Pendant des mois, Alger a multiplié les démarches diplomatiques, économiques et symboliques pour rejoindre le cercle restreint des BRICS, cet ensemble composé initialement du Brésil, de la Russie, de l’Inde, de la Chine et de l’Afrique du Sud. L’Algérie, riche en ressources énergétiques mais toujours à la recherche d’une diversification économique, voyait dans cette adhésion une occasion de s’extirper de la dépendance aux hydrocarbures et de se positionner comme un acteur influent du Sud global.
Pour y parvenir, elle a brandi sa stabilité relative, son rôle stratégique en Méditerranée et son potentiel énergétique. Des gestes significatifs ont accompagné cette ambition : échanges diplomatiques renforcés, partenariats économiques accrus avec les membres actuels, et discours appuyés sur la souveraineté économique du Sud. Mais en août 2023, à Johannesburg, le rêve se heurte à une réalité brutale : le Brésil, soutenu par l’Inde, oppose un veto à la candidature algérienne, estimant que le pays ne remplit pas les critères économiques attendus. Une gifle diplomatique à peine voilée, qui a laissé des traces profondes dans la mémoire politique algérienne.
Des retrouvailles sous tension
Le Forum d’affaires Algérie-Brésil s’est tenu ce mardi, dans un grand hôtel d’Alger. Si l’événement met en lumière la volonté affichée de coopération économique, il n’échappe pas à l’ombre portée par l’épisode du sommet de Johannesburg. La présence des entreprises brésiliennes – opérant dans l’aéronautique, l’automobile, l’agroalimentaire… – illustre un engagement certain côté brésilien. Les institutions des deux pays, parmi lesquelles le Conseil algérien du renouveau économique (CREA), le ministère brésilien des Relations extérieures, l’agence ApexBrasil ou encore la Chambre de commerce arabo-brésilienne, ont œuvré ensemble pour donner corps à cette rencontre.
Cependant, dans les couloirs du forum, les esprits n’ont pas oublié que c’est ce même Brésil, désormais à la présidence tournante des BRICS, qui avait mis un frein à l’aspiration algérienne. Les motifs avancés à l’époque – notamment un produit intérieur brut par habitant jugé insuffisant et une économie trop centrée sur les hydrocarbures – continuent d’alimenter les discussions à voix basse. La coopération bilatérale, bien que réelle, semble ainsi traversée par une tension diffuse, entretenue par la mémoire encore vive du rejet.
Entre diplomatie économique et calculs politiques
La participation active des entreprises brésiliennes à Alger pourrait s’interpréter comme un geste de normalisation ou comme une tentative de dissocier les relations commerciales des considérations politiques. Du côté algérien, l’accueil réservé à cette délégation témoigne aussi d’une volonté de maintenir les canaux économiques ouverts, tout en gardant à l’esprit les limites de cette collaboration.
L’impression qui se dégage de cette rencontre est celle d’un dialogue prudent, où l’intérêt mutuel cohabite avec une forme de réserve. La rancune, si elle ne s’exprime pas ouvertement, affleure dans les commentaires, les comparaisons. La dynamique actuelle rappelle que dans les rapports internationaux, les décisions institutionnelles laissent rarement les relations indemnes. Le Forum d’Alger, au-delà de ses annonces économiques, illustre la complexité d’un partenariat où le souvenir d’un revers diplomatique continue de peser sur l’élan de la coopération.
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