L'attaque terroriste perpétrée le 8 janvier contre le car des joueurs de l'équipe nationale togolaise dans l'enclave angolaise de Cabinda a légitimement choqué le monde du football et au delà. Sans prétendre le prédire, ce type d'événement condamnable n'est pas surprenant pour autant. En septembre 2006, soit seulement quatre années après la fin de la guerre civile ayant ravagé le pays pendant un quart de siècle, l'Angola a été désignée par la Confédération africaine de football (CAF) pour organiser cette 27e Coupe d'Afrique des nations de football, la principale compétition sportive africaine. Ce choix était à l'époque et reste aujourd'hui assez incompréhensible.
Le choix de l'Angola pour accueillir la Can ? Incompréhensible.
Si certains Etats africains comme le Rwanda ont pu réactiver des infrastructures correctes après des tragédies, il n'en est rien en l'Angola :
* les routes sont en très mauvais état
* les transports publics quasi-inexistants
* la corruption y est endémique
* les mines anti-personnelles encore bien présentes
* l'insécurité galopante est aggravée par la grande quantité d'armes en circulation d'une société à peine sortie de la guerre.
A cela s'ajoute des procédures d'entrées extrêmement complexes puisque l'Angola est l'un des rares Etats à ne pas délivrer de visas de tourisme, ce qui pose des problèmes aux éventuels supporters africains et européens qui souhaiteraient assister à la compétition.
L'Angola possède du pétrole, beaucoup de pétrole
En revanche, le pays possède du pétrole. Beaucoup de pétrole, notamment des installations off-shore dans l'océan Atlantique qui ont attiré de nombreux investisseurs étrangers. La conséquence a été l'envol des prix de l'immobilier.
Et si à Luanda, la capitale, l'écrasante majorité de la population exclue des retombées de la manne pétrolière, vit avec moins de deux dollars par jour, le mètre carré des nouveaux appartements qui prolifèrent depuis quelques années se négocie autour de 10 000 euros.
La CAF porte donc une lourde responsabilité dans l'attaque du car togolais, car elle a choisi l'Angola en connaissance de cause. D'ailleurs, pour la première fois, elle a également désigné les hôtes des deux prochaines éditions :
* au Gabon et en Guinée équatoriale en 2012 où l'exploitation récente du pétrole a créé de nouvelles opportunités économiques
* en Libye en 2014 où la fin de l'isolement du régime de Khadafi nourrit de grands intérêts économiques à l'étranger.
Gabon, Guinée équatoriale, Libye : choisis pour les prochaines coupes
Et au cas où l'un de ces Etats ne serait pas en mesure d'accueillir la compétition, le Nigeria, autre Etat pétrolier à la corruption et à l'insécurité avérées, comblerait le vide.
Certes, le choix à l'avance des Etats hôtes pour une compétition ayant lieu tous les deux ans est une nécessité, notamment pour négocier les droits TV de plus en plus élevés, surtout au regard de la popularité grandissante du football africain.
Mais de nombreux problèmes de billetterie, la difficulté à remplir les stades à cause du faible pouvoir d'achat des populations locales et les problèmes traditionnels d'accueil des différentes délégations ont été récurrents lors des dernières CAN, qui se tenaient pourtant dans des Etats plus développés (Egypte en 2006, Ghana en 2008).
D'où une question simple : quel(s) intérêt(s) pour la CAF à choisir des Etats regorgeant de pétrole, au détriment de la qualité de l'accueil, de la sécurité de tous et finalement de l'idée que l'on est censé se faire du football, et du sport en général ?
Laurent Hassid
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