Sénégal : Le calvaire de Malick Diop, des études en Russie au front ukrainien

Un immeuble bombardé en Ukraine (Photo DR)

Parti en Russie avec l’espoir d’un avenir meilleur, Malick Diop rêvait de diplômes et d’opportunités. Il s’est retrouvé pris dans un engrenage aussi opaque qu’inattendu. Tout commence lorsqu’un homme l’aborde, lui proposant un poste en cuisine avec une promesse salariale généreuse : 800 000 roubles par mois. À aucun moment, selon lui, l’offre ne mentionnait une quelconque implication militaire. Confiant, il accepte. Mais ce qu’il croyait être un emploi civil s’est transformé en enrôlement dans l’armée russe, sans qu’il ne comprenne pleinement ce qui l’attendait. Une trajectoire brutale, à mille lieues de celle qu’il était venu chercher.

Une réapparition sous haute tension

Le 4 juin 2025, après des mois de silence, le visage de Malick refait surface, mais dans des circonstances troublantes. La vidéo diffusée par la chaîne officielle de la Garde nationale ukrainienne le montre prisonnier, capturé par les forces de Kyiv alors qu’il combattait sous uniforme russe. Il y raconte, d’une voix posée mais marquée par l’épreuve, le chemin qui l’a mené de la salle de classe à la ligne de front. Sa famille, restée sans nouvelles depuis avril, vit cette apparition comme un choc mêlé d’angoisse. Ils tentent depuis des semaines de pousser les autorités sénégalaises à agir, sans obtenir de réponse concrète. Face caméra, Malick ne supplie pas, mais ses mots traduisent un appel désespéré à retrouver la liberté.

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Le silence officiel et les zones d’ombre

Cette affaire soulève une série de questions qui dépassent le seul cas individuel. Comment un étudiant étranger peut-il être enrôlé, contre son gré ou par tromperie, dans une armée engagée dans un conflit aussi meurtrier que celui en Ukraine ? Combien d’autres jeunes, attirés par des offres alléchantes, se retrouvent piégés dans des systèmes opaques où la frontière entre travail et guerre s’efface ? Le mutisme des autorités sénégalaises ajoute à l’incompréhension. Pour la famille de Malick, chaque jour sans réponse renforce l’impression d’abandon. L’État, garant de la protection de ses citoyens à l’étranger, se retrouve ainsi interpellé sur sa capacité à réagir dans des dossiers où diplomatie et droits humains se croisent.

Le cas de Malick Diop, mis à nu par une simple vidéo, rappelle qu’à l’ère des conflits géopolitiques mondialisés, les trajectoires individuelles peuvent se retrouver broyées entre des intérêts qui les dépassent. Il ne s’agit plus seulement de rapatrier un ressortissant, mais de prévenir d’autres dérives semblables. Car derrière ce visage perdu quelque part entre Moscou et Marioupol, c’est aussi une génération en quête de mobilité et de dignité qui risque d’être prise au piège.

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