Le secteur portuaire constitue un maillon essentiel des chaînes logistiques mondiales et représente un facteur déterminant de croissance économique pour les nations. Ces infrastructures stratégiques assurent environ 90% du commerce international et génèrent des retombées considérables en termes d’emplois, de développement industriel et d’attraction des investissements étrangers. Les ports modernes ne se limitent plus à leur fonction traditionnelle de transit des marchandises, mais évoluent vers des plateformes multimodales intégrées, connectant les flux maritimes, terrestres et ferroviaires. Cette évolution transforme les espaces portuaires en véritables catalyseurs de développement territorial, créant des écosystèmes économiques dynamiques qui rayonnent bien au-delà de leurs périmètres géographiques immédiats.
Une transformation stratégique ambitieuse
L’Algérie engage une mutation profonde de son système portuaire avec sa stratégie à l’horizon 2035. Cette démarche vise à repositionner le pays comme hub logistique régional et intermodal, rompant avec les contraintes structurelles actuelles. Le groupe Serport, sous la direction de M. Abdelkrim Ghezal, orchestre cette transformation en privilégiant la construction d’infrastructures nouvelles situées hors des zones urbaines denses.
Les ports algériens actuels souffrent de limitations techniques majeures : tirants d’eau insuffisants, linéaires de quais sous-dimensionnés et connexions intermodales défaillantes. Ces déficiences structurelles constituent autant d’obstacles à l’optimisation des flux et à la compétitivité régionale. La réponse stratégique consiste à développer des installations portuaires de nouvelle génération, intégrant les technologies de pointe et répondant aux standards internationaux les plus exigeants.
L’émergence de corridors logistiques structurants
La stratégie 2035 s’articule autour de trois corridors logistiques majeurs, transformant la géographie économique du pays. Le corridor central établit une liaison stratégique avec la route transsaharienne et le réseau ferroviaire, créant un axe Alger-Tamanrasset qui ouvre l’accès vers cinq pays africains jusqu’à Lagos. Cette connexion continentale exploite l’avantage comparatif de l’Algérie, qui dispose d’infrastructures de base parmi les plus modernes d’Afrique.
Le corridor oriental s’appuie sur le port de Djen Djen, destiné à devenir un hub méditerranéen de premier plan. Sa position géographique stratégique, à proximité des grandes routes maritimes reliant l’Asie à l’Europe et aux États-Unis via le canal de Suez, lui confère un potentiel exceptionnel. L’extension en cours doublera sa capacité à 2 millions d’EVP et 10 millions de tonnes de marchandises, avec un tirant d’eau de 20 mètres autorisant l’accueil des navires de dernière génération.
Le projet de port central à Boumerdès
Un nouveau port central émergera entre Cherchell et Boumerdès, avec une probabilité forte d’implantation dans la région de Dellys ou Cap Djinet. Cette infrastructure vise à désengorger les ports existants et à renforcer la desserte du centre du pays. Son positionnement géographique optimisera les flux de marchandises et réduira les pressions sur les installations actuelles.
Transition vers des ports « Green and Smart »
La dimension environnementale occupe une place centrale dans cette stratégie de modernisation. L’Algérie, premier producteur africain de GNL, ambitionne de devenir un leader dans l’approvisionnement en carburants propres pour la navigation internationale. Le groupe Serport développe des partenariats avec Naftal et Sonatrach pour intégrer des solutions énergétiques propres, collaborant également avec l’Organisation maritime internationale pour développer des ports « Green and Smart ».
Cette transition énergétique s’accompagne de l’adoption de sources renouvelables – solaire et autres – conformément aux normes internationales en matière d’énergie verte. Les nouveaux ports intègreront des technologies de numérisation avancées, créant des écosystèmes « hyperconnectés, décarbonés et intelligents ».
Optimisation opérationnelle et performance
L’amélioration des performances constitue un objectif prioritaire de cette stratégie. L’objectif fixé vise à réduire le nombre de navires en attente à moins de six par port, contre des délais actuellement pénalisants. Seuls quatre ports – Annaba, Djen Djen, Oran et Skikda – disposent aujourd’hui de quais à fort tirant d’eau nécessaires aux navires modernes.
Les performances de manutention progressent déjà sensiblement. Le port de Béjaïa, géré par un opérateur singapourien, atteint 20 conteneurs à l’heure contre 10 dans les autres installations. Oran, équipé de nouveaux portiques depuis juillet 2024, devrait atteindre 30 conteneurs à l’heure. Ces améliorations techniques permettront aux nouveaux terminaux de Djen Djen et d’Oran de rivaliser avec les meilleurs ports régionaux.
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