En Tunisie, la contradiction est frappante : d’une part, le pays manifeste un accueil glacial envers les étrangers subsahariens, marqué par des épisodes récurrents de violence et de chasse à l’homme ; d’autre part, il déploie des efforts considérables pour attirer les investissements de ces mêmes régions. Cet écart entre les politiques migratoires et les ambitions économiques internationales se trouve au cœur des débats lors des événements majeurs comme le Forum International Tunisien sur l’Investissement en Afrique (FITA), qui a récemment réuni 2 000 délégués de 65 pays à Tunis. L’événement a été une vitrine pour la Tunisie, aspirant à se positionner en tant que hub économique dans le reste de l’Afrique tout en tentant de laver l’affront des violences contre les Africains subsahariens.
L’édition 2024 du FITA a été marquée par une ouverture multilingue, un signe clair de la volonté de Tunis de renforcer ses liens avec les autres pays du continent africain et de réparer son image. Nadia Yaich, l’organisatrice de l’événement et expert-comptable, souligne l’intérêt croissant des Tunisiens pour le continent malgré un contexte politique difficile. Elle admet à demi-mot que les récents actes de violence et les déportations d’immigrés ont terni l’image du pays, mais reste optimiste quant à la capacité de la Tunisie à renforcer ses relations historiques et économiques avec l’Afrique.
Le secteur de la construction en Tunisie, représenté par des figures comme Dora Aloui Bellagha, directrice commerciale à la Société nationale immobilière de Tunisie, voit dans le FITA une occasion de se développer davantage sur le continent africain, notamment en Afrique subsaharienne où les besoins en logements sociaux sont importants. En parallèle, la Côte d’Ivoire, qui attire déjà une significative présence tunisienne avec 250 entreprises implantées, est un exemple de la dynamique économique entre la Tunisie et les pays subsahariens.
Néanmoins, malgré cet enthousiasme pour les opportunités économiques, les participants du FITA expriment des frustrations liées aux lourdeurs administratives et aux obstacles à l’accès aux financements, qui freinent les investissements et la collaboration économique. Ces défis sont exacerbés par la perception négative due aux mauvais traitements infligés aux migrants subsahariens, un sujet de préoccupation récurrent qui revient dans les discussions entre partenaires africains.
L’écart entre la politique migratoire hostile et les efforts d’intégration économique en Tunisie soulève des questions cruciales sur la cohérence des politiques publiques. Si la Tunisie souhaite véritablement se positionner comme un partenaire économique majeur sur le continent à l’instar d’autres pays, elle devra résoudre ces contradictions internes et créer un environnement respectueux pour tous les Africains, qu’ils soient migrants ou investisseurs. Ce double discours pourrait, à terme, compromettre les ambitions du pays sur la scène africaine et internationale.
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