La course à la tête de la Fédération Sénégalaise de Football (FSF) prend forme dans un climat contrasté. Alors que les trophées s’accumulent dans les vitrines, les comptes, eux, tirent la sonnette d’alarme. Le dernier rapport financier a mis en lumière un déficit de 2,4 milliards FCFA, une trésorerie essoufflée et des subventions publiques divisées par deux. Ce déséquilibre s’explique partiellement par l’élimination prématurée à la CAN 2024, qui a refroidi les sponsors, mais aussi par des retards structurels, comme la rénovation du stade Demba Diop, toujours en suspens. Les équipements restés en stock et non utilisés témoignent d’une gestion perfectible, loin de l’image triomphante renvoyée par les titres remportés.
Dans ce contexte tendu, le prochain président de la FSF devra faire plus qu’administrer des victoires. Il lui faudra aussi redresser la barre financière, rétablir la confiance des partenaires publics et privés, et répondre aux critiques d’une base de plus en plus exigeante. La succession d’Augustin Senghor, au terme d’un cycle marqué par des succès sportifs inédits, s’annonce donc aussi politique qu’économique.
Candidats déclarés, stratégies en formation
À ce jour, Mady Touré est le seul à avoir officialisé sa candidature. Ce 6 juin 2025, il a adressé une lettre aux présidents de clubs et de ligues pour présenter sa vision. Patron de Génération Foot, reconnu pour son travail de fond dans la formation, il n’en est pas à son coup d’essai. En 2021, il s’était déjà présenté sans succès. Cette fois, il revient avec une équipe renforcée et une structure de campagne plus rigoureuse. Il mise sur son expérience de terrain et sa capacité à faire émerger des talents, à l’image de Sadio Mané, formé dans son académie.
En face, Seydou Sané, ancien président du Casa Sports, reste encore dans une posture ambigüe. Proche d’Augustin Senghor, dont il a été un soutien assumé, il n’a pas encore officialisé sa candidature. Mais ses récentes prises de parole et ses contacts avec certaines ligues régionales laissent peu de doute sur ses intentions. Quant à Abdoulaye Seydou Sow, souvent cité dans les milieux footballistiques, il pourrait entrer dans la course dans les prochaines semaines, apportant un profil plus institutionnel au débat.
Au total, ce sont entre trois et cinq prétendants potentiels qui se préparent à en découdre. Tous devront composer avec un héritage glorieux sur le plan sportif, mais fragilisé par une situation financière qui appelle à des choix clairs, à la fois stratégiques et opérationnels.
Au-delà des trophées, un besoin de réinvention
Le bilan d’Augustin Senghor reste impressionnant sur le papier : CAN 2021 pour l’équipe A, CHAN 2023, CAN U20, CAN U17, CAN de beach soccer. Jamais le football sénégalais n’a été aussi titré. Mais ces succès ne suffisent plus à masquer les attentes nouvelles. Le public, les clubs de base, les supporters, veulent plus de transparence, plus d’inclusion, et surtout, plus de retombées visibles. Le prestige acquis à l’extérieur ne suffit pas à calmer les frustrations internes liées au manque d’infrastructures, à la mauvaise répartition des ressources ou à l’absence de projets durables en direction du football amateur.
Les ambitions affichées par les futurs candidats devront donc proposer une vision concrète, capable d’aligner performance, gouvernance et impact local. Le scrutin prévu le 2 août 2025 ne désignera pas seulement un nouveau visage. Il révèlera aussi la capacité du football sénégalais à se renouveler, à s’organiser autour d’une vision partagée et à relever le défi de la rigueur dans la gestion, sans sacrifier l’élan sportif.
Derrière les jeux d’alliances et les lettres de candidature, c’est tout un système qui cherche à se réinventer. Entre passion populaire et exigences de gestion, la présidence de la FSF devient l’un des postes les plus exposés et stratégiques du paysage sportif national.
Laisser un commentaire