à cinq ans, la Cour constitutionnelle en 2007 ne s’est pas déclarée incompétente pour l’apprécier et déclarer cette révision contraire à la constitution. Ce qui veut dire qu’il y a déjà un précédent sur la capacité du juge constitutionnel béninois à apprécier toute révision opérée par la voie parlementaire. Selon lui, «l’exception n’est admise que pour la voie référendaire ». Et par conséquent, «le juge ne pouvait pas se déclarer incompétent d’autant plus que le président (Patrice Talon, NDLR) a prêté en 2016 le serment de respecter la constitution, de la défendre ». Et, argumente le professeur, cette constitution prévoit que son mandat en réalité devait commencer le 1er avril, c’est écrit dans la constitution.
Il rappelle que si le mandat commence désormais le 6 avril, c’est dû à des circonstances exceptionnelles. En 1991, le président Nicéphore Soglo étant malade n’a pu prêter serment que le 4 avril. En 1996, le président Kérékou a prêté serment le 4 avril mais il a omis la formule «les mânes de nos ancêtres ». La Cour saisie, a annulé le serment qui a été repris le 6 avril. Ce qui fait que désormais le mandat commence le 6 avril. Pour lui, «le président qui a été élu sur la base de cette constitution doit finir son mandat en principe le 5 avril à minuit ». Il explique que comme il y a eu une révision en 2019 même si elle est controversée, «le président qui sera élu en 2021 va prêter serment sur cette constitution révisée ». Et c’est ce président qui pourra finir son mandat au mois de mai. De son point de vue en tant que juriste, «cette disposition ne peut pas avoir un effet rétroactif par rapport au mandat du président en exercice d’autant plus qu’il n’a pas prêté serment sur une constitution qui prévoit que son mandat allait au-delà du 6 avril ».
Le professeur Théodore Holo estime que la Cour constitutionnelle aurait dû recadrer la réalité des faits puisque c’est la Cour qui est garante du respect de la constitution. Or «la constitution prévoit bel et bien que le chef de l’Etat doit respecter la constitution, doit défendre la constitution et qu’en cas de parjure, qu’il subisse les rigueurs de la loi ». Et par conséquent la Cour doit le rappeler au respect de cette exigence. Pour lui, «la Cour doit faire preuve de neutralité et d’impartialité allant jusqu’au devoir d’ingratitude pour garantir la paix sociale, la légitimité des gouvernants et la solidité des institutions ».
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