, , , ,

Bénin: nécessité de faire plus d’ouverture et de concessions

Les festivités du 1er août 2022 ont présenté à la face du monde un Bénin plus uni et plus désirable. Cette décrispation observée doit être poursuivie et renforcée par d’autres concessions. Le chef de l’Etat semble être sollicité comme le porteur d’eau qui va éteindre définitivement l’incendie qui dévore la maison Bénin. Un Patrice Talon qui saute tel un amoureux dans les bras du patriarche Nicéphore Soglo. Quelques secondes après, le voilà encore tout souriant et échangeant en toute complicité avec son prédécesseur Boni Yayi.  Puis après, on vit ce dernier deviser avec Bruno Amoussou tout souriant.

Toutes ces images de grande émotion ont été projetées sur le petit écran et suivies avec grande satisfaction par la grande majorité des Béninois qui découvrent ce génie de leurs dirigeants à se mettre au-dessus de leurs divergences et de leurs égos du moment. Ces images sont inédites. Depuis 2016, c’est la première fois que les festivités du 1er août réunissent autant d’icônes politiques conversant entre eux sans retenue. Il y a seulement trois mois, il était presque impossible pour maints béninois d’y croire. Tant les divergences, les inimitiés et la vendetta étaient les choses les plus partagées au Bénin. Qui pouvait donc croire à ce qu’un Boni Yayi puisse accepter l’invitation de Patrice Talon alors qu’il a été retenu dans sa résidence en 2019 pendant plus de 50 jours? Qui pouvait imaginer Nicéphore Soglo  échangé avec Patrice Talon qu’il ne manque aucune occasion de critique. Mais Patrice Talon a courageusement entrepris de les rencontrer, de discuter avec eux et de faire d’eux des partenaires.

Il a également libérer une bonne trentaine de « prisonniers politiques ». Tout ceci a redonné confiance à certains acteurs politiques qui croient aux promesses de paix et d’ouverture de Patrice Talon. Le chef de l’Etat lui doit se frotter les mains car son plan semble bien marcher puisque jusque là, les deux anciens présidents ne le boudent plus comme avant. Au-delà des promesses qu’il a dû faire et des engagements qu’il a pu prendre pour les avoir à ses côtés, il faut reconnaître que Patrice Talon a réussi un coup politique qu’il convient de souligner. Car, au plan politique et stratégique, les rapprochements de ces deux personnalités de la scène politique avec le Président de la République étouffent une bonne partie de la contestation politique contre lui et tétanisent les pyromanes dans leurs élans de rébellion. Talon aura donc réussi un grand coup.

Aller plus loin

Mais les images venues du boulevard de la Marina ce 1er août ne pourront pas suffire à elles seules pour panser toutes les blessures laissées par les différents agissements politiques observés depuis 2016. Car, au-delà des deux anciens présidents de la république, il reste plusieurs autres personnalités politiques qui ruminent de profondes frustrations et qui en veulent au pouvoir de la rupture. Exilés politiques ou simples fugitifs qui veulent échapper à la justice de leur pays, Lehady Soglo, Sébastien Adjavon, Komi Koutché, Martin Rodriguez et bien d’autres sont de véritables patates chaudes qui brûlent un peu les gorges de Patrice Talon. Au-delà, ils sont tous détenteurs de portions incongrues de ce peuple détenteur de la souveraineté nationale. Lorsqu’ils se sentent persécutés, ceux qui leur font allégeance ressentent les mêmes souffrances.

Peut-on parler de décrispation du retour à une paix durable si les deux prisonniers les plus populaires du Bénin que sont Joël Aivo et Reckya Madougou restent toujours dans les geôles ? Leurs emprisonnements ont tellement secoué de cocotiers qu’on se demande si leurs libérations ne sont pas la clé de la réconciliation nationale. Des rives de la Seine, des chancelleries occidentales que des Palais présidentiels de l’Afrique Subsaharienne, des voix s’élèvent pour dénoncer leurs détentions que beaucoup qualifient d’arbitraires et politiques. Pourtant, ces deux cas sont l’arbre qui cache la forêt. Des centaines d’autres Béninois croupissent dans les prisons pour avoir posé des actes politiques de contestation du pouvoir requalifiés et lourdement punis. Au regard de tout ça et de tous les actes attentatoires au vivre ensemble et à la cohésion nationale, tous les acteurs politiques sont appelés à faire des concessions et à donner des gages d’ouverture et de dialogue.  Mais le chef de l’Etat est appelé à plus d’engagement. Eric Houndété, Président du parti « Les Démocrates » a rappelé habilement au chef de l’Etat à la fin du défilé la nécessité d’un dialogue politique sincère et inclusif. Il doit être, en sa qualité de garant de l’unité nationale et de paix, le premier porteur d’eau pour éteindre l’incendie qui dévore notre pays.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *