L’Alliance des États du Sahel (AES), créée le 16 septembre 2023, est née dans un contexte particulier marqué par des transitions politiques au Mali, au Burkina Faso et au Niger. Cette organisation régionale, initialement formée pour répondre à des défis sécuritaires communs et promouvoir une coordination entre ces trois pays, pourrait connaître une expansion significative avec l’intérêt manifesté par le Togo pour une éventuelle adhésion.
La création de l’AES s’inscrit dans une dynamique de recomposition géopolitique en Afrique de l’Ouest. Face aux défis sécuritaires persistants dans la bande sahélienne, les trois États fondateurs ont choisi de mutualiser leurs efforts en matière de défense et de développement économique. Cette alliance s’est progressivement structurée autour d’objectifs de coopération militaire et de développement des échanges commerciaux.
Une reconfiguration géopolitique aux enjeux multiples
Dans une interview accordée à VoxAfrica le 16 janvier, Robert Dussey, ministre des Affaires étrangères du Togo, a évoqué une possible adhésion de son pays à l’AES. Cette éventualité, qui selon le ministre devrait être soumise au parlement pour approbation, pourrait bénéficier d’un soutien populaire. Au cours de cet entretien, le chef de la diplomatie togolaise a également exprimé son appréciation du leadership malien dans la région.
Cette éventuelle orientation diplomatique s’inscrirait dans la continuité des relations que le Togo entretient avec les nations sahéliennes. Le pays a déjà joué un rôle d’intermédiaire dans plusieurs situations de tension régionale. Sa participation à des manÅ“uvres militaires conjointes avec les forces de l’AES et du Tchad au printemps 2024 illustre cette dynamique de coopération.
Si cette adhésion se concrétisait, elle pourrait avoir des implications stratégiques importantes. Les infrastructures portuaires togolaises constituent déjà un atout pour les pays enclavés du Sahel. Le port autonome de Lomé sert actuellement de plateforme logistique pour le Niger, qui l’utilise pour ses échanges commerciaux internationaux.
Les défis de l’intégration régionale ouest-africaine
Pour la CEDEAO, cette éventualité soulève plusieurs questions structurelles. L’intérêt manifesté par le Togo pourrait influencer la position d’autres États membres. L’organisation sous-régionale devrait alors repenser ses mécanismes institutionnels face à l’émergence de nouvelles alliances. La question de la compatibilité entre les différentes appartenances régionales se poserait également, notamment concernant l’UEMOA dont le Togo est membre.
L’architecture institutionnelle ouest-africaine pourrait entrer dans une phase de transformation. La possible coexistence de différentes organisations régionales nécessiterait une réflexion sur leur articulation et leur complémentarité. La CEDEAO pourrait être amenée à envisager une révision de ses mécanismes de fonctionnement pour mieux répondre aux attentes de ses États membres. L’enjeu serait de maintenir la cohésion régionale tout en permettant des coopérations flexibles entre États.
Les perspectives d’évolution de cette situation dépendront de plusieurs facteurs. La réponse de la CEDEAO et sa capacité à s’adapter aux nouvelles dynamiques régionales joueront un rôle crucial. Une possible multipolarité régionale pourrait redéfinir les équilibres en Afrique de l’Ouest.
Cette situation invite à une réflexion sur l’avenir de l’intégration régionale en Afrique de l’Ouest. La capacité des différentes organisations à coexister et à coordonner leurs actions pourrait devenir un élément clé pour la stabilité et le développement de la région. Les déclarations du ministre togolais des Affaires étrangères illustrent les dynamiques de recomposition possibles dans l’espace ouest-africain, ouvrant potentiellement la voie à de nouveaux modèles de coopération régionale.
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