Depuis le 29 mai, Ousmane Sonko arpente l’Afrique de l’Ouest à la recherche de convergences économiques. Après une étape remarquée en Côte d’Ivoire, c’est à Conakry qu’il a posé ses valises, accueilli au Palais de la Colombe par le Premier ministre guinéen Amadou Oury Bah. À travers cette séquence diplomatique, le Premier ministre sénégalais entend faire de la complémentarité minière et énergétique un levier de transformation pour toute la sous-région. Plutôt que de s’enfermer dans une logique bilatérale, il propose une dynamique triangulaire entre Dakar, Conakry et Freetown, axée sur les ressources naturelles que chaque pays possède en abondance.
Un pari sur la synergie des matières premières
Pour Sonko, l’avenir de l’Afrique de l’Ouest pourrait bien se jouer autour de ce qu’il appelle « l’intelligence des ressources ». Il ne s’agit plus seulement d’exploiter le gaz naturel sénégalais ou la bauxite guinéenne de manière isolée, mais de les articuler dans une stratégie commune. Le fer sierra-léonais entre également dans cette équation. L’idée est simple mais puissante : tirer parti de l’avantage comparatif de chaque nation pour concevoir des chaînes de valeur régionales. Une vision qui s’oppose à la logique extractiviste traditionnelle et qui cherche à faire émerger des partenariats industriels en lieu et place de simples accords d’exportation brute.
Ce raisonnement repose sur un constat partagé : aucune des économies ouest-africaines ne peut seule franchir le seuil de l’industrialisation durable. Mais en mutualisant leurs ressources et en développant des infrastructures coordonnées, ces pays pourraient, selon Sonko, changer la donne énergétique et industrielle de la zone. Il imagine, par exemple, une utilisation du gaz sénégalais pour alimenter les usines de transformation de bauxite ou de fer dans les pays voisins, réduisant ainsi la dépendance aux importations d’énergie tout en créant de la valeur localement.
Une vision politique aux accents économiques
Au-delà des considérations techniques, cette initiative porte une forte charge symbolique. Sonko cherche à installer une nouvelle grammaire de la coopération régionale, fondée non sur des slogans, mais sur des projets concrets, chiffrables, et capables de structurer durablement l’économie ouest-africaine. En s’attaquant à la fragmentation historique des politiques minières et énergétiques, il prend position sur un terrain que peu de dirigeants osent aborder avec ambition.
Le choix des matières premières comme point de départ n’est pas anodin. Elles cristallisent depuis des décennies les espoirs et les frustrations du continent. En les réinscrivant dans une dynamique collective, Sonko tente non seulement de relancer l’intégration régionale par l’économie, mais aussi de repositionner le Sénégal comme moteur politique d’une nouvelle donne ouest-africaine. Si les discours ne suffisent pas à bâtir des industries, ils peuvent néanmoins dessiner des horizons. Celui que trace aujourd’hui le Premier ministre sénégalais a le mérite d’articuler vision géopolitique et pragmatisme économique, sur fond de solidarité minérale.
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