Depuis la normalisation de leurs relations diplomatiques en 2020 dans le cadre des accords d’Abraham, le Maroc et Israël n’ont cessé de renforcer leur coopération dans plusieurs domaines stratégiques. Du renseignement à la cybersécurité, en passant par l’agriculture et la défense, les deux pays ont multiplié les partenariats et les visites de haut niveau. Cette entente, jadis inimaginable dans le paysage géopolitique nord-africain, semble aujourd’hui s’étendre à l’un des secteurs les plus sensibles : la vente d’armement de haute technologie. Dans cette dynamique, une transaction majeure retient désormais l’attention : l’acquisition potentielle de chasseurs furtifs américains F-35 par le Maroc, avec l’aval de l’État hébreu.
Des F-35 pour Rabat : un saut technologique
Le Maroc avance à grands pas vers l’acquisition du F-35A, l’un des avions de chasse les plus avancés au monde. Selon un média anglophone, le royaume aurait récemment obtenu l’accord d’Israël pour l’achat de 32 appareils ce 11 juin. Cette autorisation, cruciale en raison du rôle d’Israël dans les processus d’exportation de ce type d’armement, représente une étape clé. Si la transaction se concrétise, elle pourrait atteindre près de 17 milliards de dollars sur 45 ans, et placerait le Maroc parmi les rares pays à disposer de cette technologie de pointe.
Lors du dernier salon international de défense IDEX, des représentants de Lockheed Martin ont présenté les caractéristiques du F-35 à une délégation marocaine. Cet avion de chasse ultramoderne, conçu par l’industriel américain, est bien plus qu’un simple appareil de combat : il peut mener des missions d’attaque, de surveillance et de guerre électronique, tout en restant très difficile à détecter grâce à sa furtivité. Cette présentation aurait marqué les esprits côté marocain, dans un contexte où les menaces régionales poussent le pays à moderniser son armée.
Israël, acteur discret mais décisif
Le rôle d’Israël dans cette affaire illustre une réalité souvent méconnue du grand public : bien que les avions soient fabriqués aux États-Unis, Israël détient une influence stratégique sur leur commercialisation vers certains pays. Cette influence découle à la fois de son partenariat technologique avec Lockheed Martin — Israël ayant été le premier pays à intégrer des systèmes locaux dans ses propres F-35 — et de ses intérêts géopolitiques au Moyen-Orient et en Afrique du Nord.
L’approbation israélienne à cette vente au Maroc pourrait donc être perçue comme un geste de confiance, mais aussi comme une forme de garantie : en autorisant cette transaction, Tel-Aviv s’assure que l’équilibre militaire dans la région reste conforme à ses propres intérêts de sécurité. C’est aussi une manière pour Israël de consolider son influence dans une région traditionnellement éloignée de ses alliances historiques.
Une course régionale à l’armement relancée
L’intérêt du Maroc pour les F-35 intervient dans un contexte où plusieurs pays du Maghreb revoient à la hausse leurs investissements militaires. En toile de fond, les tensions latentes avec l’Algérie, la présence croissante d’acteurs étrangers en Méditerranée, et les incertitudes liées aux conflits sahariens nourrissent une volonté de montée en puissance technologique. Pour Rabat, s’équiper d’une flotte de chasseurs furtifs, c’est non seulement garantir une supériorité aérienne régionale, mais aussi renforcer son rôle de partenaire stratégique pour les États-Unis et Israël dans le flanc ouest de l’Afrique.
Une telle commande aurait également des retombées économiques et diplomatiques importantes. Elle pourrait ouvrir la voie à de nouveaux transferts de technologies, à une coopération accrue en matière de formation militaire, voire à l’installation de chaînes logistiques locales pour la maintenance de ces appareils. À moyen terme, elle pourrait redessiner les rapports de force dans une région déjà marquée par de multiples foyers d’instabilité.
Alors que le Maroc semble se rapprocher d’une étape décisive dans cette acquisition, les regards se tournent vers Washington, seul détenteur de la décision finale. Mais une chose est claire : avec l’appui d’Israël, les ambitions militaires du royaume ne se contentent plus d’un rôle d’observateur dans le ciel maghrébin — elles visent à y imposer une présence dominante, furtive et résolument tournée vers l’avenir.
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