Ça y est ! L’armée française et les forces Barkane-Takuba vont quitter le sol malien. Cette retraite, les populations maliennes l’ont exigée, obtenue et célébrée le weekend dernier dans les rues de Bamako. Le vœu cher aux panafricanistes notamment la Camerounaise Nathalie Yamb qui appellent « au démantèlement des bases militaires françaises qui sous le couvert d’accords de défense bidons ne servent qu’à piller les ressources, l’entretien de rébellion, l’entraînement de terroristes et de maintien de dictature à la tête de nos état », ce vœu s’est enfin réalisé.
La junte militaire au pouvoir l’a réclamé et obtenu en invitant les forces françaises à partir « sans délai » et sous sa supervision. Finalement la France l’a acté jugeant désormais impossible de coopérer avec les autorités maliennes après plus de neuf ans de présence dans ce pays. L’annonce de ce retrait le jeudi dernier n’a pas été une surprise quand on se réfère à l’escalade de la rhétorique entre les deux parties, ses dernières semaines. La France s’est donnée quatre à six mois pour se redéployer au Niger et dans les pays du Golfe de Guinée qui le souhaitent. Et déjà, les autorités maliennes crient à la victoire. C’est David qui a vaincu Goliath.
Une victoire avec en toile de fond, les impacts des lourdes sanctions imposées par la CEDEAO notamment le renchérissement du prix des denrées alimentaires sur les marchés, la baisse du pouvoir d’achat, le blocage des avoirs du pays et l’interdiction des transferts de fonds. A cela, viendra s’ajouter la disparition des activités commerciales qui s’étaient formées autour des bases militaires et qui permettaient aux populations des alentours de tirer des revenus substantiels. Malheureusement, ce vœu ne se réalisera qu’en partie. Bien sûr, l’armée française s’en va du Mali, mais la France elle-même reste. Car, depuis les indépendances, elle a anticipé ce genre de situation en instaurant dans ses anciennes colonies, des mécanismes de dépendance qui ne nécessitent pas toujours une occupation militaire.
L’indépendance dans la dépendance
La réalité est là et elle crève les yeux. Le cordon ombilical qui lie la France avec le Mali ainsi que ses anciennes colonies ne peut pas se couper aussi facilement que l’on le croit. En effet, les politiques de coopération, d’aides financières et techniques, les organisations non gouvernementales, la francophonie etc, sont des outils matériel, culturel et psychologique de ce mécanisme de dépendance qui ne s’en iront pas avec l’armée française dans sa retraite.
Aussi, le pacte colonial imposé par la France à ses anciennes colonies, selon lequel ces dernières ne peuvent importer que les produits provenant de la métropole et ne doivent exporter que vers celle-ci, est toujours en vigueur, même si l’entrée en compétition de la Chine et de certains autres pays, vient amoindrir l’impact. Au Mali, plus de la moitié des neuf plus grandes entreprises est française. Orange Mali branche de la maison-mère Orange France, est le premier opérateur mobile de ce pays avec 60% du marché. La société des ciments et des matériaux, la DCIM, filiale de BNP Paribas, CFAO motors, Catek, EGCc international, Edificare pour ne citer que ces entreprises sont toutes françaises et elles ne partiront pas avec l’armée française. Vinci, Total, Bouygues et Bolloré sont en place.
Le franc CFA et le dépôt à terme des réserves du pays sont jusqu’à l’heure actuelle détenus par la France. En 2019, la France à travers son agence de développement a financé plusieurs projets dont la construction d’infrastructures routières, des écoles, des centres de santé pour un montant de 65 milliards de FCFA selon le rapport de cette structure. Selon les mêmes sources, 8592 Français vivent et travaillent au Mali. Ceux-ci ne sont pas prêts à quitter le Mali. Pour un vrai changement, il reste encore à faire; Et la Chine, la Turquie ou la Russie qui s’investissent actuellement en Afrique et sur lesquels les autorités maliennes comptent pour remplacer la France ne sont pas des philanthropes.
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