(ENQUETE) Fabrication de tam-tam : quand Adjarra perpétue une vieille tradition

La commune d’Adjarra encore appelé cité des tambours est une commune très riche dans la fabrication, la vente et l’exportation des tambours. Il s’agit d’un savoir-faire ancestral qui se perpétue de génération en génération. Au fil des ans, cet art a connu beaucoup d’évolutions aussi. Si jadis, leurs grands parents passaient des mois pour fabriquer un tam-tam, aujourd’hui il faut moins et l’activité ne manque pas d’avoir du succès.  

Le plus grand marché de la commune d’Adjarra – communément appelé marché Kpétou – à quinze minutes environ de Porto Novo reste depuis des décennies le plus grand en matière de vente de tam-tam. Elle possède tout un quartier où sont exposés des variétés de tam-tams et tambours fabriqués sur place. Outre les tambours qui jonchent les hangars et le sol, on peut apercevoir également d’autres articles notamment les pièces de rechange des vélos, des clochettes, des denrées alimentaires pour les usagers qui sont venus s’approvisionner pour leur panier. Les hangars de tambours existaient dans le marché depuis des lustres puisque dans l’ancien temps seuls des tam-tams étaient commercialisés dans ce marché mais aujourd’hui d’autres articles s’y trouvent. 

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Des origines du tam-tam

Bernard Wanvoegbe, un jeune fabriquant de tambours explique comment est créé le tam-tam « le tambour existe depuis des générations anciennes et la fabrication de perpétue de génération en génération. Nos grands parents autrefois ne fabriquaient pas le tambour pour vendre. Le tambour est fabriqué pour des cérémonies et des rituels précis. Lorsque les anciens fabriquent un tam-tam, cela peut prendre deux à trois mois ». Jean Satowakou, un autre fabriquant, la trentaine dépassée, nous expose les difficultés auxquelles ils sont confrontés dans l’approvisionnement du matériel. «  Lorsque nous sommes dans la forêt pour nous approvisionner en bois, nous sommes parfois embêtés par des forestiers. Mais nous sommes informés et nous nous préparons d’avance pour faire les formalités. Nous payons les frais d’abattage des arbres selon la grosseur de l’arbre abattu. Cela varie entre 5000 FCFA et 20.000 FCFA selon la grosseur du tronc d’arbre. C’est pareil également pour l’approvisionnement en peaux d’animaux. La différence est que cette peau que nous prenons est déjà travaillée et traitée avant l’achat. Nous prenons et nous le plongeons tout simplement dans l’eau pour être utilisé ».

Pour comprendre les conditions dans lesquels les arbres sont abattus, nous nous sommes rapprochés d’un sous-officier des eaux et forêts qui a requis l’anonymat. « Les trafiquants de bois que vous appelez vendeurs de  tam-tam sont une catégorie à part. Nous les surprenons surtout dans la forêt de Sakété, de Pobè ou d’ailleurs, il y a d’autres qui nous échappent. Par contre d’autres personnes plus correctes nous exhibent leur laissez-passer. Ceux qui n’en ont pas payent sur place des pénalités  qui vont de 5000 FCFA à 50.000 FCFA selon les cargaisons de bois qu’ils détiennent sur eux. L’amende est plus lourde lorsque nous les surprenons avec une variété d’arbre appelez la Samba. L’abattage de cette variété d’arbre est formellement interdit », explique le sous-officier des eaux et forêts. L’autre difficulté que les vendeurs de tambours ont est qu’ils sont assujettis à des patentes qu’ils payent aux agents de la mairie d’Adjarra. « Nous payons aussi nos patentes, c’est-à-dire les frais que les agents de la mairie d’Adjarra nous prélèvent. Cela varie selon la présence de ceux qui arrivent. D’autres nous prennent jusqu’à 5000 FCFA par contre d’autres nous prennent ,10.000 FCFA et même plus », informe un jeune vendeur de tam-tam.

Christophe Wanvoegbè, un sexagénaire avec des rides à la figure explique que leurs grands parents n’avaient pas de difficultés comme aujourd’hui pour s’approvisionner le bois et aussi pour la vente des tambours. En leur temps il y avait plus de la verdure et la forêt était dense. Mais aujourd’hui, avec la déforestation ils ont des difficultés pour trouver le bois de fabrication. Il faut aller parfois très loin pour s’approvisionner. Il ajoute qu’à l’avènement des églises, ça a facilité un peu les choses parce que beaucoup sont les églises qui s’approvisionnent en tambours. «  Outre les églises nous avons les artistes et des expatriés tels que les touristes blancs qui s’approvisionnent beaucoup. Aujourd’hui le marché a chuté à cause de la pandémie du Corona virus car les touristes sont rares chez nous », se désole Christophe Wanvoegbè. 

Des sacrifices pour purifier des tam-tams

La fabrication et la vente des tambours ne se fait pas au hasard. Parfois certains tambours sont sacrés et des rituels se font avant l’achat. Ces tambours sont destinés pour des cérémonies et des rituels. Plusieurs variétés de tambours existent. Il y a le Houngangbo et le Sato qui sont des tambours géants et de grand volume. La particularité selon Bernard Wanvoegbè est que «  seuls des personnes qui ne possèdent plus leur père et leur mère en vie, c’est-à-dire orphelins de père et de mère ou bien orphelins de père qui peuvent prétendre jouer à ce genre de tambour. Il a toutefois nuancé que des artistes viennent commander le Sato pour des spectacles. Mais ce Sato n’est pas fait sur la base d’un quelconque rituel.

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Variétés de tambours 

 Il existe aussi le Akonhoun utilisé pour des rituels mais aujourd’hui des églises s’en approvisionnent. Il y a également le Ahouangbahoun utilisé par les églises célestes. Il existe le Kpahloué utilisé pour le Kaka et aussi pour des cérémonies des sorties. Il y a le gangan du Nigeria, le djembé et le Adodo du Sénégal. Il existe le Agbadja utilisé pour certaines danses et aujourd’hui utilisé même par des églises. Il y a le zinlin utilisé dans la zone wémè. Il existe le bolodjo du Nigeria. Toutefois il a fait remarquer que ce n’est pas toutes les variétés de bois qui font le tambour. Il a le Azin-tin, le Tévi-tin, le akplé et autres. «  Pour réussir un tambour, la fabrication peut prendre une semaine voire un mois, cela dépend de son volume et de sa spécificité. Aussi deux catégories de peau rentrent dans la fabrication du tam-tam. Il y a la  peau de l’antilope et celle du bélier » informe Bernard Wanvoegbè. La fabrication du tambour n’est pas chose facile. Parfois il nécessite des rituels et des spécificités que parfois les usagers du marché Kpétou ignorent. 

Une réponse

  1. Avatar de La Foudre
    La Foudre

    Sacré marché de Adjara !!!
    On y trouvait les nourritures typiques de Hôgbonou….

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