Premières arrestations dans une affaire de corruption évoquée par l’ancien garde des sceaux au Sénégal

Des policiers sénégalais - photo John Wessels / AFP

Alors que les accusations de corruption portées contre l’ancien ministre de la Justice Ismaïla Madior Fall continuaient de faire couler de l’encre, un tournant inattendu est survenu ce week-end avec l’arrestation de deux hommes par la Division des Investigations Criminelles (DIC). Cheikh Guèye, promoteur immobilier, et Mohamed Anas El Bachir Wane, ex-directeur des constructions au ministère de la Justice et actuel dirigeant de TCS selon le journal l’Observateur. Ils ont été interpellés après avoir mis en cause l’ancien Garde des Sceaux dans une affaire liée à l’attribution d’un marché public.

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Quelques jours auparavant, Ismaïla Madior Fall déclarait dans une interview avoir reçu 50 millions de francs CFA de la part de Cheikh Guèye, qu’il affirme avoir ensuite restitués, préférant, selon ses mots, « gérer la situation avec diplomatie ». Ce détail, loin de clore le débat, avait au contraire attiré l’attention sur les relations opaques qui peuvent exister entre acteurs publics et promoteurs privés dans le cadre de projets d’État.

Un projet de bracelet électronique au cœur de l’affaire

Le litige trouve son origine dans un protocole d’accord autour de la construction d’un centre de surveillance électronique pour détenus, basé sur l’usage de bracelets connectés. Ce centre devait être implanté sur un terrain initialement destiné à la réalisation du tribunal de Pikine-Guédiawaye. Le promoteur Cheikh Guèye affirme avoir été sollicité pour verser la somme de 250 millions de francs CFA afin d’obtenir la signature du protocole par le ministre de la Justice de l’époque. Ce chiffre, avancé dans son témoignage, a rapidement attiré l’attention de la presse et de l’opinion publique, soulevant des questions sur les mécanismes d’attribution des marchés dans un secteur aussi stratégique que celui de la justice.

Le projet, à première vue novateur, destiné à désengorger les prisons en modernisant les modalités de détention, devient désormais le théâtre d’un affrontement judiciaire. La transformation d’un chantier judiciaire en champ d’accusations réciproques jette une ombre sur l’ambition initiale. Cette affaire soulève également une interrogation : dans quelle mesure les innovations institutionnelles peuvent-elles être mises à mal par des pratiques informelles persistantes ?

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Une enquête en marche, des implications encore floues

L’arrestation de Cheikh Guèye et de Mohamed Anas El Bachir Wane, loin de trancher définitivement la question de la culpabilité de chacun, ouvre une phase délicate de l’enquête. Ce développement, s’il peut apparaître comme un renversement des rôles, oblige à reconsidérer le traitement des témoignages dans les affaires sensibles, notamment lorsqu’ils impliquent des anciens membres du gouvernement. Il s’agit maintenant pour la DIC d’établir si les déclarations des deux hommes relèvent d’une dénonciation fondée ou d’une tentative de manipulation.

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