Depuis des décennies, la stratégie militaire américaine repose sur un vaste réseau de bases réparties aux quatre coins du globe. Ce dispositif permet aux États-Unis de maintenir une capacité d’intervention rapide, de projeter leur puissance militaire et de sécuriser des zones jugées névralgiques. Pour les pays hôtes, l’installation de bases américaines s’accompagne souvent d’avantages économiques, d’un renforcement de la coopération sécuritaire, et d’une visibilité accrue sur l’échiquier géopolitique. Ainsi, les alliances peuvent se redessiner rapidement, selon les équilibres stratégiques ou les tensions diplomatiques du moment. Mais un débat inattendu refait surface : le Maroc pourrait-il accueillir prochainement des bases militaires américaines transférées depuis l’Espagne ?
Maroc–États-Unis : un partenariat militaire en pleine accélération
Les liens militaires entre Rabat et Washington se renforcent année après année. Selon le journal La Razon, des membres des Forces armées royales marocaines se sont rendus à la base américaine de Baumholder, en Allemagne, où ils ont participé à une formation sur le système de défense aérienne Patriot, utilisé au sein de l’OTAN pour intercepter les menaces aériennes à longue portée. Cet exercice ne relève pas d’un simple échange bilatéral ; il reflète un degré de confiance élevé entre les deux partenaires, et suggère une volonté américaine de consolider la posture du Maroc en tant qu’allié stratégique sur le flanc sud de la Méditerranée.
Cette collaboration technique et opérationnelle prend d’autant plus de relief que certains responsables américains s’interrogent publiquement sur l’intérêt de maintenir leurs installations militaires actuelles en Espagne. En réponse à une publication du président Donald Trump sur X, dénonçant le manque d’engagement de Madrid vis-à-vis des dépenses de l’Alliance atlantique, le général Robert Greenway a proposé publiquement de déplacer les installations militaires américaines de Rota et de Morón vers le Maroc, qu’il considère comme un partenaire plus coopératif. Cette déclaration fait écho à un courant de pensée plus large aux États-Unis, favorable à une révision des implantations militaires en Europe.
Des tensions transatlantiques à l’ouverture d’un scénario africain
L’hypothèse d’un redéploiement des bases américaines n’est pas anodine. Rota et Morón jouent un rôle central dans les opérations navales et aériennes américaines en Méditerranée et en Afrique du Nord. Cependant, la dégradation des relations entre Washington et Madrid, alimentée par des désaccords budgétaires au sein de l’OTAN, pourrait servir de catalyseur à une réorientation partielle des forces vers un partenaire perçu comme plus aligné.
Le Maroc, qui accueille déjà le plus grand exercice militaire du continent africain – l’African Lion, organisé conjointement avec les États-Unis – dispose d’infrastructures susceptibles d’être modernisées ou étendues pour répondre aux besoins logistiques d’une telle relocalisation. De plus, la position géographique du royaume, à la fois proche de l’Europe et tournée vers le Sahel, en fait une plateforme de projection idéale pour les intérêts américains dans la région.
Cette évolution pourrait également permettre aux États-Unis de renforcer leur présence sur le continent africain sans dépendre d’États européens parfois réticents à l’égard de leur stratégie de défense. Quant au Maroc, l’accueil d’installations américaines permanentes renforcerait son statut d’allié majeur non-membre de l’OTAN, déjà reconnu par le Département d’État américain, et lui offrirait un levier supplémentaire dans ses négociations régionales.
Une hypothèse plausible, mais pas encore actée
Si la déclaration du général Greenway a lancé le débat, elle ne constitue en rien une décision officielle. Pour qu’un tel transfert se concrétise, plusieurs obstacles devront être surmontés, notamment d’ordre diplomatique, juridique et logistique. Le repositionnement d’une base militaire implique des investissements colossaux, une coordination étroite avec le pays hôte et une validation à haut niveau du Pentagone. Par ailleurs, toute décision de ce type devra tenir compte des réactions espagnoles, européennes et africaines, car elle redessinerait les équilibres militaires régionaux.
Néanmoins, les signaux d’un rapprochement militaire entre les États-Unis et le Maroc se multiplient. Si cette dynamique se poursuit, le royaume pourrait devenir bien plus qu’un simple partenaire régional : un pilier stratégique pour la défense américaine en Afrique du Nord et au-delà. Le déplacement potentiel de bases militaires ne serait alors qu’un prolongement logique d’une alliance qui ne cesse de se resserrer.
Laisser un commentaire