Dossier spécial conférence nationale

 

Le Bénin comme condamné au biberon des institutions de Bretton Woods

Un taux de croissance à un chiffre, un produit intérieur brut par habitant (Pib/hab) toujours faible, une dette extérieure en croissance continue, des réformes en piétinement. Ce sont là quelques repères de l’économie du Bénin malade et demeurée sous tutelle internationale, après 22 ans de démocratie.
Plus de deux décennies après la conférence historique et souveraine de février 1990, l’économie béninoise vivote et peine à décoller. La fronde sociale de fin 1989 et la faillite de l’Etat qui en a suivi sont au cœur des raisons ayant conduit aux assises historiques de l’année 1990. L’espoir, notamment économique, suscité par les conclusions des travaux de la conférence s’est au fil des ans et des gouvernements effrité.

Un système économique très vulnérable

Les difficultés d’avant la conférence ont contraint le pays à l’ouverture économique. Le système socialiste fait désormais place à celui capitaliste où la libre concurrence et la réduction de l’interventionnisme de l’Etat sont désormais de règle. Le pays tente, avec l’aide des institutions financières internationales, d’amorcer son développement économique mais sa nature extravertie l’expose très tôt et la rend très vulnérable aux crises extérieures. Les crises nigérianes ont, comme de tout temps, impacté son économie. Mais paradoxalement et en dépit de toutes ces difficultés, on y note un “boom“ relatif au début de l’ère du renouveau démocratique.
De 91 à 95, le taux de croissance réel est passé d’environ (-5%) à (+6%). Le Pib par habitant a aussi connu une évolution, de 113 à 196 dans la même période (Insae, données des comptes nationaux). Ces chiffres demeurent relativement faibles. Du fait de la suppression de certaines taxes douanières et l’instauration d’une taxe sur valeur ajoutée (Tva) unique de 18%, le pouvoir d’achat des populations s’est considérablement amenuisé. La décennie d’après, c'est-à-dire de 96 à 2005, l’élan économique est freiné et évolue depuis lors, en dents de scie. Le taux de croissance chute jusqu’à 4% en 1998, connaît un bond à fin 2001, faisant un record national de 6,2% avant de retomber à 2,6%. L’arrivée en 2006 d’un nouvel économiste à la tête de l’Etat a, derechef, suscité des espoirs.
Deux ans de «Changement» ont permis de relever l’économie à 5% en 2008 mais les jours passant, le secteur a pris un coup et aujourd’hui le taux de croissance est moins reluisant pour redescendre à 2,6% en 2010. Les 4% projetés pour l’année 2012 sont remis en cause par les spécialistes et les difficultés rencontrées pour cause de réformes, notamment portuaires, qui devraient, avait-on dit, permettre une augmentation des recettes de l’Etat, semblent leur donner raison. 
L’aide extérieure espérée par le président Mathieu Kérékou en vue de la relance de l’économie, déjà à terre avant la conférence, n’a été possible qu’après l’adoption du programme d’ajustement structurel concocté par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (Fmi). Ainsi, le premier programme est signé le 16 Juin 1989 et un second le 1er Août 1991. Dès lors, le Bénin entreprend une série d’actions visant à réduire le train de vie de l’Etat, la privatisation, la réorganisation ou liquidation des entreprises sous sa tutelle. Des mesures pour encourager l’investissement étranger sont prises. Mais, chose curieuse, la dette extérieure, a connu en cette période un accroissement de 35%, selon le Comité pour l’annulation de la dette du Tiers-monde.

Un secteur privé à dominance informelle

Le développement du secteur privé mais informel est aussi une cause du sous développement économique de la République du Bénin. Avec le libéralisme économique, ce secteur occupe une place de choix. Il devra dorénavant être le socle de la relance de l’économie. Mais la prédominance du secteur informel sur celui formel a vite floué toutes les prévisions. Le secteur informel concentre 98,5% des entreprises, selon la synthèse des résultats du recensement général des entreprises deuxième édition réalisée par l’Institut national des statistiques et de l’analyse économique (Insae). Dans le même temps, le taux d’accroissement de la population a chuté. Passant de 6,3% entre 1972 et 1992 à 4,3% sur la période 92-2002 (Insae, 2003).
La souveraineté est toujours une utopie 22 ans après la conférence historique. Le budget national reste dépendant du financement des institutions de Breton Wood. Du coup, l’économie est orientée au gré des humeurs des partenaires dits techniques et financiers.
ao Hervé Kingbêwé & Olivier Ribouis (Stags)

 

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