Dossier spécial conférence nationale

 

Regard de Martin Assogba sur la société civile béninoise: «Il y a trop d’organisations de la société civile politisées dans le pays…»

Acteur majeur, «pur et dur» -comme il aime à se réclamer lui-même de la société civile béninoise, et président de l’Association de Lutte contre le Racisme, l’Ethnocentrisme et le Régionalisme (Alcrer) qui «œuvre depuis 18 ans pour la protection des droits de l’homme, la bonne gouvernance, l’éducation et l’alternance au pouvoir»,  Martin Assogba jette un regard sur l’évolution la société civile depuis l’historique conférence des forces vives de la nation. Avec le ton bouillonnant qu’on lui connait, c’est au siège de son Ong sis au quartier Mênontin qu’il s’est prêté à nos questions.

Quel regard avez-vous sur l’évolution la société civile de 1990 à aujourd’hui?

Il faut dire qu’avec le déchaînement que nous avons eu vis-à-vis du parti unique, qui nous avait emmenés au marxisme-léninisme où personne ne pouvait s’exprimer librement par rapport à la gestion des affaires publiques, nous sommes allés à la conférence des forces vives. Certaines résolutions ont été prises pour changer le cours des choses afin que chaque citoyen puisse opiner librement sur la gestion des affaires publiques du pays. C’est à partir de ce moment que c’est éclot le mouvement dit mouvement de la société civile où beaucoup de citoyens se sont mis ensemble avec des objectifs donnés afin que leurs groupes, chacun en ce qui le concerne, aide aussi au développement du pays. Donc, vous avez beaucoup d’Organisations non gouvernementale (Ong) de différentes thématiques. Le fonctionnement de la société civile se passait très bien et les partenaires au développement aidaient pour que cette dernière ait un son de cloche différent de celui des dirigeants, je veux dire des gouvernants. Beaucoup d’associations faisaient du bon travail.
Mais chemin faisant et, contre toutes attentes, avec l’amenuisement de l’aide financière que les partenaires au développement ne donnaient plus ou ne donnaient plus assez, beaucoup d’associations ont commencé par flirter avec les gouvernants. D’où l’avènement aujourd’hui d’une multitude d’Ong, ça je le dis et je le confirme, qui sont rattachées, qui sont des appendices du pouvoir. Nous avons beaucoup d’Ong qui sont créées par des politiciens, des ministres et qui deviennent des chantres de ces politiciens et ministres. Or, le travail de la société civile ne doit pas être celui-là. Le travail de la société civile c’est d’être l’interface entre les populations et les gouvernants. Il s’agit de féliciter les gouvernants pour les bonnes actions faites et de les dénoncer par rapport à la mal gouvernance, notamment. Mais aujourd’hui, nous constatons malheureusement  que la société civile s’est effritée en deux catégories. Il y a la société civile qui supporte les yeux fermés, les oreilles bouchées tout ce que fait le gouvernement, que cela soit bon ou mauvais. Mais vous avez de l’autre coté, une société civile qui est encore crédible que des gens peuvent considérer comme la vraie société civile parce qu’elle, n’a pas sa langue en poche. Les organisations de cette seconde catégorie ne sont ni contre le gouvernement ni pour le gouvernement; elles sont au centre des gouvernants et des populations pour défendre les intérêts de la société. Par ailleurs, Il y a des gens qui se disent société civile et qui vont dans les coins reculés du pays pour escroquer les pauvres paysans et les pauvres paysannes.

Que proposez-vous de l’assainissement de la société civile à fin qu’elle soit véritablement au service du développement?
Nous ne pouvons que donner des conseils à ceux-là qui sont en train de dévier de leurs objectifs en tant qu’organisations de la société civile. Une société civile ne doit pas être politisée. Il y a trop d’organisations de la société civile politisées dans le pays, et tout le monde le sait. Il faut que ces organisations aient la conscience pour jouer le rôle de société civile qu’elles se sont assignées elles-mêmes.  Ce n’est que comme ça qu’elles pourront avancer. Parce que quand vous n’êtes pas honnêtes dans ce que vous faites comme activités, vous ne pouvez pas avancer.
Réalisation: Léonce Gamaï 

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