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Bénin : le système partisan à la croisée des chemins

Les dés sont désormais jetés. Le parti La Nouvelle Alliance (LNA) vient d’avoir une existence légale. La formation politique fondée le 16 octobre 2021 à Parakou par l’ancien ministre de Boni Yayi, Théophile Yarou et un groupe de dissidents du parti Forces cauris pour un Bénin émergent (FCBE) vient de recevoir du ministère de l’intérieur, son récépissé définitif et peut désormais participer à l’animation de la vie politique béninoise. Depuis la mise en œuvre des réformes politiques par le régime de la Rupture, c’est le 17ème parti politique qui vient ainsi d’être créé en moins de quatre ans. Parmi les autres préexistants on peut citer le Bloc républicain (BR), l’Union Progressiste (UP), tous deux proches du pouvoir en place.

Les Démocrates, la FCBE et plusieurs autres de leur côté, se réclament de l’opposition. Ce nombre croissant de partis politiques peut même évoluer dans les mois et les années à venir compte tenu des circonstances dans lesquelles ils sont souvent créés et les intérêts du moment que défendent leurs dirigeants. Lorsqu’on prend en exemple les deux partis de la mouvance, on peut imaginer qu’ils risquent de voler en éclats lorsque leur initiateur Patrice Talon ne sera plus au pouvoir. Leurs dirigeants ne se sont pas mis ensemble nécessairement autour d’une même idéologie ou pour défendre les mêmes valeurs. Ce sont des hommes et des femmes qui pendant longtemps n’accordaient pas leur violon sur des sujets mais qui, par la force des choses cohabitent difficilement.

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En témoigne, le combat à fleurets mouchetés que se livrent le ministre Abdoulaye Bio Tchané et le député Wallys Zoumarou par médias interposés depuis quelques jours. Ou encore la suspension dont le ministre Jean-Michel Abimbola a été l’objet au BR. Les dissensions notées entre le président Bruno Amoussou et certains membres de l’UP sont également éloquents. En réalité, la nouvelle prolifération des partis politiques vient tout simplement remettre en cause les raisons fondamentales qui sous-tendent les réformes politiques entreprises par le président Patrice Talon. L’idée émise au départ selon laquelle il faut créer deux ou trois grands regroupements politiques au Bénin est aujourd’hui battue en brèche et montre à ne plus en douter, l’échec de la politique de zéro prolifération des partis politiques au Bénin prônée par le régime de la Rupture.

Au Bénin, la volonté du gouvernement de réduire le nombre de partis politiques dans le pays poursuivait un but légitime : on en compte plus de 200 partis après l’instauration du multipartisme en 1990. Les raisons de cette prolifération sont souvent d’ordre financier qui conduisent à l’instabilité gouvernementale, à l’émiettement de la représentation politique au parlement ou encore la multiplication de candidatures à l’élection présidentielle. En réalité tous ces partis politiques n’existent que sur le papier. Plusieurs ne sont pas opérationnels et ne participent même pas à une quelconque élection. Ils ont été créés la plupart du temps par des hommes nommés au gouvernement et ils ont disparu avec leur créateur dès que celui-ci est éjecté de son poste. Les exemples sont légions et il serait superflu ici d’en citer. Certes, il y avait 200 partis enregistrés, mais ceux qui ont animé la vie politique jusqu’à avant les élections de 2016 se comptent du bout des doigts et ont pour noms : Prd,Rb, Fard-Alafia, Psd et les alliances de partis FCBE, Un.

L’argument de la prolifération de partis politiques avancé par certains pour justifier les réformes politiques montre ses limites. Pour réduire le nombre de partis politiques, le régime de la rupture aurait eu de meilleurs résultats sans difficulté tout simplement en appliquant strictement les dispositions de l’ancienne charte des partis. Celle-ci stipulait entre autres que les partis politiques doivent tenir régulièrement leurs congrès statutaire, participer aux scrutins électoraux. Au cas contraire, ils sont purement et simplement dissous. Ces critères suffisent à eux seuls à purger la liste de partis politiques enregistrés au ministère et aurait permis d’assainir le paysage politique béninois. De même, les événements malheureux issus de l’application des réformes et la crise politique qui s’en sont suivis auraient pu être ainsi évités. En Occident, notamment aux États-Unis, en France, le législateur n’a pas eu besoin de recourir à des lois pour limiter les partis politiques. Les plus grands se sont tout simplement imposés aux plus petits. C’est la loi de la nature. Elle s’applique aussi en politique.

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